Roman (extrait)

Les Sables de l’empereur

Écrivain

Continuons notre série d’avant-premières de la rentrée littéraire étrangère de janvier avec Mia Couto, le célèbre auteur du roman Terre somnambule qui nous l’a fait découvrir en France il y a 25 ans. L’écrivain mozambiquain, de langue portugaise, se plonge ici dans l’histoire du conflit entre Gaza, empire africain dirigé par un Africain, et le Portugal. Nous vivons les dernières années du XIXe siècle. Ngungunyane finira déporté aux Açores et l’urne contenant ses restes reviendra au Mozambique un siècle plus tard. Contenant ses restes ou bien du sable, nul ne le sait.
À paraître chez Métailié dans la traduction d’Elisabeth Monteiro Rodrigues.

1

Étoiles déterrées

 

La mère dit : la vie se fait comme une corde.
Il faut la tresser jusqu’à ce qu’on ne distingue plus les fils des doigts.

 

Tous les matins se levaient sept soleils sur la plaine d’Inharrime. En ces temps-là, le firmament était bien plus grand et en lui tenaient tous les astres, les vivants et ceux qui sont morts. Nue comme elle avait dormi, notre mère sortait de la maison avec un tamis à la main. Elle allait choisir le meilleur des soleils. Avec le tamis, elle recueillait les six étoiles restantes et les rapportait au village. Elle les enterrait près de la termitière, derrière notre maison. C’était celui-là notre cimetière de créatures célestes. Un jour, en cas de besoin, nous irions là-bas déterrer les étoiles. En raison de ce patrimoine, nous n’étions pas pauvres. Ainsi disait notre mère, Chikazi Makwakwa. Ou simplement mame, dans notre langue maternelle.

Celui qui nous rendait visite connaissait l’autre raison de cette croyance. C’était dans la termitière qu’on enterrait les placentas des nouveau-nés. Sur le nid de termites avait poussé une mafurreira[1]*. À son tronc nous attachions les tissus blancs. Là, nous parlions avec nos morts.

La termitière était néanmoins le contraire d’un cimetière. Gardienne des pluies, en elle habitait notre éternité.

Une fois, le matin déjà tamisé, une botte écrasa le Soleil, ce Soleil que ma mère avait élu. C’était une botte militaire, identique à celle que les Portugais portaient. Cette fois, pourtant, c’était un soldat vanguni* qui l’avait aux pieds. Le soldat était envoyé par l’empereur Ngungunyane[2].

Les empereurs ont faim de la terre et leurs soldats sont des bouches qui dévorent les nations. Cette botte brisa le Soleil en mille éclats. Et le jour devint sombre. Les autres jours aussi. Les sept soleils mouraient sous les bottes des militaires. Notre terre était en train d’être déchiquetée. Sans étoiles pour alimenter nos rêves, nous apprenions à être pauvres. Et nous nous égarions de l’éternité. Sachant que l’éternité n’est que l’autre nom de la Vie.

 

Je m’appelle Imani. Ce nom qu’on m’a donné n’est pas un nom. Dans ma langue maternelle Imani veut dire « Qui est-ce ? ». On frappe à une porte et, de l’autre côté, quelqu’un dit :

– Imani ?

C’est cette question en effet qu’on m’a donnée pour identité. Comme si j’étais une ombre sans corps, dans l’éternelle attente d’une réponse.

On dit à Nkokolani, notre terre, que le nom du nouveau-né vient d’un chuchotis qui s’entend avant sa naissance. Dans le ventre de la mère, il ne se tisse pas simplement un autre corps. Il se fabrique son âme, le moya. Encore dans la pénombre du ventre, ce moya se forme peu à peu à partir des voix de ceux qui sont déjà morts. L’un de ces ancêtres demande au nouvel être d’adopter son nom. Dans mon cas, on m’a soufflé le nom de Layeluane, ma grand-mère paternelle.

