Art contemporain

De quoi y a-t-il histoire ? – sur « Thomas Demand, le bégaiement de l’histoire »

Sociologue

Né en 1964 à Munich et formé à la fois à la Kunstakademie de Düsseldorf et au Goldsmiths College de Londres, Thomas Demand réalise un double travail de sculpture et de photographie. Une exposition monographique au Jeu de Paume offre l’occasion de prendre toute la mesure de son œuvre d’une grande richesse, qui traite à la fois de l’artisanat, de nos techniques et des mémoires que nos savoir-faire et nos machines recomposent ensemble.

L’anecdote est connue : le 2 août 1914, Kafka consigne dans son journal un lapidaire : « L’Allemagne a déclaré la guerre à la Russie. Après-midi piscine ». La distance qui sépare ces deux phrases semble infranchissable ; même, elles paraissent se tourner le dos l’une l’autre. L’énoncé exprime ainsi cette espèce de virtualité dans laquelle évoluent les géants de l’Histoire, « l’Allemagne », « la Russie », et d’où ils l’écrivent ; à quoi s’oppose l’immédiateté du loisir, la piscine, activité première — et un peu bête — du délassement.

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C’est cet écheveau entre le monde vécu, l’actualité et l’histoire que démêle, jusqu’au 28 mai, au Jeu de Paume, l’exposition consacrée à l’œuvre du sculpteur et photographe allemand Thomas Demand. Les œuvres de celui-ci constituent autant de variations autour d’un même mode opératoire : Demand fabrique d’abord des maquettes en papiers et en cartons représentant un décor, sans présence humaine, qui se rattache de près ou de loin à un événement historique. Puis, l’artiste photographie sa maquette avant de la détruire pour n’en conserver que l’image, dont des tirages chromogènes sont exposés.

Le procédé réalise une double mise à distance. D’abord, il inspire au visiteur du musée, confronté aux images, une impression d’« inquiétante étrangeté[1] », terme déjà beaucoup convoqué pour parler du travail de Demand[2]. Ensuite, il introduit un second écart entre la scène représentée et l’événement historique auquel elle fait référence : celui-ci se trouve à peine suggéré, tout juste prête-t-il son contexte à la scène. La clarté de la référence intéresse finalement moins Thomas Demand que les lignes d’horizon de nos paysages visuels, celles qui organisent les collections d’images, surabondantes, en Occident — de là le sentiment indissipable de déjà-vu dans une exposition qui fait tourner notre cinéma intérieur dans le vide.

Quelle inquiétante étrangeté ?

Si cette étrangeté nous inquiète, c’est d’abord parce qu’elle froisse un tissu de choses qui nous sont familières. Thomas Demand lui-même le confie dans un entretien avec le théoricien, cinéaste et auteur de fiction Alexander Kluge : les flux médiatiques nous traversent de part en part, et nous y sommes tout à fait à l’aise : « C’est exclusivement à travers ce récit médiatique que j’acquiers la majeure partie de mon expérience et non, comme on l’aurait fait, il y a une ou deux générations, via l’“expérience première” […] Je me trouve au bout de toute une chaîne de mondes d’images qui se présentent à moi. Toute mon expérience, tout ce que je suis largement, est dans une large mesure le produit de choses qui m’ont été transmises. »[3]

Mais de ces choses que nous savons, nous savons bien peu de choses. Günther Anders a pointé ce défaut de réalité dont pâtissent les nouvelles que nous rapportent les médias. Ces informations se présentent sous la forme d’un prédicat privé de son sujet[4] : « Guerre au Soudan : le bilan s’alourdit ». Au prédicat, ici l’effet meurtrier d’une guerre et ses circonstances, ne correspondent que des sujets très lointains, proprement « fantomatiques ». Ces nouvelles n’incitent pas leur destinataire à s’enquérir de davantage d’information, pas plus qu’elles ne motivent telle ou telle action de sa part. Si l’on m’apprenait au contraire qu’un événement dramatique concerne un de mes proches, mon monde vécu, je chercherais très certainement à en apprendre davantage et m’efforcerais moi-même de reconstruire un récit plutôt que je ne m’en tiendrais à celui dont j’ai ouï-dire[5].

