Maria Kourkouta & Niki Giannari : « Le désir des réfugiés d’être en mouvement nous met en mouvement »
Comment témoigner des réalités du monde contemporain ? Quel regard, quels mots poser, avec justesse, sur des événements historiques et caractéristiques de notre époque ? Le documentaire Des spectres hantent l’Europe est sorti en salle ce mercredi, loin de l’effervescence, des paillettes et du tapis rouge du Festival de Cannes. À travers ce film, Maria Kourkouta, réalisatrice, et Niki Giannari, écrivaine et poète, répondent à ces questions et à l’urgence de témoigner, avec une sobriété éloquente. Ensemble, elles cherchent à rendre compte de la vie des réfugié·e·s au camp d’Idomeni dans leur pays, la Grèce : nous sommes en mars 2016, la Macédoine a décidé de fermer la frontière, près de 15 000 personnes sont bloquées. Les trains et le temps passent, les hommes et femmes s’arrêtent et piétinent dans l’attente. Face à cette impasse, la caméra se pose et les mots s’imposent. YS.
Dans un essai récent, le poète Olivier Cadiot enjoignait de « ne pas faire de poèmes sur les migrants. Ni minimalistes ni répétitifs. Ne dites pas je à leur place. […] Arrêtez l’art ». Niki Giannari, vous avez écrit pourtant ce texte, « Des spectres hantent l’Europe », qui donne également son nom au film dont vous êtes la co-autrice avec Maria Kourkouta, et dans lequel il est lu par Lena Platonos. Dans ce texte, vous ne cherchez pas à parler à la place des réfugiés : vous utilisez plutôt le « tu », pour vous adresser surtout aux Européens hantés et « honteux », dont nous sommes. Et le poème se clôt sur des vers aux accents shakespeariens (« And the rest is silence ») : « Maintenant silence. / Que tout s’arrête. / Ils passent ».
À quelle nécessité répondaient vos gestes artistiques – l’écriture et le cinéma ? Pourriez-vous revenir sur la genèse du projet ?
Maria Kourkouta. Nous avons fait ce film sans financement et sans projet à l’avance. Il est né de l’urgence du moment, de ce moment historique que représente Idomeni, quand l’Europe a décidé la fermeture définitive de la frontière. Nous ne faisons pas de l’art pour l’art. Une question éthique se pose à chaque fois qu’un cinéaste se met face à l’autre, qu’il prend position dans le monde. Mais faire de l’art, c’est aussi se laisser prendre par un besoin profond, presque existentiel, de transmettre ou de partager une expérience vécue, que ça soit pour une fiction ou pour un documentaire. Il y a toujours un « je » dans le geste créatif, un positionnement intime. La question est alors comment et dans quelle mesure ce « je » se laisse transformer par la rencontre avec l’autre. En ce qui nous concerne, on a préféré s’adresser aux Européens plutôt qu’aux réfugiés eux-mêmes, parce qu’on se sentait vraiment regardées par eux. On a entendu les questionnements que leurs actes et leurs pensées suscitaient en nous, en tant qu’Européennes. Et puis, de toute façon, on ne doit jamais arrêter de faire de poèmes sur les migrants. Car la question éthique dans l’art ne se pose pas dans le choix de l’objet, mais dans son approche et son ouverture dialectique avec ce dernier.
Niki Giannari, j’ai lu que vous travaillez dans un « Dispensaire social de solidarité », à Thessalonique. Comment se coordonnent activisme (si vous vous retrouvez dans ce mot) et création ? Y-a-t-il un temps pour l’un, puis pour l’autre, ou les deux sont mêlés ?
