Cinéma

Portrait de l’artiste en produit dérivé – sur Daaaaaalí ! de Quentin Dupieux

Critique

96 ans après L’âge d’or, Quentin Dupieux orchestre les retrouvailles de Salvador Dalí (enfin, une vision fantasmée du peintre) et de Luis Buñuel (enfin, de la veine comique de ses derniers films des années 70). Porté par six comédiens incarnant tour à tour le maître de Cadaqués, cet anti-biopic se déguste comme une fantaisie rococo moins superficielle qu’il n’y parait.

Daaaaaalí ! (avec 6 a et un point d’exclamation), le titre a une explication officielle. Il y autant de a que d’interprètes de cet anti-biopic de Salvador Dalí.

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Quatre têtes d’affiche, précisément issues de la liste A du cinéma français (Édouard Baer, Jonathan Cohen, Gilles Lellouche et Pio Marmaï), un acteur plus âgé et mystérieux (Didier Flamand) et une « trogne » ogresque qui ne fait que passer (Boris Gillot, aperçu également dans Pauvres Créatures). Mais permettons-nous de réinterpréter ce titre à l’oral et à l’écrit. Dites « Daaaaaalí ! », le son vous rappellera peut-être le « Rhââ Lovely » de Marcel Gotlib (phare de l’humour absurdo-potache-parodique-adulescent, veine dans laquelle s’inscrit Quentin Dupieux). Mais il évoquera encore plus sûrement un râle d’extase, en l’occurrence, celui de l’artiste-diva persuadé que chacun de ses caprices, même les plus douteux (apposer sa signature sur une croûte, peloter une maquilleuse) est forcément géniaaaaaal.

Maintenant « Daaaaaalí » à l’écrit. Vous soupçonnez peut-être Quentin Dupieux de s’être endormi sur son clavier d’ordinateur. Auriez-vous rejoint le camp des détracteurs du cinéaste, l’accusant de dévoyer l’écriture automatique (héritage du surréalisme) vers des comédies à concept réalisées en pilotage automatique ? Eh bien, essayez de voir si c’est si facile ! Pour écrire donc « Daaaaaalí », appuyez-vous de manière besogneuse par petits à-coups sur la touche A ou la laissez-vous enfoncée juste le temps qu’il faut pour obtenir vos 6 a ? Ou comptez-vous 1,2,3 « aaa » et encore 1,2,3 « aaa » ? Quelle que soit la méthode, cela demande le juste timing. Exactement comme dans la comédie.

Disons tout de suite que ce Daaaaaalí ! s’inscrit dans le haut du panier de la filmographie de Dupieux. Si le film est difficilement racontable, le principe de son récit est simple : Judith, une journaliste admiratrice du peintre (Anaïs Demoustier, parfaite de touchante timidité face à son idole) cherche à obtenir une intervie


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