Charles Enderlin : « À moins d’une pression américaine Israël refusera un cessez-le-feu »
Charles Enderlin, considéré comme une grande figure du journalisme, a été le correspondant de France 2 en Israël de 1981 à 2015. Journaliste grand reporter, il a suivi de près les négociations des diverses tentatives de paix. Ses nombreux ouvrages, comme Paix ou guerre : les secrets des négociations israélo-arabes, 1917-1995 (Stock, 1997), ou Le Rêve brisé. Histoire de l’échec du processus de paix au Proche-Orient. 1995-2002 (Fayard, 2002), ses nombreux documentaires, comme Les Années de sang (2006, réalisé par Don Setton), le racontent par le détail. Il mène également depuis longtemps un travail d’enquête sur l’histoire d’Israël ; en témoigne par exemple Par le feu et par le sang : le combat clandestin pour l’indépendance d’Israël, 1936-1948 (Albin Michel, 2008).
Contempteur infatigable de tous les extrêmismes, comme du messianisme juif, défenseur non moins infatigable de la paix et de la justice envers les Palestiniens, il a pu annoncer l’aggravation de la situation. Son dernier ouvrage a paru le 29 septembre et dénonce on ne peut plus clairement le gouvernement d’extrême droite de Netanyaou et Netanyaou lui-même (Israël. L’Agonie d’une démocratie, Le Seuil, « Libelle »). Franco-israélien, il habite à Jérusalem. CM
Vu la vitesse à laquelle change la situation, il nous faut commencer par cette introduction : nous sommes le mercredi 1ᵉʳ novembre, 14h30. À l’heure où nous parlons, où en est-on sur le front de Gaza ?
À l’heure où l’on se parle, dix-neuf soldats israéliens, et le bilan s’alourdit de jour en jour, ont perdu la vie au cours des combats qui se déroulent dans le centre et le nord de Gaza. Notamment à proximité du grand camp de réfugiés Jabalia, où il y a eu également un bombardement israélien qui a fait, d’après ce que l’on sait, de nombreuses victimes civiles. Selon les Israéliens, également des dizaines de combattants gazaouis, des terroristes. Le ton, en Israël est : « Nous n’avons pas le choix. » Le pays ne peut pas accepter l’existence à sa frontière d’une organisation fondamentaliste islamique capable de commettre des massacres tels que ceux du 7 octobre.
Le terrorisme palestinien est une forme de combat qui existe depuis des décennies. Du côté du Hamas, jusqu’à présent, c’étaient des attentats suicides en territoire israélien. Israël ripostait par des opérations ciblées, que ce soit en Cisjordanie ou à Gaza. Ensuite, il y a eu les tirs de roquettes depuis Gaza. La riposte israélienne a également consisté par des bombardements de représailles sur des cibles du Hamas. L’installation du système anti-missile, Dôme de fer, permet d’intercepter la plupart des roquettes tirées depuis Gaza. L’autre modus operandi, c’était des attaques ponctuelles pour attaquer et kidnapper des Israéliens, surtout des militaires. Le 7 octobre, le Hamas ne s’est pas contenté d’attaquer les bases de Tsahal. De tuer des soldats, hommes, femmes. D’emmener des prisonniers, hommes, femmes, à Gaza. Il a continué vers les 22 localités, notamment vers les kibboutzim qui se trouvent autour du territoire de Gaza. Et là, il aurait pu se contenter de prendre des hommes en otage. Mais non, le Hamas a procédé à un véritable massacre, tuant, violant, incendiant des maisons avec leurs habitants. Ensuite, il a kidnappé des Israéliens et des étrangers de tous âges, qu’il s’agisse d’enfants très jeunes, de personnes malades, de femmes enceintes, de vieux.