Niki Giannari. Au « Dispensaire social de solidarité » de Thessalonique personne ne travaille. C’est une structure autogérée où tout le monde est là de manière volontaire. Personne n’est payé et le « Dispensaire » n’accepte aucun financement extérieur, ni même des dons philanthropiques. Participer à un « projet » social ne nous rend pas « activistes » pour autant. Parfois, c’est simplement la moindre de choses à faire pour continuer à vivre dans le monde… Donc, s’il l’on veut, disons qu’il y a le temps pour tout
Dans le film, certains réfugiés décident de bloquer les rails afin de faire pression pour la réouverture de la frontière. Il y a une longue séquence d’altercation entre un Grec et des réfugiés, le Grec trouvant les migrants ingrats envers son pays qui les accueille. Les autres lui rétorquent qu’ils veulent seulement être respectés, et l’un d’eux ajoute : « n’oublie pas, en 1922, c’est vous, Grecs, qui étaient réfugiés à Alep… ». Y aurait-il une spécificité grecque, du fait de sa longue histoire d’exil et de migration, qui vous rend plus sensibles à ces questions et aux allers-retours de l’histoire ?
NG. Dans l’histoire de chaque peuple, on observe de manière plus ou moins lisible des épisodes de mouvements de population, ou bien le simple fait d’avoir dû accueillir des réfugiés, des groupes persécutés ou autres. Notre souci n’est donc pas le résultat d’une spécificité grecque, mais présuppose une attention particulière sur ce qui se passe à nos « portes », c’est-à-dire au seuil de l’Europe, où la Grèce tient une position particulière. Le rappel du réfugié syrien au négociateur de la police grecque sur les événements de 1922 est un acte de transmission extraordinaire : ce réfugié transmet sa connaissance de l’histoire à d’autres réfugiés. Cet homme nous tend un miroir, il écrit l’histoire, et ainsi il devient poète. Cette poésie est là pour suggérer ce qui échappe à l’histoire officielle et linéaire, ce qui survit et dépasse les frontières géographiques et temporelles…
Le titre, Des spectres hantent l’Europe, rappelle évidemment la première phrase du Manifeste communiste de Marx et Engel – « Un spectre hante l’Europe, c’est le spectre du communisme » –, mais aussi le livre de Jacques Derrida, qui le met au pluriel, Spectres de Marx. Dans cet ouvrage, Derrida s’intéresse à des questions éthiques et politiques, et notamment à cette peur de l’étranger qui a mis à mal « l’hospitalité ». Il écrit : « Dès qu’il y a du spectre, l’hospitalité et l’exclusion vont de pair. On n’est occupé par les fantômes qu’en étant occupé à les exorciser, à les mettre à la porte ». Comment vous rapportez-vous à ces ouvrages ? Comment en héritez-vous ?
NG. La citation est magnifique. Oui, nous avons par le passé lu ces deux ouvrages. D’une certaine manière, le titre de notre film suit le sillage qu’a laissé le grand texte de Marx, mais également celui de Derrida après lui. Le mouvement des peuples qui traversent les frontières, souvent malgré les interdictions, a en effet quelque chose de révolutionnaire, sauf qu’il relève de nombreux désirs différents. On pourrait dire que le seul désir commun de ces gens et des gens que nous avons filmés, c’est le désir de passer, de pouvoir continuer le chemin, d’être visibles, de ne pas être parqués dans des non-lieux, dans des camps, exclus de nos sociétés, invisibles. C’est le désir d’être en mouvement, pour nous mettre aussi en mouvement. Car il est évident que leur arrivée provoque finalement des déplacements et des conflits mutuels : identitaires, psychiques et politiques. Ainsi envisagé, le mouvement de ces gens apparaît comme un manifeste actuel et en acte, de nos jours.
Ces spectres sont aussi ceux qui hantent notre histoire européenne. Quand vous, Niki Giannari, écrivez « ces trains-ci », on pense aux trains qui sont filmés, en mouvement, alors que les êtres humains sont arrêtés ; et quand vous mentionnez ces « trains-là », on ne peut s’empêcher d’entendre l’écho de ceux qui menaient à d’autres camps… On se souvient de la grande communauté juive de Thessalonique, qui fut quasi entièrement déportée et exterminée. Comment avez-vous voulu traduire ces « hantises » dans le travail des images ?
