Anachroniques bucoliques – sur Pastorales de Bérot, Debove et Cavallin
Au moment même où le monde rural est aux prises avec des bouleversements sans commune mesure, interrogeant ses modèles économiques et sa place au sein de la société contemporaine, Wildproject fait paraître un livre à six mains, dans lequel deux bergères saisissent la vie pastorale, accompagnées en contre-chant par la figure d’un choreute, animant et dynamisant leur mélopée commune.

Les unes et l’autre ne sont pas inconnu.es puisque Violaine Bérot et Florence Debove ont fait paraître des livres sur leur métier de bergères, tandis que Jean-Christophe Cavallin est connu pour deux essais, entre creusement intime et méditation sur l’anthropocène, dans la collection Biophilia chez José Corti.
Pastorales s’écrit à contretemps, renouant avec la tradition des bucoliques et puisant dans les ressources du chant une manière de faire revivre une littérature antique : « Parlez-moi du métier des bêtes, chantez-moi l’almanach des travaux et des jours, dites-moi vos maisons fragiles, vos peurs, vos visions, vos sœurs à sang chaud, vos rencontres sur la pente. Que votre vie me recale dans le monde. » Le volume s’écrit pleinement dans cette tension entre un appel au témoignage et la réponse des bergères, consignant des expériences corporelles, notant des épisodes de vie, dans une suite de fragments sans signature attribuée, permettant de souligner une vie commune du pastoralisme.
Cet appel à dire son expérience fait de Jean-Christophe Cavallin une manière de choreute, commentant et dépliant les chants des bergères dans des interludes en italiques. Il dit la puissante rencontre de lecture des textes antérieurs de Violaine Bérot et Florence Debove, et le désir de mêler leurs univers, de confronter leurs écritures, dynamisées par son travail en création littéraire à l’Université Aix-Marseille : « Mon cerveau les accouple, en croise les beautés, fait des rêves d’éleveur sur les beaux petits qu’ils feront. Arcadie ! Arcadie partout ! Ce jour-là, pour quelques heures, j’oublie les