Cette barbarie a changé l’équilibre de la terreur et poussé Israël à réagir comme il ne l’a jamais fait par le passé. Selon les dirigeants et l’immense majorité du public israélien, le pays n’a pas le choix : il faut pénétrer dans Gaza pour détruire les capacités militaires du Hamas. Et c’est l’opération qui est en cours. Israël est en état de guerre. La mobilisation est générale, tout ce qui peut être mobilisé l’a été. 360 000 hommes et femmes en plus du contingent qui combat. L’économie passe en mode de guerre et cela va durer. Toutes les localités israéliennes autour de Gaza ont été évacuées. Il en est de même à la frontière libanaise. C’est-à-dire que, en plus des évacuations obligatoires décidées par le gouvernement, des gens sont partis pour ne pas rester à proximité des tirs de missiles du Hezbollah au nord et des bombardements du Hamas au sud. Il y a quelque chose comme 200 000 israéliens qui sont réfugiés à l’intérieur de leur propre pays. Tous les kibboutzim autour de Gaza sont vides.
Le contrat entre le citoyen et l’État est brisé. Le citoyen assume tous ses devoirs, paye ses impôts et reçoit en retour le droit fondamental de vivre en sécurité. Le gouvernement de Benjamin Netanyahou n’a pas été capable de protéger les 1 400 personnes massacrées par le Hamas et les centaines d’Israéliens et d’étrangers qui sont aujourd’hui otages dans Gaza.
Comment doit-on comprendre précisément l’objectif annoncé d’Israël d’élimination du Hamas ? Et qui décide : le cabinet de guerre, le gouvernement ?
Pour ce qui est de la stratégie militaire des opérations en cours, c’est le gouvernement Netanyahou auquel participent maintenant le parti de Benny Gantz, lui-même ancien ministre de la Défense et ancien chef d’état-major, Gadi Eizenkot, également ancien chef d’état-major, qui siègent dans le cabinet de guerre. Les décisions sont prises paraît-il à l’unanimité. Il n’y a pas d’opposition. Cela dit, ce n’est pas l’union nationale. La société est toujours aussi divisée qu’avant le 7 octobre. Mais il y a un consensus général sur la nécessité de détruire la menace représentée par le Hamas à Gaza. Aller chercher individuellement les éléments militaires du Hamas pour les détruire, tuer les chefs militaires et politiques de l’organisation qui s’y trouvent. C’est ça la stratégie. Elle est simple et claire.
Et quel est l’objectif du Hamas ?
C’est effectivement la question qu’il faut poser. Pourquoi le Hamas a-t-il franchi cette étape dans la terreur, dans la barbarie. Il aurait pu encore une fois se contenter de prendre des otages, de tuer des militaires comme ils le faisaient dans le passé. Visiblement, l’organisation islamiste s’est lancée dans une nouvelle stratégie pour créer une crise régionale majeure. En 2014, lors de la dernière véritable guerre entre Israël et Gaza, Mohamed Deif, le chef militaire du Hamas, a refusé à neuf reprises les propositions de cessez-le-feu de Benjamin Netanyahou. Pourquoi ? Parce que, de jour en jour, les images des victimes civiles des bombardements israéliens provoquaient de grandes manifestations à l’étranger, non seulement en Europe, aux États-Unis, mais aussi dans le monde arabe. Et cela faisait diminuer considérablement le soutien à Israël en Occident.
Veut-il entraîner le Hezbollah dans le conflit ? Aujourd’hui encore des dirigeants du Hamas critiquent le Hezbollah qui se contente de tirer quelques missiles à la frontière et n’attaque pas directement Israël. Pour l’instant, la milice chiite maintient un conflit à un niveau pas très élevé avec Israël. Il dispose de dizaines de milliers de missiles qu’il pourrait lancer sur Israël. Mais, je suppose qu’au Liban on voit les destructions subies par Gaza et la population libanaise ne veut peut-être pas que cela se reproduise à Beyrouth et au Sud Liban. Cela dit, n’importe quel incident peut assez vite dégénérer. Le Hamas et le Hezbollah font face à un Israël qui a totalement changé depuis le 7 octobre. C’est un pays en colère, en deuil, qui, je le répète, considère comme une nécessité absolue la destruction de la menace terroriste et militaire que représente le Hamas. Quel que soit le prix.
