Cinéma

Jerzy Skolimowski : « Je suis vraiment fatigué des films avec des narrations linéaires »

Critique

L’inoubliable réalisateur de Travail au noir et de Deep End revient au cinéma avec EO, dont le protagoniste est un âne et le sujet la défense des animaux. À 84 ans, le vieux maître du Nouveau cinéma polonais Jerzy Skolimowski n’a rien perdu de sa vigueur ni de sa fantaisie. Il regrette de n’être pas encore végétarien, loue la couleur et, fustigeant la narration linéaire, raconte comment il a bâti son film à l’envers, pour finalement en omettre la fin.

Retrouver Jerzy Skolimowski toujours vaillant en 2022 est décidément l’une des meilleures nouvelles de l’année. Le cinéaste a beau être fatalement, à 84 ans, l’un des ultimes rescapés de la nébuleuse des « nouveaux cinémas » des années 60 (avec Straub, Herzog et Bellocchio), il se fait encore un devoir de continuer à surprendre et, partant, de rester fidèle à l’idée qui a guidé ses plus grandes réussites : l’art du contrepied.

Alors qu’EO vient rajouter un inattendu dernier chapitre animalier à une filmographie composite, cette odyssée d’un âne dans une Europe gangrénée par le chaos et la bêtise est ouverte à une multitude de lectures. Le film reprend le point de départ d’Au hasard Balthazar de Bresson, mais peut tout aussi bien dialoguer avec La Nuit du chasseur de Laughton (le bestiaire forestier à la lisière du fantastique) ou Adieu au langage de Godard (emprunter le point de vue animal dans une nature triturée en pure matière plastique).

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On peut y voir un film-trip cosmique comme un film-tract vegan. Sachant qu’en latin, « Eo » signifie « Je vais », peut-on même voir chez cet « âne qui va » un cousin quadrupède de L’homme qui marche de Giacometti ? Et le film comme métaphore de l’entêtement à avancer, tout en esquivant les écueils d’un monde au bord du gouffre ? Autant d’extrapolations possibles – mais jamais imposées – qui font cependant écho à deux traits primordiaux du cinéma de Skolimowski : la quête perpétuelle de nouveaux élans, et l’art de dépasser les frontières.

Les nouveaux élans, c’est ce qu’a trouvé, dès ses débuts, ce cinéaste garnement et boxeur, donc déjà rompu à l’art de l’esquive. Ses premiers films autoproduits, Signe particulier : néant (1964) et Walkover (1965), étaient tournés sur des chutes de pellicules. Dans ce métrage imposé, il trouvait de quoi composer de stupéfiants plans-séquences chorégraphiés à plusieurs vitesses comme, par exemple, cette virtuose course éperdue, entre train et moto.

Trouver de la liberté dans la restriction, inventer des trajectoires obliques pour ne pas plier sous les jougs, célébrer la vitesse pour conjurer le nihilisme, la quête skolimowskienne résonne aussi bien formellement que politiquement.

Logique donc que cette œuvre intraitable ait rapidement traversé les frontières, sans rien perdre de sa vitale impatience. Skolimowski a ainsi aligné les chefs d’œuvre « délocalisés ». Tourné à Bruxelles, Le Départ (1967) avec, en vedette, un Jean-Pierre Léaud au sommet de son explosivité burlesque, est le premier film d’un cinéaste de l’Est « passé à l’Ouest ». Sur un thème proche (comment un grand adolescent dompte, plus ou moins bien, sa libido), Deep End (1970) capture l’essence du Swinging London (en étant, ironie de l’histoire, tourné pour une large part à Munich). Toujours à Londres, Travail au noir (1982) est un modèle de fable politique, en réaction immédiate à l’état de siège instauré en Pologne en décembre 1981, et trouvant sa tonalité absurde et méditative quelque part entre Samuel Beckett et Buster Keaton.

La carrière de Skolimowski a aussi connu des hauts et des bas, et même une éclipse de dix-sept ans, après l’accueil mitigé de son Ferdydurke en 1991 (adaptation jugée d’autant plus sévèrement que tous ses grands films tournaient déjà autour des thèmes gombrowicziens de l’immaturité, du jeu et du pari). De sa dernière période (quatre longs-métrages depuis 2008), retenons aussi Essential Killing (2011), film d’échappée existentielle, où l’humain est traqué en animal, mouvement inverse de celui d’EO où l’animal est le garant des dernières traces d’humanité.

