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Dominique Méda : « La question du travail souffre d’avoir été dépolitisée »

Journaliste

Vingt ans après le vote des lois Aubry sur les 35 heures, l’énarque-sociologue Dominique Méda revient sur les débats qui les ont accompagnées, avant et après. Elle déplore surtout la mainmise de la technocratie et des économistes sur une question qui passionne et qu’on ne devrait jamais réduire à ces dimensions.

Les 35 heures ont vingt ans, et le débat n’est toujours pas clos. Il a rebondi encore récemment en Allemagne avec les revendications, satisfaites, des employés de la métallurgie de réduire leur temps de travail à 28 heures hebdomadaires. Pendant ce temps, en France, on s’écharpe toujours sur lois Aubry votées le 10 février 1998 à l’Assemblée nationale en première lecture. Dominique Méda est l’une des protagonistes acharnées de ce débat, engagée pour défendre la réduction du temps de travail. Sociologue et philosophe, elle est aussi énarque et a démarré sa carrière à l’Inspection Générale des Affaires Sociales. Ses travaux se situent à l’articulation du politique et de l’économique, parfois conseillère de candidats à l’élection présidentielle, comme récemment Benoît Hamon, elle porte une réflexion au long cours sur le sens du travail, sur ses mutations à l’heure de l’automatisation, de la numérisation et du défi écologique. RB

Le travail est une question qui structure le débat : comment comprenez-vous qu’il soit si ffficile de porter un regard dépassionné sur cette question ?
Êtes-vous certain que le travail soit vraiment une question qui structure le débat ? Personnellement, je n’en suis pas sûre. Certes, il a été très présent dans les campagnes présidentielles de 2007 (la valeur travail), et de 2017 (la fin du travail et le revenu universel). Mais je ne dirais pas que nous avons eu un vrai débat, public, sur les questions majeures que pose en effet l’avenir du travail. Pendant la campagne de 2007, il n’y a pas eu d’échange d’arguments raisonnés sur la question de savoir si vraiment il y avait un déclin ou une dégradation de la valeur travail ni de quelle dégradation il s’agissait. En 2017, à aucun moment des débats télévisés on a pu assister à une focalisation des échanges autour des effets de l’automatisation, alors que c’est un sujet déterminant. Est-ce normal que quelques multinationales façonnent à ce point nos conditions de vie ? Que valent les études qui anno


Raphaël Bourgois

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