Et donc n’a pas l’intention d’occuper Gaza. Israël s’en tient à l’injonction américaine ?
Israël n’occupera pas Gaza à l’issue des opérations militaires et n’a aucune intention d’assumer la responsabilité de ce territoire. Cela reviendra peut-être à la communauté internationale, à l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas, à Ramallah. Mais, c’est une autre histoire. Imaginer maintenant ce qui arrivera après la guerre, c’est un peu construire des châteaux en Espagne.
On demande cependant à Israël de penser au « day after ». Est-ce qu’il y a quelques hypothèses ?
Non. Par exemple, voyez la réalité au-delà des déclarations d’Emmanuel Macron, de Joe Biden et d’autres sur la nécessité d’une solution à deux États. Pour qu’on puisse seulement en parler il faudrait qu’il y ait un gouvernement en Israël qui accepte le principe de la création d’un État palestinien aux côtés d’Israël. Ce n’est pas le cas. Au contraire, annexionniste, le cabinet Netanyahou y est totalement opposé. C’est écrit en toutes lettres dans son programme de gouvernement signé avec les partis de la coalition parlementaire. « La Judée-Samarie [la Cisjordanie] est la propriété exclusive du peuple juif. » Parmi les partenaires de la coalition de Benjamin Netanyahou, on trouve les deux formations racistes, dont le Parti sioniste religieux dirigé par Bezalel Smotrich, un colon radical. Il est ministre des Finances, a la main sur le chéquier. En pleine guerre avec ses amis il continue de financer les colonies. Smotrich, également ministre délégué à la Défense, a la responsabilité de l’administration civile de la Cisjordanie, c’est-à-dire des colonies, et aussi de la population palestinienne dont il empêche le développement. Il y a également parmi ces personnages Itamar Ben-Gvir, l’héritier idéologique du rabbin raciste Meïr Kahana, qui est ministre de la Sécurité nationale, où il dirige la police, les gardes-frontières et l’administration pénitentiaire (c’est-à-dire aussi des prisons où sont détenus les Palestiniens…). Avant la dernière élection, il avait encore dans son salon, pour le montrer à ses visiteurs, le portrait de Baruch Goldstein, le terroriste juif qui, au début de 1994, a assassiné 29 musulmans en prière dans le caveau des Patriarches. Baruch Goldstein est très apprécié par Itamar Ben-Gvir et son parti, Puissance juive, est ouvertement raciste anti-arabe et homophobe. Donc, parler de solution à deux États avec ces colons radicaux, est tout simplement inutile. Aussi longtemps que ce gouvernement sera en place, il n’y aura pas de négociations de paix avec les Palestiniens parce qu’il s’y oppose.
Et avant une solution à deux États, est-ce qu’il n’y a pas à réfléchir à une première étape : ce que deviendra Gaza.
Après la guerre et les destructions terribles, les très nombreuses victimes et les nombreux blessés. Il va falloir reconstruire Gaza. Il va falloir réinstaller une administration, au moins un semblant de gouvernance à Gaza. Mais parler politique, de diplomatie, avancer aujourd’hui vers une paix régionale, c’est inimaginable. Et ça ne se fera pas avec le gouvernement Netanyahu.
Comment alors espérer la fin de ce gouvernement ? Les sondages récents montrent une défiance généralisée envers Netanyahou.
