Société

Gérald Garutti : « Le bras d’honneur, c’est la fin de la parole »

Journaliste

Le double bras d’honneur commis cette semaine à l’Assemblée nationale par le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, offre une nouvelle et spectaculaire illustration de la progressive dégradation de la parole publique. Inquiet de ce phénomène, bien au-delà de cet incident, et soucieux d’y remédier, le dramaturge et metteur en scène Gérald Garutti a imaginé un Centre des arts de la parole qui sera inauguré ce lundi à Aubervilliers.

Ce lundi 13 mars, le Centre des arts de la parole ouvrira ses portes au Fort d’Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis. L’idée de cette nouvelle institution revient Gérald Garutti, qui en assurera la direction. C’est fort d’un constat de progressive détérioration de la parole publique que le metteur en scène et dramaturge (qui a notamment lontemps travaillé au TNP à Villeurbanne) a conçu un espace qui se donne pour objectif d’en prendre soin en s’appuyant sur ce qu’il appelle les « arts de la parole », et qui sont au nombre de sept : le théâtre, le récit, la poésie, l’éloquence, la conférence, le dialogue et le débat. Tous seront mis à contribution, ainsi qu’un vaste réseau d’institutions et d’associations, d’artistes et d’intellectuell.es pour y proposer des créations, des formations et y produire des publications. SB

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Cette semaine, le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, s’est illustré en adressant deux bras d’honneur dans l’hémicycle, au président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, Olivier Marleix. Dans quelle mesure ce double geste vous semble-t-il emblématique de la situation que vous décrivez dans votre récent manifeste pour les arts de la parole, Il faut voir comme on se parle ?
Cela relève d’un mouvement de désacralisation général de la parole. S’il y a bien un espace censé porter la parole publique au plus haut, du fait de sa dimension de représentativité, c’est bien l’Assemblée nationale ! C’est une question de dignité de la parole puisqu’on porte plus grand que soi, qu’on représente la nation. De même lorsqu’on est ministre, on n’est certes pas élu mais littéralement au service des citoyens. Ce bras d’honneur vient s’inscrire dans tout ce qu’on a vu ces dernières semaines comme invectives, comme insultes, toutes ces profondes dégradations de la parole publique… Comme lorsqu’un député se fait insulter, humilier à la télévision, lorsqu’il se fait ravaler en dessous de sa dignité dans ce qui est tout sauf un débat équilibré. C’


Sylvain Bourmeau

Journaliste, directeur d'AOC