Comment ne pas reconnaître les fameux prédicats sans sujet dans les photographies de Thomas Demand ? Cette baignoire sans baigneur par laquelle l’exposition s’ouvre presque, ces photocopieuses sans opérateur, ces tribunes sans orateur suscitent en effet autant de scènes sans personnage pour les agir. Les œuvres Ruine (2017) et Tribute (2011) portent cette absence à son comble, illustrant les catastrophes par leur modalité principale : elles sont ce qui dépeuple.

C’est bien là le sens de l’« inquiétante étrangeté » freudienne ; il faut imaginer les œuvres de Demand comme des natures mortes où tout serait pourtant désespérément humain. Le silence de ces images prend vite le pas sur l’attraction que leur familiarité exerce ; elles n’ont rien à témoigner du drame qui les surpasse. Seule la connaissance du contexte, ensuite, suspend le malaise ; il crédite les images de certaines coordonnées, et fige dans un temps et dans un lieu toute leur réserve de sens. La pièce Refuge (2021) en offre le meilleur exemple : les cinq images qui composent l’œuvre reprennent des vues de la chambre qu’Édouard Snowden occupait à l’aéroport Cheremetievo de Moscou lorsqu’il fuyait les autorités américaines. Ces murs sans attribut aucun, propres aux zones de transit noyées dans les flux, ont pris pendant un peu plus d’un mois une consistance inédite[6]. Il suffit au spectateur de ces cinq images de découvrir leur contexte pour les concevoir, malgré leur banalité consternante, comme un lieu possible pour le centre du monde.

On peut finalement se demander si ce n’est pas tout le concept d’« histoire » qui serait gros de cette ambivalence. Reinhart Koselleck, faisant l’analyse du concept, a montré comment apparaît à la fin du XVIIIe siècle une conception de l’histoire « en soi et pour soi », de « l’histoire en tant que telle », qui ne recueille pas seulement la somme de toutes les histoires individuelles. Il faut à l’Historie, qui ne traite « que du singulier, du particulier et de l’accidentel »[7], ce supplément pour se hisser au niveau de la Geschichte, l’histoire pourvue d’une agentivité, de l’épaisseur d’un sujet et support pour une philosophie. Demand met en images le saut qui sépare ces formes d’histoire, entre l’« histoire en soi » et « notre histoire », entre le générique et sa détermination, entre la petite et la grande histoire — un saut que Kafka connaît bien qui plonge dans l’eau.

On parlait plus haut d’une double mise à distance. La première d’entre elles nous laisse bien démunis : elle nous plonge dans le paradoxe où, bien qu’il n’y ait rien d’extérieur aux médias, tout ce qu’ils portent à nous demeurera toujours très lointain.

« Je me demande comment se souviennent les gens qui ne filment pas, qui ne photographient pas… »[8]

Les photographies de Thomas Demand cultivent une seconde ambiguïté, introduisant une distance entre l’image et l’événement auquel elle emprunte son contexte. Ce second écart s’opère notamment par le choix de l’artiste, non dénué d’ironie, du papier et du carton. Ces matériaux, bien qu’ils n’aient pas le caractère impérissable du bronze ou de la pierre, sont pourtant ceux privilégiés pour l’écriture de l’histoire.