MK. Les trains qui déportaient les juifs de Thessalonique et de toute la Grèce, ainsi que plein de résistants, femmes et hommes, vers l’Europe centrale, sont passés en effet par Idomeni. Mais je verrais tout de même des différences : aujourd’hui, les trains qui passent par le même endroit ne transportent plus des gens, mais des marchandises. Et les réfugiés d’aujourd’hui rêvent de s’embarquer dans ces trains, pour pouvoir continuer librement le chemin, alors qu’à l’époque les gens quittaient de force leur foyers.
NG. Je dirais que la question est surtout de ne pas oublier. Ni ces trains-ci, ni ces trains-là. Ces vers, extraits du poème, ne visent pas à mettre en parallèle des évènements historiques très différents entre eux. Mais les mots cherchent à combattre l’oubli, à se souvenir du passé et, en se souvenant du passé, à envisager le présent.
Se souvenir du passé, envisager le présent… Cela m’amène à Walter Benjamin, qui durant la Seconde guerre mondiale s’est suicidé à la frontière espagnole, et qui est cité dans le texte. Le film, quant à lui, exemplifie d’une certaine manière sa thèse de « l’image dialectique », c’est-à-dire une image qui met en tension l’Autrefois, le Maintenant et l’Avenir, à travers par exemple un travail de montage. Quelle place a-t-il, s’il en a une, dans vos œuvres respectives ?
MK. À Idomeni, nous n’aurions pas pu ne pas penser au philosophe Walter Benjamin, puisqu’il s’est suicidé justement à cause de la fermeture de la frontière. Niki a écrit « Car personne n’arrive à la frontière un jour avant / ou un jour après ». On sait que quand Benjamin avait enfin atteint la frontière espagnole, les autorités avaient décidé ce jour-là de refuser les visas faits à Marseille, comme le sien, avant de lever cette sanction quelques jours plus tard. Mais ce jour-là, celui de son arrivée, il s’est retrouvé devant une frontière fermée, et il s’est donné la mort.
NK. Au sujet des « images dialectiques », ces « images de la pensée », c’est au spectateur de créer ou de ne pas les créer en lui, à travers notre film. Nous espérons évidemment que le film puisse les produire, mais ça, c’est au spectateur de le dire. En tous cas, je pense qu’il est toujours nécessaire de réfléchir sur le présent – et en particulier à la situation des réfugiés aujourd’hui – en relisant Benjamin. Et notamment à travers ce qu’il dit de l’Ange de l’Histoire : « Là où nous apparaît une chaîne d’événements, il ne voit, lui, qu’une seule et unique catastrophe, qui sans cesse amoncelle ruines sur ruines [Trümmer auf Trümmer] et les précipite à ses pieds. Il voudrait bien s’attarder, réveiller les morts et rassembler ce qui a été démembré [das Zerschlagene zusammenfügen]. Mais du paradis souffle une tempête qui s’est prise dans ses ailes, si violemment que l’ange ne peut plus les refermer ».
Le « camp » a été désigné comme « paradigme biopolitique du moderne » par le philosophe Giorgio Agamben. De nombreux artistes ont cherché à en rendre compte. Je pense récemment au film L’Héroïque lande, de Nicolas Klotz et Elisabeth Perceval. Avez-vous vu ce film ? Il documente un autre Purgatoire moderne, celui de Calais. Mais alors que la caméra y est mouvante, la musique importante et que les réalisateurs se sont attachés à suivre des parcours et des figures, vous préférez de longs plans fixes, des cadres plutôt larges, une certaine distance qui témoigne d’une forme de pudeur. Pourquoi de tels choix ?