Plus de dix ans ont passé entre ces deux films, faux jumeaux l’un de l’autre. Cet intervalle a sans doute été nécessaire pour que Skolimowski infléchisse encore son détachement d’artiste, et, encore plus que cela, éprouve encore davantage sa patiente obstination qui est la marque de la plus farouche indépendance. JL

Comment avez-vous eu l’idée de reprendre le point de départ d’Au hasard Balthazar mais avec un style totalement différent ?
Tout d’abord, je suis vraiment fatigué des films avec des narrations linéaires. On a vu ça trop souvent. 95 % des films que j’ai vus vont de A à Z. Après 10 ou 15 minutes au cinéma, je sais déjà où cela va aller, et comment ça va se terminer. C’est très ennuyeux. Dans mon précédent film, 11 minutes [ndlr – tourné en 2015], j’ai essayé de casser cette narration linéaire. Quelques-uns l’ont aimé. D’autres avaient des objections. Je pense que je ne suis plus capable de faire un autre film « de A à Z ». Je savais que je devais expérimenter. Ce sont les circonstances qui m’ont forcé à le faire. Le film a été conçu de manière très particulière.
Si vous avez le temps, c’est maintenant à mon tour de vous raconter mon histoire « de A à Z ». Avec ma coscénariste, ma coproductrice qui est aussi ma femme, Ewa Piaskowska, nous pensions que nous devions trouver une histoire avec un animal. Parce que ce sont des « performers » qui ne « jouent » pas. Je suis devenu allergique aux performances d’acteurs. Nous savions évidemment que Robert Bresson travaillait avec des « non-acteurs » et pas des professionnels. Quand les acteurs commencent à montrer combien ils sont bons, cela me hérisse. Nous pensions donc à un animal comme rôle principal. Nous avons évidemment tout de suite éliminé les chiens et les chats, puisqu’il y a déjà eu tellement de films très mauvais et kitsch avec eux. Nous avons donc cherché d’autres animaux, mais sans en trouver. Jusqu’à un heureux accident, qui s’est déroulé en Sicile, où nous avons l’habitude de passer nos hivers – de décembre à mars – qui sont plus agréables que les hivers polonais.
C’était donc il y a trois ans, durant l’hiver 2019-2020. Nous avons découvert, dans le petit village de Custonaci, l’évènement Presepe Vivente [ndlr – crèche vivante]. Les 200 habitants du village sont impliqués et portent des costumes anciens qu’ils se transmettent depuis plusieurs générations. Ils rejouent la vie du passé. À part les costumes et les outils, cela ressemble parfois exactement à ce qui se passe aujourd’hui. Ils continuent à faire les mêmes gestes : presser le raisin pour le vin, manger et boire, faire cuire des pizzas, presser des olives pour l’huile. Il y a plusieurs stands et attractions rejouant la vie quotidienne d’il y a plusieurs siècles. Et tout au bout de ce labyrinthe d’attractions se trouve une grange. Quand vous entrez là-dedans, il y a un bruit incroyable, fait par beaucoup d’animaux. Les plus bruyants sont les poulets, mais il y a aussi des oies, des cochons, des moutons. Au fond, il y a aussi des vaches et des taureaux. Au milieu de tout ça, il y a Joseph avec son long manteau. À côté de lui, Marie portant le bébé qui n’est qu’une poupée. C’est le seul être « non vivant » au milieu de tout ça. Mais Marie le porte avec attention. L’image est très douce, au milieu de tout ce bruit et ces attractions. Les poulets volent au-dessus de la tête de Joseph. Et là, dans le coin, à l’écart de tout le monde, se tenait un âne. Immobile, comme une sculpture. Il n’exprimait rien. Il ne faisait aucun bruit. Seul son œil grand ouvert regardait tout autour de lui, avec une sorte de regard mélancolique. Au lieu de regarder toutes les autres attractions, nous avons été collés aux yeux de cet âne. On y voyait le reflet, le commentaire de tout cela. C’était la présence la plus profonde au milieu de cette situation si agitée. À ce moment-là, nous étions certains d’avoir notre animal ! Cet exemple d’animal est notre héros pour notre film.
Le soir même, j’appelais mes amis en Pologne en leur demandant de rapporter une caméra et de venir avec une petite équipe pour la lumière et pour faire le point. Deux jours plus tard, ma petite équipe de six personnes était là pour tourner cette scène avec cet âne-là, qui s’appelait Ettore.
Nous avons tourné une grande scène, pleine de vie, avec cet âne. Mais une fois que nous avions ça, nous nous sommes demandé ce que nous allions faire. Un âne avec une telle présence au milieu de la sainte famille, ce ne pouvait être que la fin de l’histoire. Où pouvions-nous aller ensuite ? Notre tâche, ça devenait alors d’imaginer une histoire à l’envers. Nous avions la contrainte de faire un film polonais, puisque nous ne pouvions avoir des financements rapides qu’en Pologne. Nous avons donc organisé une coproduction entre l’Italie et la Pologne. Mais il fallait imaginer une histoire « à l’envers » qui nous permette de revenir en Pologne.

