Antonin Peretjatko : « Dans une guerre, ce qui est visé en premier, c’est la culture d’un pays »
Il pourrait paraître surprenant de voir Antonin Peretjatko, auteur des comédies les plus azimutées et bricolo du cinéma français (La Fille du 14 juillet, La loi de la jungle, La pièce rapportée) signer un documentaire sur l’Ukraine. Le sujet ne serait-il pas trop ample, trop grave pour son registre habituel ? À ces inquiétudes, Voyage au bord de la guerre répond par son propre geste, aussi humble qu’inventif. Voilà un carnet de voyage et de rencontres, tressant « choses vues » et témoignages dans un patchwork artisanal et poétique contenant sa propre réflexion sur les images de guerre.
Il faut dire que le film est tourné avec un outil anachronique, une caméra Bolex 16mm à ressort n’autorisant que des plans courts. Contrainte formelle qui est aussi, pour le cinéaste, un joyeux contrepied fait à l’hégémonie de l’image numérique et aux méthodes des chaines info. Cette exploration sensible du territoire se voit ainsi dotée d’un grain particulier, évoquant une quête des traces et des souvenirs. Ces images du présent contiennent déjà leur propre mémoire, et alimentent une interrogation vertigineuse : comment la guerre affecte les imaginaires.
En matière d’imaginaire, celui d’Antonin Peretjatko est entièrement façonné par la matière argentique. Nous le rencontrons dans son bureau / salle de montage, où les copies super 8 et 16 mm de ses films de chevet s’empilent en colonnes jusqu’au plafond. Pas un DVD à l’horizon ! L’occasion d’évoquer, outre ce documentaire, un autre projet éditorial qui sort en même temps (le roman-photo Vols au Musée de la Croûte publié au Seuil) et sa prochaine comédie (vampirique) Vade Retro à laquelle il met la dernière main. J. L.

Au départ, quand vous partez en Ukraine avec une caméra, c’était juste un voyage ou il y avait déjà l’ambition d’en faire un film ?
L’idée était d’en faire un film de voyage. Elle est arrivée dès le début de la guerre. Je trouvais intéressant l’idée d’aller filmer comment les réfugiés ukrainiens, en France, fui