MK. Malheureusement nous n’avons pas encore vu le film de Nicolas Klotz et Elisabeth Perceval, mais nous espérons pouvoir le faire très prochainement. En ce qui concerne notre film, la forme cinématographique que nous avons choisie a été guidée par notre propre expérience du temps et de l’espace dans cet endroit monotone, nuageux et clos, qu’était Idomeni. Pour traduire cette sensation d’enfermement et l’absence d’évolution, nous avons opté pour de longs plans sur les pieds et pour des intervalles noirs qui scandent le film, mais sans nécessairement marquer une évolution apparente. En fait, nous avons essayé de créer des sortes de longues boucles, avec des blocs de séquences où la réalité se répète comme un rituel – les fils d’attente, tous les jours – rythmée par le passage du train, le seul à passer la frontière. Cette partie donne ensuite sa place à une autre, quand la réalité s’inverse : les réfugiés bloquent les rails, maintenant c’est le train qui ne passe plus, et ils commencent à manifester leur voix et leurs réflexions, collectivement. Ce que vous appelez « distance » pour nous était la seule manière possible de regarder ce qui se passait à chaque moment devant nos yeux. Quant à la musique, nous avons choisi de ne pas en mettre, pour éviter tout lyrisme qui se rapprocherait d’une dramatisation inutile, alors que le contenu des images est souvent déjà très chargé, émotionnellement parlant. De toute façon, nous considérons que derrière chaque choix esthétique, il y a toujours un positionnement politique de la part du cinéaste, qui passe plus par les éléments formels – la hauteur de la caméra, la lumière, le cadrage, l’utilisation du numérique ou de la pellicule…– que par le contenu en soi.
Dans la deuxième partie, plus courte, s’opère d’ailleurs une rupture. Vous filmez en pellicule, en noir et blanc, des plans brefs, muets, caméra à l’épaule. Ici les visages apparaissent, les sourires aussi. Après la déshumanisation et l’uniformisation des corps sous les K-Way, c’est aussi une manière de ré-humaniser les êtres. Le rapport à la caméra des réfugiés était-il aussi différent ?
MK. En effet, il y a une rupture. Pour nous, cette dernière partie, en noir et blanc donc, entre dans un rapport dialectique avec le reste du film, tourné en numérique. Une dialectique entre deux visions différentes d’une même réalité : l’une très libre de sens pour le spectateur, et l’autre, la dernière, qui vient comme un positionnement nécessaire, plus direct et urgent, de nous-mêmes face à cette réalité. Dialectique aussi par rapport au cinéma lui-même, entre le tournage en numérique et celui en argentique, qui suscite la question du destin de la pellicule dans la production cinématographique actuelle. Et oui, le rapport des gens à la caméra argentique était tout à fait différent : plus frontal et intime, loin de tout rapport journalistique.
Dans tout le film, on dirait que vous filmez souvent à la hauteur des enfants, dont la présence seule est très éloquente. Dans la dernière partie, on en voit les sourires, aussi, l’innocence malgré tout. Est-ce que filmer cela, c’est montrer la vie qui continue, envers et contre toutes les épreuves ? Et finalement, quel espoir ? Quel rôle pour l’art ?
NG. Notre but n’était pas de montrer la vie qui continue. Les sourires, les jeux des enfants, la fierté, la force des gens et puis tout ce que l’être humain peut être, n’ont jamais cessé d’être présents là-bas. Dans la question précédente nous avons expliqué plus ou moins ce que nous voulions créer par ce changement de régime d’images.
MK. Mais comment répondre sur le rôle de l’art ? L’art n’est pas une mission… Et puis, chaque film, chaque œuvre, récrée son rapport à la vie et aux choses. C’est là-dedans que l’espoir peut s’instaurer ou non.
Permettez-moi alors de préciser ma question, en reprenant ce que Georges Didi-Huberman écrit dans Passer quoi qu’il en coûte : « La vertu – ou la puissance – des images et des phrases ne consisterait-elle pas, dans ces conditions, à proposer comme un autre genre d’action : un lien dialectique entre la honte et l’espoir ? ». Serait-ce alors une forme de résistance ?
NG. Effectivement, si vous parlez d’une résistance aux images du marché, aux images qui se produisent pour être consommées, aux images qui transgressent les sujets filmés ; pouvoir regarder avec du respect le monde pour ensuite en faire des images qui sauvegardent la dignité de ce monde, oui, c’est une forme de résistance. Et elle donne de l’espoir.
Cette deuxième partie me permet aussi, Maria Kourkouta, de revenir sur votre rapport « artisanal » au cinéma, avec votre utilisation de la pellicule – vous faites partie du laboratoire cinématographique partagé L’Abominable –, des archives. Je pense à votre Retour à la rue d’Eole, qui est un film de found footage, un collage audio-visuel de films populaires grecs des années 50 et 60, remontés et retravaillés. Que cherchez-vous dans ces matières ?