Le papier occupe dans l’exposition tant le rôle de matériau artistique que celui de sujet représenté : Folders (2017), Poll (2001), Room (1996) mettent en effet en scène papier et carton dans différentes situations — ce sont respectivement les piles de dossiers devant disculper Donald Trump des soupçons de conflit d’intérêt, ce sont les amas des cartons mal perforés qui avaient semé le doute lors de l’affrontement entre Georges W. Bush et Al Gore, ce sont les ésotériques notes qui jonchent la chambre de Ron Hubbard…

En matière de formulaire, le pionnier de l’ethnométhodologie Harold Garfinkel avait montré[9], prenant l’exemple de dossiers cliniques entre patients et soignants, pourquoi l’acte d’inscription qui donne sens à la paperasse engage toujours davantage qu’une description, et que la trace d’une activité relève aussi d’un « contrat thérapeutique » qui unit cliniciens et patients[10]. Un dossier ne se résume jamais seulement à l’information qu’il contient, il retrace une mémoire de travail, un rapport social où des personnes, leurs émotivités et leurs affects respectifs, contractualisent. Ceci confère une dimension proprement humaine à l’austérité des lignes et des colonnes qui quadrillent les formulaires. Parfois, comme dans Poll et Folders, l’histoire s’y résume : des dossiers, des registres, des indices de papier — c’est aussi bête que cela ! — et ces piles maladroites, entrées dans la lumière, deviennent des perdants magnifiques. Atelier (2014) qui représente l’atelier de Matisse et les restants de papier que l’artiste met au rebut, provoque un même effet. Ces chutes palpitent aussi d’une vie ; elles paraissent nous toiser, fières d’avoir caressé l’espoir de « faire œuvre », et, bien qu’elles gisent au sol, portent très haut leurs couleurs.

Mais le papier et le carton doivent être replacés au sein de la famille plus étendue des objets d’inscription et des dispositifs scriptovisuels[11] : les machines à écrire, les photocopieuses, les ordinateurs, les bobines de films, qui trouvent chacun une place dans les différentes pièces de l’exposition.

Friedrich Kittler, l’un des archéologues des médias les plus importants, spécialistes des systèmes d’inscription, et pour qui « rien n’existe des individus sinon ce que les médias enregistrent et transmettent »[12] n’aurait certainement pas renié le travail de Demand, et l’impression d’inquiétante étrangeté dont il était question plus haut. On doit aussi à Kittler d’avoir mis en évidence combien notre conception de l’histoire est tributaire de nos moyens d’inscription, d’abord de l’écriture[13], puis, du gramophone, de la bobine de film, de la machine à écrire, trois inventions concomitantes : « la différenciation technique de l’optique, de l’acoustique et de l’écriture, qui autour de 1880 fait exploser le monopole de stockage de l’écriture imprimée, rend celui qu’on appelle « être humain » fabricable. Son essence déborde sur des appareils »[14].

Il est question de ce débordement dès la première œuvre de l’exposition. Archive (1995) représente des piles de boîtes de bobines de Celluloïd, tirées des archives de Leni Riefenstahl, réalisatrice phare du Troisième Reich. Ces objets ne se doutent pas combien la mémoire qui les hante nous est insupportable ; et pourtant, il nous est impossible de ne pas les déclarer complices, de ne pas sentir déborder de leur surface tout le mal qu’ils renferment… Et à la tentation d’humaniser ces objets s’associe celle de chosifier notre histoire, de la piéger, elle et ses puissances maléfiques dans la matière excessive des tas, des piles, des amoncellements, comme si cette matière ne pouvait pas être appréhendée sous le signe de la rareté. Même Workshop (2017), qui célèbre l’exceptionnel artisanat d’un luthier, montre toute une population de violons.