Avez-vous alors en tête le film de Bresson, Au hasard Balthazar ?
Bien sûr, nous savions que l’âne était le personnage principal d’Au hasard Balthazar, que j’avais vu à sa sortie. J’ai même pleuré devant ce film. J’ai senti une larme dans mon œil, à la fin quand l’âne meurt. Cela ne m’était jamais arrivé auparavant, et ne s’est jamais reproduit depuis. Je regarde toujours les films avec une certaine distance professionnelle. Mais Robert Bresson m’a donné la leçon que le destin d’un animal peut produire un effet bien plus fort que toutes les autres créations traitant de la tragédie humaine. Mon film est donc un hommage, même si les histoires sont totalement différentes, à l’exception du point de départ. Il y a peut-être une scène assez similaire au début dans le cirque polonais, qui signale l’influence. Ensuite, cela devient un road movie avec l’âne qui passe de main en main. Il rencontre des gens bons, des gens mauvais. Il connait la joie, la tragédie, quelques moments effrayants. Le plus difficile a été de concevoir la façon dont il arrive en Italie. Mais bon, ce sont des ruses de scénaristes. Même si l’âne arrive bien en Italie, ce qui était censé être le finale dans cette crèche n’est plus dans le film. Il faut toujours être prêt au changement. Le « matériel » que nous avions était si fort qu’il menait en toute logique à ce qui est devenu le nouveau dénouement. La première scène que nous avions tournée devenait un élément en trop, que nous ne pouvions plus remettre. Je le regrette car ce moment initial était vraiment magnifique, mais il ne trouvait pas sa place dans le film. Il devenait « too much ».

Comment avez-vous trouvé le titre ?
Le titre a une double signification. EO est à la fois l’onomatopée du hennissement de l’âne. Cela rappelle aussi « Io » en italien : la première personne du singulier, moi, moi-même.

