Une jeunesse – sur Fille de la révolution de Vera Broido
Quiconque suit l’actualité littéraire aura remarqué le nombre de récits inspirés par la vie de personnalités, de préférence artistes ou écrivains, femmes ou hommes. Peu sont convaincants, beaucoup sont l’occasion de lectures biaisées et fades. Il va de soi qu’il vaut mieux plonger dans les témoignages de première main. Celui de Vera Broido, née en 1907 à Moscou, photographiée par Raoul Hausmann, un des fondateurs du mouvement Dada à Berlin, morte en 2004 en Angleterre, en est la preuve brillante.

À dire vrai, son témoignage n’est pas de première main au sens strict. Vera Broido a fini par s’exiler en Angleterre où elle est devenue historienne, travaillant et publiant sur l’histoire des Mencheviks. Fille de la Révolution a été écrit tard dans sa vie. Dans une note finale, elle explique qu’elle a puisé dans un texte de son père, intitulé Mon évasion de Sibérie, et dans un écrit de sa mère, Mémoires d’une révolutionnaire. De ses deux sources, elle a tiré ce récit autobiographique filé avec un art de conteuse stupéfiant et une liberté rare (Pour ajouter une marche à l’escalier des générations, précisons qu’elle est la mère de Nik Kohn, écrivain et historien du rock britannique). Un vaste arc en ciel s’y dessine, qui mène d’un pays à l’autre, d’un siècle à l’autre, de l’espoir d’une révolution à son étouffement et son cruel dévoiement, puis, aussi naturellement que l’eau vive, à l’anarchisme dada.
Fille de la Révolution s’arrête là, tôt dans la vie de Vera Broido. Elle abandonne Raoul Hausmann et Berlin, mais surtout, elle vient de découvrir la vérité sur sa mère, arrêtée, déportée et jugée trois fois parce que menchevik. « Elle fut fusillée le 14 septembre 1941 » : tels sont les derniers mots que l’on peut interpréter comme un hommage et une déclaration d’amour de la fille à sa mère.
Le premier chapitre de Fille de la révolution précède la naissance de Vera Broido. L’historienne propose une synthèse enlevée et perspicace du milieu dont elle est issue. Ses prem