Cinéma

Isabelle Huppert : « Hong Sang-soo était comme un peintre qui compose sa palette »

Journaliste

Après In Another Country, façonné au fil des jours en Corée, et La Caméra de Claire, tourné à Cannes comme dans un rêve, Isabelle Huppert retrouve Hong Sang-soo pour La Voyageuse, Ours d’argent au Festival de Berlin. À l’occasion sa sortie, l’actrice revient sur son travail avec le réalisateur prolifique – son approche alliant improvisation et rigueur –, et sa vision à elle du jeu, sa recherche « d’accès vivants ».

Le 22 janvier sort dans les salles françaises le trente-deuxième film de Hong Sang-soo, qui est aussi son troisième avec Isabelle Huppert. Celle-ci y interprète une Française seule à Séoul, et assez perdue, qui gagne difficilement sa vie en donnant des cours de langue. Vêtue d’un chandail vert et d’une robe courte qui lui donnent une apparence aussi singulière que sa situation ou les raisons de sa présence en Corée sont incertaines, Iris fait une série de rencontres, chez ses élèves ou dans les rues et les parcs de Séoul, qui déploient peu à peu une étrangeté à la fois inquiétante et drôle, un mystère d’autant plus profond qu’il semble léger, au détour d’une conversation alcoolisée ou d’une séduction ensommeillée. La Voyageuse cristallise ainsi la formidable énergie poétique du cinéma de Hong Sang-soo. Rencontrée à Paris en mars dernier, peu après que La Voyageuse ait reçu l’Ours d’argent au Festival de Berlin et alors que la comédienne interprétait Bérénice mis en scène par Romeo Castelucci au Théâtre de la Ville, Isabelle Huppert raconte comment elle a travaillé avec le prolifique réalisateur coréen[1], et les méthodes singulières d’un des plus grands artistes du cinéma contemporain. J.M.F.

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A Traveller’s Needs est votre troisième film avec Hong Sang-soo. Vous souvenez-vous comment vous l’avez rencontré ?
Oui, je m’en souviens très bien. C’était en 2010 dans le hall du cinéma MK2 Bibliothèque à Paris en compagnie de Claire Denis, qui est très amie avec lui. C’est là que je l’ai salué pour la première fois. Plus tard, j’étais à Séoul pour l’exposition « La Femme aux portraits »[2], qui a tourné dans le monde entier. J’ai eu l’idée de lui envoyer une invitation pour le vernissage, en mai 2011, et il est venu. Il m’a proposé de se revoir, le lendemain nous avons déjeuné ensemble, il m’a emmenée dans un endroit bizarre, avec des toits de voiture au plafond. Je lui ai demandé ce qu’il allait faire, il m’a répondu qu’il allait tourner un nouveau film, mais qu’i


[1] Après La Voyageuse, Ours d’argent de la meilleure mise en scène au Festival de Berlin en février 2024, Hong Sang-soo a présenté en août By the Stream au Festival de Locarno.

[2] L’exposition « La Femme aux portraits », réunissant deux cents photos d’Isabelle Huppert dont celles prises par la plupart des plus grands photographes contemporains, a tourné dans le monde entier à partir de 2006, notamment New York, Paris, Berlin, Londres, Tokyo, Rome, Madrid, Sao Paulo, Pékin… Elle a donné lieu à l’édition du livre Isabelle Huppert, la femme aux portraits, sous la direction de Ronald Chammah et Jeanne Fouchet, textes d’Elfriede Jelinek, Patrice Chereau et Susan Sontag, Seuil (2005).

[3] Après sa création au Théâtre de la Ville à Paris en mars 2024, Bérénice est en tournée en France et en Europe jusqu’à sa reprise à Paris en juin 2025.

Jean-Michel Frodon

Journaliste, Critique de cinéma et professeur associé à Sciences Po

Rayonnages

Cinéma Culture

Notes

[1] Après La Voyageuse, Ours d’argent de la meilleure mise en scène au Festival de Berlin en février 2024, Hong Sang-soo a présenté en août By the Stream au Festival de Locarno.

[2] L’exposition « La Femme aux portraits », réunissant deux cents photos d’Isabelle Huppert dont celles prises par la plupart des plus grands photographes contemporains, a tourné dans le monde entier à partir de 2006, notamment New York, Paris, Berlin, Londres, Tokyo, Rome, Madrid, Sao Paulo, Pékin… Elle a donné lieu à l’édition du livre Isabelle Huppert, la femme aux portraits, sous la direction de Ronald Chammah et Jeanne Fouchet, textes d’Elfriede Jelinek, Patrice Chereau et Susan Sontag, Seuil (2005).

[3] Après sa création au Théâtre de la Ville à Paris en mars 2024, Bérénice est en tournée en France et en Europe jusqu’à sa reprise à Paris en juin 2025.