La grande différence avec Bresson, c’est que les personnages sont beaucoup plus esquissés. Et les autres animaux – ceux du cirque ou les chevaux – ont plus d’importance.
Ce film est vraiment une déclaration d’amour aux animaux, et pas seulement aux animaux domestiques. La plupart des gens disent qu’ils aiment les animaux, mais en pratique, c’est l’opposé. La plupart du temps, les gens traitent les animaux comme des objets. Il y a deux fléaux. Le premier, c’est la production de viande industrielle, qui est vraiment barbare. Ces pauvres animaux ne voient même pas le ciel et ne touchent même pas l’herbe par terre. Ils sont entassés et gavés, pour devenir de la viande qui finit dans nos assiettes. C’est barbare et je continue à me sentir coupable de ne pas encore être capable de devenir totalement végétarien. Même si j’ai considérablement réduit ma consommation de viande, de deux tiers par rapport à avant. Durant le tournage, beaucoup de membres de l’équipe sont aussi devenus végétariens. Sans doute, un jour, deviendrais-je moi-même un pur végétarien. Mais dès que je suis en contact avec la viande, je me sens coupable maintenant, parce que je sais d’où elle vient. Le deuxième fléau, ce sont les élevages industriels pour la fourrure. Dans le film, il y a une évocation rapide d’une ferme pour la fourrure de renards. C’est encore pire. La viande, il faut bien manger, ok. Mais porter de la fourrure, ce n’est pas un besoin vital. On pourrait s’en passer facilement. Toute cette procédure pour arracher la peau des animaux et la porter à leur place, il faut absolument s’y opposer ! Je ne sais même pas comment les propriétaires de telles fermes peuvent rentrer tranquillement le soir à la maison, dîner avec leurs enfants en souriant. Ce sont des assassins. Cela doit être stoppé.
Mais comme vous le voyez, je ne suis pas un activiste. Je ne suis pas fasciné par les manifestations. Je ne peux pas faire plus qu’un modeste film. Je fais passer le message, en contrebande, en le recouvrant d’une grande histoire, d’une image magnifique, d’une musique excellente et de beaucoup d’humour.
Le meilleur moyen de faire comprendre cela, c’est de rester léger et divertissant pendant 90 minutes dans un cinéma, sans message lourd. Personne n’est désigné comme coupable d’une activité barbare, mais j’espère que passe, de manière subliminale, le moyen de faire changer d’attitude envers les animaux. Et qu’en sortant de la salle, les spectateurs et spectatrices puissent avoir une réflexion sur le sujet.
J’ai participé à une seule manifestation l’automne dernier. 20 000 personnes étaient rassemblées au centre de Varsovie, en portant un tee-shirt jaune avec le slogan « Animal Rights Now ! ». Il y a quelques années, le parlement polonais avait voté une loi contre ces fermes pour fourrure. Il y avait même cinq points votés pour de meilleurs droits pour les animaux. Mais rien ne s’est passé ! Visiblement, il y a eu des pressions pour manipuler les politiques. Et il ne se passe toujours rien, quand bien même cette manifestation devant le Parlement a été bien médiatisée. Peut-être que ce film éveillera quelques politiciens et que quelque chose se passera enfin.

Il y a quelque chose de très surprenant dans le film, c’est qu’on y voit beaucoup de machines et de technologie, alors qu’il se passe principalement en pleine nature.
Nous sommes en train de détruire la nature ! Nous sommes des barbares. C’est un suicide. Et je ne parle pas seulement de l’Amazonie. C’est un mouvement général. Il y a de moins en moins de végétation et de forêt. Nous faisons du mal à la planète.

Oui, mais en tant que cinéaste, vous êtes moins dramatique que ce discours. Il y a une malice quand vous mettez la caméra sur les hélices d’une éolienne, et que le paysage se retrouve à l’envers.
Dieu merci, je continue à chercher des moyens inventifs d’atteindre le public. Ce n’est ni un documentaire, ni un protest song. Ça reste du divertissement. Je veux divertir le public. À chaque fois que je peux mettre quelque chose avec de l’humour, je le fais sans hésitation, même si le sujet est dramatique. Ce que je cherche avant tout, c’est à satisfaire le public avec quelque chose d’original, d’inhabituel et surtout d’émouvant. Il y a beaucoup de personnes qui quittent le cinéma avec des larmes dans leurs yeux, ce qui est bien. Elles sont émues et repenseront au film.

Il y a une séquence stupéfiante avec un petit robot qui ressemble à une caméra, mais court comme un animal. Où l’avez-vous trouvé ?
Il y a un petit message dans cette scène. Nous sommes en train de détruire la nature, d’éliminer les animaux de nos vies et même de la planète. Qu’est-ce que vous voulez ? Vous voulez que les robots remplacent vos animaux domestiques, courent sur vos tapis à la place de vos chiens ?

Entre Ferdydurke (1991) et Quatre nuits avec Anna (2008), vous avez complètement arrêté le cinéma et vous vous êtes consacrés à la peinture. En quoi votre pratique de peintre a changé votre approche du cinéma, quand vous y êtes revenu ?
J’ai peint toute ma vie, mais c’est seulement quand j’ai fait ce break de 17 ans avec le cinéma que j’ai pu développer mes talents et devenir un peintre professionnel. J’ai toujours beaucoup d’expositions dans plusieurs grands musées. J’ai toujours mon manager, mes vendeurs. Financièrement, la peinture m’a beaucoup plus rapporté que le cinéma.

