Littérature

Adam Thirlwell : « Il s’agit toujours de savoir comment rendre un roman le plus contemporain possible »

Écrivain et traducteur

Le nouveau roman d’Adam Thirlwell se déroule au XVIIIe siècle, celui des questionnements féministes contemporains. Il multiplie les scènes anachroniques, qui ont toutes eu lieu. Il montre des personnages fictifs, lesquels ont existé. En bref, dans ce roman, tout est vrai et tout est inventé, et ce n’est pas paradoxal. Alors son traducteur, plutôt que de dissiper la fumée, a demandé à l’auteur, pour nous éclairer, comment fonctionne sa machine à brouillard.

Elle est singulière la relation qui se noue entre la personne qui a écrit un livre et celle qui l’a traduit, et c’est de ça que je voudrais témoigner. Le Futur futur est le deuxième roman de Thirlwell que je traduis ; avant, il y a eu Candide et lubrique (L’Olivier, 2016). Adam et moi avons échangé par mail. J’ai pu lui poser des questions portant sur le sens de certaines phrases, le contexte de certains passages, sur des références dont je n’étais pas sûr, bref, les questions de traduction qui me taraudaient. Nous nous sommes vus plusieurs fois, Adam et moi, à Paris et à Londres. Mais là, il s’agit d’autre chose.

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Après avoir vécu de longs mois à l’intérieur du roman d’Adam Thirlwell, j’ai souhaité en savoir plus. Ce texte me fascine par sa douceur, sa délicatesse, sa drôlerie, ses dialogues en apesanteur et ses scènes en trompe-l’œil, mais, surtout, je m’interroge sur sa construction, sa dynamique. Sur ce mystère, seul l’auteur pouvait lever un coin du voile.

S’autorisant d’hilarantes saillies anachroniques, Le Futur futur joue à saute-mouton entre la Révolution française, l’Amérique naissante et la lune et pose la question des relations entre pouvoir et écriture, du manque d’argent et du regard des hommes qui fait de Céline une proie.

L’action se déroule dans un temps indéterminé qui pourrait être la fin du dix-huitième siècle. Céline est, à son corps défendant, l’héroïne de pamphlets érotiques lui prêtant une vie de débauche. Pour se défendre, elle décide d’organiser avec ses amies des soirées et de faire émerger une scène littéraire afin de gagner du pouvoir et contrer ainsi celui des hommes qui l’oppresse. Dans une tonalité qui évoque autant Jonathan Swift que Montesquieu et le Voltaire des contes philosophiques, Adam Thirlwell invente une forme littéraire irrésistiblement biscornue qui dit la fragilité et la détresse d’une femme empêchée dans un monde d’hommes, les ruses de la politique et des affaires, les voyages contraints. Les sentiments nous par


Nicolas Richard

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