Ils sont 64 députés sur 120. Les élections sont prévues dans trois ans. Ces gens-là, Benjamin Netanyahou y compris, feront tout pour rester au pouvoir quoi qu’il advienne. Parce qu’ils savent, tous les sondages le montrent, que s’il y avait des élections maintenant, ils seraient magistralement renvoyés dans l’opposition et seraient très minoritaires à la Knesset. Dans ces conditions, ils feront tout pour éviter des élections anticipées. Après la guerre, assurément, le gigantesque mouvement prodémocratie se réveillera, et retournera dans la rue, pour exiger le départ de ces extrémistes qui dirigent Israël.
Il ne peut y avoir aucune pression extérieure ?
En pleine guerre, un pays ne change pas ses dirigeants politiques et militaires. Les comptes seront réglés avec ceux qui ont fauté après la fin des opérations militaires. Dans quelques mois, un an, peut-être deux. Le chef d’état-major, le patron du Shin Beth, le général commandant les renseignements militaires ont publiquement reconnu leurs erreurs et savent qu’ils devront démissionner. Pour l’heure, ils se sont ressaisis. Personne ne peut actuellement prendre leur place. Il n’est pas question de casser la chaîne de commandement. Tsahal s’est entièrement ressaisi en 24 heures, il faut le dire.
À l’échelon politique, c’est autre chose. Premier ministre, Benjamin Netanyahou dirige le gouvernement et le cabinet de guerre tout en menant une bataille parallèle pour sa survie politique. Par toutes sortes d’opérations sur les réseaux sociaux, et dans les médias d’extrême droite, où circulent des accusations contre le chef d’état-major, contre les renseignements, contre l’armée. Il n’y a pas de réelle union nationale, uniquement un semblant d’unité qui peut éclater à tout moment en raison de l’activité des ministres colons.
Pensez-vous qu’il s’agit d’un contexte existentiel pour Israël ?
Israël ne disparaîtra pas, mais connaît la crise la plus grave depuis sa création en 1948. Jamais le pays n’a subi une attaque de telle importance sur son territoire souverain, avec un aussi grand nombre de victimes civiles. Pour la première fois des localités israéliennes ont été occupées par un ennemi, parfois pendant deux jours, trois jours, quatre jours, massacrant la population, emmenant des centaines de civils en otage. À l’exception de la guerre d’Indépendance, en 1948, toutes les guerres se sont déroulées hors des frontières de l’État. C’est un choc immense pour les Israéliens, pour qui, je me répète, le contrat fondamental entre l’État et ses citoyens a été brisé. S’il n’est pas rétabli, de nombreux jeunes israéliens séculiers pourraient décider de partir s’ils n’ont pas la certitude de pouvoir vivre dans ce pays où non seulement ils doivent payer des impôts, mais aussi faire l’armée, alors qu’ils n’ont pas en retour la possibilité d’y mener dans la sécurité une vie sociale et économique acceptable. Selon moi, ce sera cela, la crise existentielle.
Si Israël n’arrive pas à détruire le Hamas, il ne retrouvera pas la paix intérieure. Cela sans parler du problème de la colonisation, du contrôle de millions de Palestiniens en Cisjordanie où, selon Tamir Pardo, ancien chef du Mossad (qui n’est pas un gauchiste) existe une forme d’apartheid : « Les mécanismes israéliens de contrôle des Palestiniens, depuis les restrictions de mouvement jusqu’à leur placement sous la loi martiale, alors que les colons juifs dans les territoires occupés sont gouvernés par des tribunaux civils, sont à la hauteur de l’ancienne Afrique du Sud » (interview à l’Associated Press, 6 septembre 2023).
Ce n’est pas tout, le coût de la vie en Israël est de 20 à 30 % supérieur à la moyenne de l’OCDE. Cela aussi, c’est un échec de la politique de Benjamin Netanyahou. L’autre aspect de la crise est social et politique. Jamais dans son histoire le pays n’a été aussi divisé en entrant dans une guerre. Les manifestations prodémocratie rassemblaient des centaines de milliers d’Israéliens contre le gouvernement, contre la volonté du gouvernement d’installer un régime autocratique illibéral.