C’est le plus sensoriel de vos films, avec ce début dans la lumière rouge, ou cette traversée de la forêt avec un vert très intense. Les lumières et les couleurs deviennent de pures matières qu’on a l’impression de pouvoir toucher. Tout cela vient de votre pratique de peintre ?
Il y a une utilisation particulière du rouge dans une scène filmée au drone. C’est le point de vue d’un oiseau au-dessus de la forêt et de cette rivière. Et je voulais montrer très clairement une rivière de sang, celui des animaux. C’est à la fois très explicite et très esthétique, pour que cela parle directement au cœur des gens.

Ce travail très puissant des couleurs est présent dès la séquence d’ouverture dans le cirque. Quand vous filmez les cascades d’eau qui s’échappent d’un barrage, le bleu est aussi très intense.
Oui, j’utilise des effets très marqués. J’attaque avec des couleurs et des images. C’est le meilleur moyen de ne pas être ennuyeux. EO est un film dont vous ne pouvez pas prédire ce qui va se passer à la minute suivante. À chaque nouvelle scène, à chaque minute, vous allez être surpris. Il y aura toujours un nouvel aspect, un nouveau point de vue. Je suis très fier de ce film, et très fier d’être resté inventif. Je ne commettrai jamais le pire péché pour un réalisateur : ennuyer. Je ne ferai jamais en sorte que le public regarde son téléphone pendant la projection. Personne ne l’a fait et ne le fera pendant EO, je vous le garantis. Le film vous maintient en tension sur votre siège.

Comment avez-vous travaillé avec le compositeur Pawel Mykietyn ?
C’est le meilleur compositeur classique polonais actuel. Il est à Paris en ce moment, pour une pièce de théâtre. Il va aussi devenir très célèbre à Paris, bientôt. Sa musique est un appui essentiel du film, car elle touche directement aux émotions. C’est peut-être grâce à lui que certains spectateurs sortent du film en larmes. Qui sait ? [Rires] C’est vraiment de la très grande musique.

Comment créez-vous ce lien organique entre la musique et les images ? Est-ce que la musique est écrite à l’avance ? Ou tout se règle au montage ?
Non, c’est pendant le montage, où nous composons réellement les images et les sons en même temps. Et ensuite, nous avons fait un enregistrement, avec tout un orchestre symphonique de 75 musiciens, et Mykietin qui joue du piano. Ce n’est pas une simulation électronique. C’est un enregistrement coûteux et soigné, l’un des postes les plus importants du film.
Attendez, si vous voulez, je l’appelle et je lui demande ce sur quoi il travaille à Paris, en ce moment. [Il téléphone.] Bonjour Pawel, je suis justement en train de parler de toi. Peux-tu nous dire dans quel théâtre et sur quelle pièce es-tu en train de travailler, ici à Paris.

Pawel Mykietin : C’est la nouvelle pièce de Wajdi Mouawad au Théâtre de la Colline, Racine carré du verbe être. La première a eu lieu le 8 octobre.

Jerzy Skolimowski : Ok. Nous étions en train de parler de ta merveilleuse musique. Merci Pawel. EO[en imitant le « hi-han ! »]

Vous êtes un cinéaste très surprenant. Vos films sont très différents les uns des autres. Est-ce que vous pensez qu’EO peut être relié à un de vos films précédents ?
J’entends souvent que mes films auraient pu être faits par un jeune cinéaste. Je ne suis plus jeune depuis longtemps, mais j’ai toujours l’ambition de ne pas me répéter, et de ne pas copier les films de mes collègues. J’essaye toujours de faire quelque chose de neuf et de frais. Si j’y arrive, j’en suis très heureux. Et je suis sûr d’y être arrivé avec EO.

Je me souviens que dans un documentaire sur vous (Contre la montre, Jerzy Skolimowski, peintre poète et cinéaste de Damien Bertrand, tourné en 2003), vous citiez cette phrase attribuée à un général romain, Pompée le Grand, puis plus tard reprise par Pétrarque et Fernando Pessoa, et encore ensuite Caetano Veloso : « Vivere est non necesse, navigare necesse est » (« Vivre n’est pas nécessaire, naviguer l’est »). J’ai l’impression que c’est le fil rouge de votre filmographie, mais aussi la devise d’EO.
Oui, ça reste une de mes phrases favorites et une grande direction dans ma vie.

 

EO sort en salle ce mercredi 19 octobre


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