François Gemenne : « À l’ère de l’anthropocène, tout projet politique doit être cosmopolitique »
François Gemenne a codirigé avec Aleksandar Rankovic l’Atlas de l’anthropocène (Presses de Sciences Po, 2019), une entreprise cartographique qui mobilise autant les sciences sociales que les sciences dites dures pour tenter de saisir l’insaisissable. Car ce qu’on appelle anthropocène, cette nouvelle ère géographique marquée par l’action de l’homme sur l’environnement jusqu’à un niveau géologique, met en jeu tellement d’éléments différents qu’il ne peut être appréhendé autrement qu’en adoptant une longue focale, ou en multipliant les points de vue : par des cartes et des graphiques, donc, mais aussi l’ensemble des sciences naturelles et sociales qui viennent nourrir des textes très riches sur le climat, la biodiversité, les pollutions, la démographie… Tout cela pour nous aider à nous orienter. Car François Gemenne, qui est spécialiste des questions de géopolitique de l’environnement, insiste sur l’entreprise scientifique mais aussi sur les conséquences politiques pour aujourd’hui, et demain. RB
La COP25 doit s’ouvrir lundi 2 décembre, c’est une réunion qui est présentée comme charnière, quels en sont les enjeux ?
Il y a d’abord un enjeu crucial pour cette COP25, c’est le rehaussement des engagements qui ont été pris par les différents gouvernements lors de la COP21. L’accord de Paris arrive à une première étape en 2020 puisqu’il est prévu qu’il se mette véritablement en branle à cette date, mais en l’état actuel des engagements la trajectoire du réchauffement climatique mènerait à une hausse de 3,5° C d’ici la fin du siècle. Il y a donc une dissonance très frappante entre l’objectif collectif qu’on s’est assigné à Paris (limiter le réchauffement à 2° C) et la somme des objectifs nationaux qui ont été proposés par les gouvernements. C’est ce fossé entre les objectifs nationaux et l’objectif collectif qu’il faut réduire, ce qui suppose encore une fois une révision à la hausse. Un autre élément très important concerne le respect par les pays signataires : moins de 10%