Verticalités morales – à propos de Colonne d’Adrien Bosc
Troisième roman de l’écrivain et éditeur Adrien Bosc, Colonne attrape vraiment l’attention du lecteur à partir de la page 93, à partir du moment où est reproduite une lettre que Simone Weil (1909-1943) adresse à Georges Bernanos (1888-1948) en 1938. La philosophe a lu Les Grands cimetières sous la lune, qui vient de paraître. Le livre dénonce les crimes nationalistes commis en Espagne. En août 1936, Weil s’est rendue sur le front, en Aragon, dans la commune de Pina de Ebro située à quelques kilomètres de Saragosse.

Elle a passé quarante-cinq jours dans le camp des « rouges » et fut témoin du « plaisir » de tuer pris par les républicains : « Pour ceux-là, je ne pourrais jamais avoir à l’avenir aucune estime. Une telle atmosphère efface aussitôt le but même de la lutte. Car on ne peut formuler le but qu’en le ramenant au bien public, au bien des hommes – et les hommes sont de nulle valeur. »
Citée in extenso, la lettre est remarquable et d’une grande importance. Weil a vingt-sept ans quand elle la rédige. On y trouve sa signature, c’est-à-dire le courage de dénoncer les erreurs, les errements, les fautes de ceux auprès desquels elle se battait. Autre salle, même ambiance : favorable aux phalangistes au début de la guerre d’Espagne et père d’un garçon, Yves, qui se bat dans leurs rangs, Bernanos en 1936 observe depuis l’île de Majorque l’épuration à l’œuvre, juste avant l’imminence du débarquement des républicains.
L’intellectuelle tient à prendre part aux combats et à ne surtout pas se cantonner, ni être cantonnée, au rôle d’observatrice.
Bernanos fustige, écrit Bosc, « le peu de prix de la vie et le sang versé en pure cruauté. » Donc ce que lit Simone Weil dans le livre de Bernanos, « c’était en miroir – ce reflet inversé – les exactions commises dans les tranchées d’Aragon. Elle en partageait le désespoir lucide. Une expérience opposée, une désillusion commune. »
À partir du moment où il cite cette lettre de Weil, Bosc met en évidence la façon dont « deux