C’est pour penser l’ubiquité des médias et des nouvelles technologies que Demand représente leur envers, la « nature » brute dans Grotte (2006), Pond (2020) ou Lichtung (2003), — œuvre pour laquelle l’artiste a confectionné 270 000 feuilles d’arbres en papier. Cet en-dehors l’humain, ce négatif absolu, existe-t-il toujours ? Tout suggère que pour toucher les frontières de l’artifice, il faille recréer des grottes millénaires, des forêts inextricables…

Comment qualifier cette seconde mise à distance ? « Le royaume des morts est aussi grand que les possibilités d’enregistrement et d’émission d’une culture. » écrivait Kittler, et dans ces images, les spectres tiennent cérémonie. Mais pas uniquement : par tous les procédés mentionnés plus haut, Demand travaille la matérialité précaire du souvenir. Ce dont on se remémore est à la fois évanescent, lointain, et en même temps tellement saillant. Bon ou mauvais le souvenir qu’on chérira toute sa vie, le traumatisme qu’on ne saura conjurer : notre mémoire donne aux accidents un pouvoir aigu de rémanence. Peut-on faire voir les souvenirs de la mémoire collective ?

Le XXe siècle en scène

En définitive, il n’y a dans ces images que des représentations du XXe siècle — et si certaines pièces sont plus tardives, les objets que ces pièces représentent datent bien du siècle dernier ou en héritent absolument. De la même manière qu’il s’est passé quelque chose, à la fin du XVIIIe siècle, qui a conduit l’opinion publique à se prendre pour sujet d’actualité, il semble que le XXe siècle nous ait légué un vocabulaire visuel pour cette actualité, un mode de présentation médiatique qui touche à la fois à l’aspect des images, à leurs sujets de prédilection, à leurs mises en scène — pensons à ces tribunes, comme celle de Podium (2000), où ont paradé tant de dirigeants du siècle précédent, aux plateaux de télévision (Studio, 1997), ou à la porte ouverte de l’avion de Gangway (2001) qui fait référence au rituel de débarquement de figures illustres…

Ce registre d’images difficilement qualifiable, et peut-être pas si unifié, Thomas Demand l’approche dans son travail par cette impression de facticité qui rebute parfois le spectateur : le grain des formes, l’aplanissement des contrastes, tous ces éléments surannés, dont on ne sait s’ils sont vraiment l’effet du maquettisme, portent aussi la trace d’une recomposition, par notre œil, des images dont le XXe siècle l’a saturé.

Les œuvres de Demand présentent ce dans quoi les sujets d’actualité évoluent, une sorte de « scénographie phénoménotechnique »[15] : phénoménale parce que l’actualité y « apparaît », technique parce que les outils d’enregistrement et de diffusion façonnent cette configuration à la fois dramatique et iconographique. Pour forcer le trait, on pourrait parler d’une épistémè, non pas tant dans le sens premier que lui a attribué Michel Foucault[16], mais suivant la réinterprétation qu’en a faite Bruno Latour[17] : l’épistémè qualifie « comment une culture voit le monde », « comment le rend-elle visible » ; et Thomas Demand d’en illustrer ce détournement : comment notre culture se rend-elle l’actualité visible ? Cette épistémè a quelque chose de civilisationnel, parce qu’elle repose sur un compromis politique, technique, social. Latour parlait, pour voir le monde, « des sciences nouvelles, des théories de l’optique, [d’] une certaine organisation des arts et des métiers, et surtout [d’] une économie » ; Demand représente l’infrastructure des scènes du XXe siècle — la comédie des arènes politiques, l’économie des médias et des organes de broadcasting, les rythmes sociaux où s’intègre la grande messe du journal de 20 heures…

Il s’est donc bien passé quelque chose à la fin du XIXe siècle, lorsqu’on a laissé les spectres entrer dans les nouveaux médias, et qu’on a donné à l’actualité et ses inscripteurs de quoi hanter l’histoire. Il faut comprendre que cette configuration phénoménotechnique  résulte d’un processus historique, et la restituer dans son déroulé[18], pour penser aujourd’hui qu’elle pourrait être révolue. On a en effet parlé de la rupture que constitue la guerre menée par la Russie en Ukraine, une rupture dans ce mode d’apparaître de notre actualité[19], abrutissant, vertical. La guerre s’est donnée à voir sous un nouveau régime médiatique qui a laissé une place prépondérante à l’image amateur, un régime qui s’entretient aussi du discrédit jeté sur les « images officielles ». Serait-ce, sous nos yeux, la fin de l’épistémè qui, pendant plus d’un siècle, avait prévalu ?

