Critique

L’exposition que le Musée d’art moderne de Paris consacre à l’œuvre de Gabriele Münter s’inscrit dans une politique de mise en avant d’artistes femmes que la postérité, l’histoire ou la doxa ont négligées. Il est presque un peu gênant de le rappeler. Non seulement c’est désormais une politique qui se sait et se pratique très largement, mais cette négligence ne devrait pas être. Nous sommes donc encore en droit de nous indigner de la préséance de ces messieurs ! Née en 1877 à Berlin, dans une famille bourgeoise et ouverte, Gabriele Münter, elle, ne s’en est jamais laissé compter.

L’exposition parisienne, première grande rétrospective que lui offre la capitale où elle fit de longs séjours, fait effectivement valoir un tempérament curieux et expérimentateur qui ne s’est pourtant jamais départi de la figuration.

Enfant dessinatrice, jeune femme désireuse d’apprendre à exercer son regard et à le traduire en images, Gabriele Münter s’inscrit dès 1897 à la Malschule für Damen (« l’École pour dames ») de Düsseldorf. Elle y apprend ce qu’on apprend dans une académie classique : les rudiments, les techniques, les règles. Le XIXe siècle tire à sa fin, le XXe s’annonce, son désir d’innover l’incite à s’inscrire dans une école connue pour avoir coupé les ponts avec la tradition, la Phalanx (la Phalange), créée à Munich en 1901. Elle y rencontrera celui qui sera son professeur et son compagnon de plus de dix ans ; et elle sera emportée par le grand mouvement de l’expressionnisme allemand, et actrice de ce mouvement.

Entre-temps, Gabriele Münter, dont une partie de la famille a émigré au Texas, franchit l’Atlantique avec sa sœur pour leur rendre visite et découvrir ce nouveau continent. La photographie est encore jeune mais les premiers appareils sont en vente, en février 1900, à Abilene, au Texas, elle s’achète un Kodak Bull’s Eye n° 2, déterminée à tirer parti de ce nouveau medium. Les premières salles de l’exposition parisienne révèle la photographe Gabriele Münter. L