MK. D’un point de vue purement esthétique, je cherche une beauté formelle qu’on ne peut pas facilement trouver à l’image numérique, même si on finit souvent par une projection en numérique, où l’on perd beaucoup de l’image de départ. Au niveau du tournage, l’utilisation de la pellicule change notre rapport aux choses filmées, car on peut difficilement dépasser les dix minutes d’enregistrement en continu ! Sans parler du coût financier, qui fait qu’on compte bien plus les secondes d’enregistrement que quand on tourne avec des cartes-mémoire… Le geste de filmer est donc complètement différent, d’autant plus quand il s’agit du documentaire où on ne sait pas toujours pourquoi on choisit tel ou autre cadrage, et où le tournage est beaucoup plus instinctif. Sinon, plus généralement parlant, travailler de manière « artisanale », comme vous dites, donne un rapport singulier à la création elle-même, puisqu’on est obligés d’assurer et de maîtriser plus ou moins bien plusieurs étapes différentes de la post-production (développement du film, tirages, etc.). Dans ces conditions, il est d’ailleurs impossible de fabriquer des images « parfaites », « propres ». Travailler ainsi veut donc aussi dire assumer les fautes, le manque de perfection dans l’image. D’un côté, je pense que ça instaure un rapport plus humble au cinéma, et de l’autre, une recherche constante sur comment les images se fabriquent. Enfin, pour parler encore plus généralement, l’existence des lieux collectifs et plus ou moins autogérés comme l’Abominable, parmi d’autres dans le monde entier (voir le réseau FilmLabs), est la preuve qu’il y a encore des petits noyaux de résistance cinématographique aujourd’hui, à une époque où l’industrie du cinéma cherche à donner à ses utilisateurs la possibilité de faire des images massivement, rapidement, facilement, infiniment, pour ensuite les projeter par la même machine DCP où souvent les films donnent l’impression d’avoir passé par les mains – pardon, l’ordinateur – du même étalonneur…
En parlant d’expérimentation et d’œuvres collectives, je citais Didi-Huberman et j’aimerais revenir sur son travail avec vous deux. En effet, on a pu voir des extraits du film dans l’exposition Soulèvements, au Jeu de Paume, et il a écrit une sorte de commentaire sur votre texte, Niki Giannari, dans le livre Passer quoi qu’il en coûte ?. Quelles différences voyez-vous à présenter des extraits du film dans une exposition ? Est-ce que ça en change le statut ? Et comment considérez-vous cet ouvrage de Didi-Huberman ?
MK. Pour l’exposition Soulèvements, il n’y avait pas de différence considérable quant aux images montrées – il s’agissait du premier plan de notre film qui a été exposé « nu », voire dans sa durée réelle, celle du tournage et pas tel que l’on voit dans notre long-métrage – mais il y a, bien évidemment, une grande différence quant au mode de réception de ces images. Pour ce qui me concerne en tant que réalisatrice de ce plan, je suis très fière d’avoir participé à cette exposition magnifique, même si ce plan a été tourné pour être adressé au spectateur de la salle obscure.
NG. Pour ce qui me concerne, je dois dire que je respecte profondément le philosophe et historien de l’art Georges Didi-Huberman. Quant au texte que j’ai écrit pour le film, et qui a été republié par Les Editions de Minuit… Que dire ? Il a « reçu » ma « Lettre de Idomeni » (NdA : sous-titre du titre du poème) et il m’a rendu un monde entier, à travers son commentaire…
En plein festival de Cannes, et au moment des multiples annonces autour de la présence des femmes dans l’industrie du cinéma, je ne peux m’empêcher de vous interroger sur le fait d’être à la fois femmes et cinéastes… Pensez-vous que les mesures proposées (quotas, statistiques) soient nécessaires, et comment vous considérez-vous dans cet ensemble ?
MK. On ne se considère pas du tout dans cet ensemble…