Notre conclusion s’adosse à celle de l’exposition. Après 2008, Thomas Demand a commencé à réaliser de plus petits formats, les Dailies, qui représentent des maquettes inspirées de détails photographiés lors de ses promenades ou de ses voyages : un chewing-gum collé sur une bouche d’aération, un gobelet en plastique coincé dans un grillage, un gros cendrier hérissé de mégots… L’une des dernières salles de l’exposition présente certains de ces Dailies. L’humour qui se dégage presque malgré elles de ces scénettes en fait de petits enchantements quotidiens, à la portée de tous les smartphones, de toutes les caméras qui voudraient bien les voir. Gratuits, immédiats, les Dailies constituent autant d’actes de sabotage de la « scénographie phénoménotechnique » mentionnée plus haut. Ils portent la même innocence que celle de Kafka, au bord de la piscine, qui, sachant le fracas qui bouleversait l’Europe, voulait un coin pour lui qui demeurait indemne, un coin soustrait à l’histoire. « Après-midi piscine » : c’était une forme de prière.

« Thomas Demand, le bégaiement de l’histoire » jusqu’au 28 mai au Jeu de Paume, Paris.


[1] L’expression traduit le terme allemand Unheimliche, titre d’un essai de Freud paru en 1919.

[2] Le commissaire de l’exposition, Douglas Fogle, en fait notamment l’analyse dans le texte qui l’accompagne.

[3] Voir le texte « Mémoire et atrophie », de Margaret Iversen, dans le catalogue de l’exposition.

[4] L’Obsolescence de l’homme, Paris, L’Encyclopédie des nuisances, 2001 [1956]

[5] On rappelle ici que Wittgenstein, dans De la certitude, remarque tout autant que la plupart des choses que l’on sait nous sont connues par ouï-dire.

[6] Le choix de cette chambre rappelle une autre œuvre de Demand : Room (1994), photographie de la chambre dans laquelle se trouvait Adolf Hitler au moment où Claus von Stauffenberg tenta de l’assassiner.

[7] Voir le texte de Koselleck : « Le concept d’histoire ».

[8] Cette citation, tirée du film-essai Sans soleil, de Chris Marker, est utilisée par Friedrich Kittler dans l’avant-propos de Gramophone, Film, Typewriter.

[9] Voir le chapitre « “Good” Organizational Reasons for “Bad” Clinical Records », dans Studies in Ethnomethodology.

[10] Garfinkel montre par exemple que, dans l’intimité de la relation thérapeutique, certaines questions, nécessaires au remplissage des formulaires, ne peuvent pas être posées à tous les patients ou dans tous les contextes. Mais les cliniques et les soignants, connaissant les ficelles du métier, se rendent pourtant capables d’interpréter a posteriori des dossiers mêmes lacunaires, de leur donner sens ; pour les praticiens issus d’autres cliniques, ou pour tous ceux qui ne sont pas unis aux patients par ces fameux « contrats thérapeutiques » que Garfinkel décrit, les formulaires demeureront inexploitables.

[11] Le terme est emprunté à l’article de Bruno Latour sur « Les “vues” de l’esprit ».

[12] Voir Gramophone, Film, Typewriter.

[13] « L’histoire était un champ homogène, constitué en discipline n’intégrant que les seules cultures de l’écrit. L’oralité et les images furent rejetées dans la préhistoire. », dans Gramophone, Film, Typewriter.

[14] Voir l’avant-propos du même ouvrage.

[15] Voir le même article de Latour, cité ci-dessus.

[16] « Ce sont tous ces phénomènes de rapports entre les sciences ou entre les différents discours scientifiques qui constituent ce que j’appelle épistémè d’une époque. » Voir « Les problèmes de la culture. Un débat Foucault-Preti », repris dans le second volume des Dits et écrits.

