Réveillez-vous, réveillons-nous – à propos d’En nous de Régis Sauder
Réveillez-vous, réveillons-nous, c’est ce qu’on ressent à la sortie de la projection d’En nous, le nouveau film de Régis Sauder. En nous, ce sont, dix ans après, les retrouvailles avec les lycéennes et lycéens que le réalisateur avait suivis dans Nous, princesses de Clèves. Sur un air de Lully interprété par Jordi Savall, Abou, Albert, Armelle, Aurore et les autres, élèves du Lycée Diderot de Marseille, lisaient La Princesse de Clèves, dans le cadre d’une activité proposée par deux enseignantes de français, Anne et Emmanuelle.

Si Abdellatif Kechiche, en 2003, avait déjà entremêlé les textes classiques – en l’occurrence Le Jeu de l’amour et du hasard, de Marivaux – et les voix de jeunes de « banlieue », il s’agissait là d’un film de fiction. Avec Nous, princesses de Clèves, au contraire, le parti pris était documentaire : pas d’acteurs ou d’actrices, mais des jeunes filles et jeunes hommes, qui étaient élèves de première ou de terminale, mais aussi filles et fils de, frères et sœurs, amoureux ou amoureuses, et également jeunes d’un endroit bien particulier – les fameux quartiers Nord de Marseille.
L’enjeu était clair : mettre à l’épreuve des nuances et des subtilités de la réalité toute la série de stéréotypes que charrient ces mots – jeunes, banlieue, quartiers Nord, Marseille, mais aussi « Princesse de Clèves », littérature classique, XVIIe siècle… Souvenons-nous de la déclaration d’un candidat alors à l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy, ironisant sur la mise au programme d’un concours administratif de La Princesse de Clèves. Armelle lui répondait de façon indirecte, dans Nous, princesses de Clèves, en défendant le droit à la même littérature que les lycéens des autres lycées, et en repoussant l’éventualité de programmes au rabais.
Pour une sociologue de la culture, Nous, princesses de Clèves était un magnifique exercice de réception : comment les textes classiques parlent-ils à des adolescents contemporains, que tout, apparemment, semblerait éloi