Rediffusion

Joel Penney : « Le journalisme culturel poursuit une mission d’intérêt public »

Sociologue

S’appuyant sur une sociologie interactionniste, Joel Penney revient dans Pop Culture, Politics, and the News sur le rôle que tient le journalisme culturel au sein de l’écosystème médiatique américain, coincé entre une hiérarchisation de l’information défavorable et la polarisation croissante de l’espace public. Rediffusion du 29 octobre

«Guerres culturelles » : l’expression popularisée par James Davison Hunter dans les années 1990 n’a jamais véritablement trouvé d’étude empirique à la hauteur de son ambition théorique — expliquer comment les questions morales fracturent la société américaine. Il y a eu des portes ouvertes, des intuitions qui ont nourri la sociologie politique, la sociologie des pratiques, et, aujourd’hui, cette sociologie dite computationnelle, capable d’appliquer aux espaces numériques tout un tas de métriques. Avec Pop Culture, Politics, and the News, stimulant ouvrage fraîchement paru aux presses universitaires d’Oxford, Joel Penney, professeur associé à la School of Communication and Media de l’université d’État de Montclair, vient de proposer de quoi reformuler le problème pour peut-être un jour lever ce vieux lièvre.

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Adoptant une approche par les mondes de l’art que ne renierait pas Howard S. Becker, le livre restitue les dynamiques complexes qui traversent le journalisme culturel américain. Critiques, journalistes polyvalents, plumes à louer : les entretiens que Penney mène pointent la précarité grandissante d’une profession qui occupe aujourd’hui des interstices de plus en plus étriqués entre le journalisme politique, les marchés de la publicité et du marketing.

À l’approche interactionniste s’ajoute une élégante démonstration tissée de sociologie culturelle. Ainsi, les déséquilibres dans l’entertainment journalism s’expliquent-ils par les frontières symboliques derrière lesquelles campe un journalisme politique nanti de prestige ; ainsi, l’actualité culturelle et les cadrages empruntés pour la couvrir distinguent-ils très clairement le journalisme progressiste du journalisme conservateur ; ainsi, les « communautés interprétatives » se disputent-elles sur cette idée que tout art serait intrinsèquement politique.

Plus qu’un état des lieux de l’écosystème médiatique américain et de son volet le plus mal-aimé, Penney, par le prisme du journalisme culturel, déplie le


Benjamin Tainturier

Sociologue, Doctorant au médialab de SciencesPo