Avant l’attaque du 7 octobre, la coalition au pouvoir prévoyait de faire adopter une loi permettant de considérer l’étude de la Torah comme l’équivalent d’un service militaire. Si vous êtes jeune et habitez ce pays, est-ce que vous avez envie de faire votre armée en sachant que vous aurez le même statut que les étudiants d’écoles talmudiques qui, eux, sont dispensés de service militaire et ont une bourse d’étude supérieure à la solde d’un soldat du contingent qui, lui, risque sa peau ? Je vous rappelle que plus de 300 soldats israéliens ont été tués dans l’attaque du 7 octobre. Et le bilan monte de jour en jour.
La surdétermination du paramètre sécuritaire a été reprochée à Israël ; ce serait l’un des paramètres qui ont rendu caduques les promesses des accords de paix.
C’est absolument faux. Cela n’a rien à voir avec l’aspect sécuritaire d’Israël. Le processus de paix a été torpillé par les extrémistes des deux côtés. Les sionistes religieux messianiques opposés à l’idée d’un État palestinien en Terre d’Israël. Et les fondamentalistes islamiques qui combattent l’existence d’Israël en Terre d’Islam. Je vous rappelle qu’Yitzhak Rabin a été assassiné par un sioniste religieux. Le massacre commis par le terroriste juif Baruch Goldstein à Hébron en janvier 1994 a donné le prétexte au Hamas de lancer une campagne d’attentats suicides en territoire israélien.
La communauté internationale n’a pas été capable d’obliger les responsables palestiniens de l’OLP et les dirigeants israéliens de lutter contre leurs extrémistes. Celui qui, en 1994 et 1995, présidait de gigantesques manifestations contre le processus de paix, où les foules juives scandaient à mort Rabin et à mort Arafat, s’appelle Benjamin Netanyahu. Il est au pouvoir.
Des conjectures ont circulé sur des conditions éventuelles de cessez-le-feu. Y a-t-il quelque chose à en retenir ?
À moins d’une pression américaine Israël refusera un cessez-le-feu. Ce serait un échec pour le gouvernement israélien. Mais je vous propose de revenir sur l’essentiel : quelle a été la stratégie israélienne envers le Hamas jusqu’au 7 octobre. En 2009, j’ai publié Le Grand aveuglement. Israël et l’irrésistible ascension de l’Islam radical dans lequel je racontais, grâce à des sources des services de renseignement et de l’armée, comment Israël a encouragé et favorisé le développement à Gaza de l’Union islamique du cheikh Ahmed Yassin, une association des Frères musulmans. Cela jusqu’en 1988 et la naissance du Hamas. En ordonnant l’évacuation des colonies de Gaza, en 2005, Ariel Sharon a décidé de laisser ce territoire à l’organisation islamiste. Dov Weissglass, son avocat et proche conseiller, a expliqué le but de l’opération : « Le [retrait] signifie le gel du processus politique. Et, lorsque vous gelez ce processus, vous empêchez la création d’un État palestinien et toute discussion sur les réfugiés, sur les frontières et sur Jérusalem. Ce paquet intitulé “État palestinien”, avec tout ce que cela signifie, est définitivement retiré de la table des négociations. » Le Hamas qui prône le destruction d’Israël et le Fatah partisan d’une paix avec Israël sont deux organisations ennemies. En 2007 lorsque l’organisation islamique a lancé un coup d’état à Gaza pour en expulser les institutions de l’Autorité autonome de Mahmoud Abbas, le Premier ministre Ehoud Olmert a interdit à Tsahal d’intervenir contre le Hamas. À nouveau au pouvoir en 2009, Netanyahu a autorisé son financement par le Qatar. Depuis, tous les mois, un jet privé qatari atterrissait à l’aéroport Ben Gourion de Tel Aviv. Un émissaire en descendait, porteur de valises contenant plusieurs millions de dollars en liquide. Escorté par la police israélienne il allait les déposer à Gaza avant de repartir.