[17] Commentant, dans l’article « Les “vues” de l’esprit », les travaux de Svetlana Alpers, Latour écrit : « Alpers donne un sens concret à la notion encore intellectuelle de Foucault : celle d’épistémè. »

[18] De la même manière qu’Andrew Pettegree a montré que le format des journaux périodiques avait dû s’imposer sur d’autres modes concurrents de récits d’information. Voir The Invention of News: How the World Came to Know About Itself

[19] Voir le numéro 186 de la revue Hérodote,  consacré à l’open source intelligence.

Benjamin Tainturier

Sociologue, Doctorant au médialab de SciencesPo

Notes

[1] L’expression traduit le terme allemand Unheimliche, titre d’un essai de Freud paru en 1919.

[2] Le commissaire de l’exposition, Douglas Fogle, en fait notamment l’analyse dans le texte qui l’accompagne.

[3] Voir le texte « Mémoire et atrophie », de Margaret Iversen, dans le catalogue de l’exposition.

[4] L’Obsolescence de l’homme, Paris, L’Encyclopédie des nuisances, 2001 [1956]

[5] On rappelle ici que Wittgenstein, dans De la certitude, remarque tout autant que la plupart des choses que l’on sait nous sont connues par ouï-dire.

[6] Le choix de cette chambre rappelle une autre œuvre de Demand : Room (1994), photographie de la chambre dans laquelle se trouvait Adolf Hitler au moment où Claus von Stauffenberg tenta de l’assassiner.

[7] Voir le texte de Koselleck : « Le concept d’histoire ».

[8] Cette citation, tirée du film-essai Sans soleil, de Chris Marker, est utilisée par Friedrich Kittler dans l’avant-propos de Gramophone, Film, Typewriter.

[9] Voir le chapitre « “Good” Organizational Reasons for “Bad” Clinical Records », dans Studies in Ethnomethodology.

[10] Garfinkel montre par exemple que, dans l’intimité de la relation thérapeutique, certaines questions, nécessaires au remplissage des formulaires, ne peuvent pas être posées à tous les patients ou dans tous les contextes. Mais les cliniques et les soignants, connaissant les ficelles du métier, se rendent pourtant capables d’interpréter a posteriori des dossiers mêmes lacunaires, de leur donner sens ; pour les praticiens issus d’autres cliniques, ou pour tous ceux qui ne sont pas unis aux patients par ces fameux « contrats thérapeutiques » que Garfinkel décrit, les formulaires demeureront inexploitables.

[11] Le terme est emprunté à l’article de Bruno Latour sur « Les “vues” de l’esprit ».

[12] Voir Gramophone, Film, Typewriter.

[13] « L’histoire était un champ homogène, constitué en discipline n’intégrant que les seules cultures de l’écrit. L’oralité et les images furent rejetées dans la préhistoire. », dans Gramophone, Film, Typewriter.

[14] Voir l’avant-propos du même ouvrage.

[15] Voir le même article de Latour, cité ci-dessus.

[16] « Ce sont tous ces phénomènes de rapports entre les sciences ou entre les différents discours scientifiques qui constituent ce que j’appelle épistémè d’une époque. » Voir « Les problèmes de la culture. Un débat Foucault-Preti », repris dans le second volume des Dits et écrits.

[17] Commentant, dans l’article « Les “vues” de l’esprit », les travaux de Svetlana Alpers, Latour écrit : « Alpers donne un sens concret à la notion encore intellectuelle de Foucault : celle d’épistémè. »

[18] De la même manière qu’Andrew Pettegree a montré que le format des journaux périodiques avait dû s’imposer sur d’autres modes concurrents de récits d’information. Voir The Invention of News: How the World Came to Know About Itself

[19] Voir le numéro 186 de la revue Hérodote,  consacré à l’open source intelligence.