En mars 2019 Netanyahu a expliqué aux députés du Likoud : « Toute personne qui veut empêcher la création d’un État palestinien doit soutenir le renforcement du Hamas, le transfert de fonds au Hamas ». Bezalel Smotrich déclarait déjà en 2015 : « L’Autorité palestinienne est un fardeau, mais le Hamas est pour nous un acquis stratégique réel. Sur la scène internationale, personne ne l’écoute. Il ne peut pas nous traîner devant la Cour internationale de justice ou être à l’origine d’une plainte au Conseil de sécurité, comme c’est le cas avec l’Autorité d’Abbas. » Surtout, avec l’OLP d’Abbas, il est possible de relancer le processus de négociations… Et, ces jours-ci, en pleine guerre, Smotrich, ministre des Finances, refuse de transférer à l’Autorité palestinienne les sommes qu’Israël doit lui remettre selon les accords existants. Cela au risque de déclencher un soulèvement palestinien en Cisjordanie. Il faut le répéter : soutenir la politique de Netanyahu, la colonisation, le refus de négocier avec Abbas, c’est soutenir le financement du Hamas. Tous, les politiques français et les personnalités de la communauté juive qui soutiennent Netanyahu et sa politique envers les Palestiniens, et donc le financement du Hamas, doivent demander pardon aux familles des victimes du 7 octobre. Ils partagent la responsabilité de la tragédie qui se déroule sous nos yeux.
On a parlé de la bataille militaire, de la bataille politique et de la bataille de l’opinion publique. Est-ce que pour Israël le risque n’est pas trop grand de tenir sur cette fermeté qui tue aussi des milliers de Gazaouis ? Y compris du point de vue de la société israélienne et des familles des otages.
Concernant les otages, d’après ce que l’on sait, jusqu’à présent, il n’y a pas eu de véritable proposition de négociation du Hamas. L’organisation utilise l’affaire des otages cyniquement pour faire pression sur la société israélienne et sur les pays dont des ressortissants sont détenus à Gaza. Des musulmans, des Arabes, aussi ont été assassinés dans les localités israéliennes le 7 octobre. L’armée a découvert une vidéo d’un jeune Palestinien de Jérusalem-Est qui était également à la rave-party, ils l’ont assassiné comme les autres devant la caméra.
Il faut ajouter qu’au fil des ans, l’armée israélienne n’a pas trouvé d’autre tactique pour attaquer le Hamas que les bombardements et je pense que c’est un échec. C’est la tragédie des civils gazaouis sous le feu, abandonnés par le Hamas qui pourrait leur permettre de se réfugier dans le gigantesque réseau de tunnels souterrains qu’il a construit mais qui est réservé uniquement aux militants et aux chefs de l’organisation. Il n’y a jamais eu de protection accordée par le Hamas aux civils gazaouis. J’ai des amis à Gaza pour lesquels je tremble. Mais il ne faut pas oublier que cela a été provoqué par le massacre commis par le Hamas le 7 octobre en Israël.
Alors, revenons-y, comment peut-on vraiment écraser politiquement et militairement le Hamas ? Haaretz cite un think tank jordanien : le Hamas est « an ideology, a doctrine and a never ending project. It will grow more popular and take on new forms ». Peut-on compter sur les pressions de la part de certains pays arabes ?
Le Hamas n’a de « résistance » que le nom. Ce n’est rien d’autre qu’une organisation fondamentaliste islamique dont le but déclaré est la destruction d’Israël et l’islamisation de la région. Autant que je sache, il n’y a pas de pression sur le Hamas de la part de pays arabes. Il est soutenu par le Qatar en liaison avec les Iraniens. Du point de vue d’Israël la seule pression ne peut être que militaire et mener à la destruction de l’appareil militaire responsable du massacre du 7 octobre.