Comme l’exige la tradition, notre père, tate dans notre langue maternelle, est allé consulter un devin. Il voulait savoir si on avait traduit la volonté sincère de cet esprit. Et il est arrivé ce qu’il n’attendait pas : le voyant n’a pas confirmé la légitimité du baptême. Il a fallu consulter un deuxième devin qui, aimablement, et contre paiement d’une livre sterling, lui a assuré que tout était en ordre. Mais comme dans les premiers mois de ma vie, je pleurais sans cesse, la famille en a conclu qu’ils m’avaient donné le mauvais nom. On a consulté la tante Rosi, la devineresse de la famille. Après avoir jeté les osselets magiques, notre tante a assuré : « Dans le cas de cette petite fille, ce n’est pas son nom qui est faux ; c’est sa vie qu’il faut accorder. »

Mon père a démissionné de sa tâche. Que ma mère s’occupe de moi. Et c’est ce qu’elle a fait en me baptisant « Cendre ». Personne n’a compris le pourquoi de ce nom qui, en vérité, n’est pas resté longtemps. Après le décès de mes sœurs, emportées par les grandes crues, on s’est mis à m’appeler « la Vivante ». On me désignait ainsi, comme si le fait d’avoir survécu était mon unique trait distinctif. Mes parents ordonnaient à mes frères d’aller voir où était la « Vivante ». Ce n’était pas un nom. C’était une façon de ne pas dire que leurs autres filles étaient mortes.

Le reste de l’histoire est encore plus nébuleux. À une certaine époque, mon vieux a reconsidéré la chose et s’est finalement imposé. J’aurais pour nom aucun nom : Imani. L’ordre du monde, enfin, s’était rétabli. Attribuer un nom est un acte de pouvoir, l’occupation initiale et la plus définitive d’un territoire étranger. Mon père, qui protestait tant contre l’empire des autres, a réendossé le statut d’un petit empereur.

Je ne sais pourquoi je m’éternise autant dans ces explications. Parce que je ne suis pas née pour être une personne. Je suis une race, je suis une tribu, je suis un sexe, je suis tout ce qui m’empêche d’être moi-même. Je suis noire, je suis des Vatxopi, une petite tribu sur le littoral du Mozambique. Les miens ont eu l’audace de s’opposer à l’invasion des Vanguni, ces guerriers venus du sud qui se sont installés comme s’ils étaient maîtres de l’univers. On dit à Nkokolani que le monde est bien trop grand pour y faire tenir un maître.

Notre terre, cependant, était disputée par deux prétendus propriétaires : les Vanguni et les Portugais. Voici pourquoi ils se haïssaient autant et se faisaient la guerre : parce que leurs intentions étaient tellement semblables. L’armée des Vanguni était bien plus nombreuse et puissante. Et plus forts étaient leurs esprits, qui commandaient sur les deux côtés de la frontière qui a déchiré notre terre en deux. D’un côté, l’Empire de Gaza, dominé par le chef des Vanguni, l’empereur Ngungunyane. De l’autre côté, les Terres de la Couronne, où gouvernait un monarque qu’aucun Africain ne connaîtrait jamais : Dom Carlos I, le roi du Portugal.

Les autres peuples, nos voisins, se sont modelés sur la langue et les coutumes des envahisseurs noirs, ceux qui venaient du sud. Nous, les Vatxopi, sommes parmi les rares à habiter les Terres de la Couronne et à nous être alliés aux Portugais dans le conflit contre l’Empire de Gaza. Nous sommes peu, murés par l’orgueil et cernés par les kokholo, ces palissades en bois que nous dressons autour de nos villages. À cause de ces abris, notre localité était devenue si petite que même les pierres avaient un nom. À Nkokolani, on buvait tous au même puits, une seule goutte de venin aurait suffi à tuer le village entier.

 

Un nombre incalculable de fois, on s’est réveillés aux cris de notre mère. Elle dormait et criait, tournant en rond dans la maison, en pas somnambules. Dans ces délires nocturnes elle commandait la famille une journée sans fin, traversait des marécages, des rus et des chimères. Elle retournait à notre ancien village, où nous étions nés près de la mer.

Il y a, à Nkokolani, un proverbe qui dit ceci : si tu veux connaître un endroit, parle avec les absents ; si tu veux connaître une personne, écoute ses rêves. Or l’unique rêve de notre mère était celui-là : retourner à l’endroit où nous avions été heureux et vécu en paix. Cette saudade était infinie. Existerait-il, à propos, une saudade qui ne soit pas infinie ?

La rêverie qui moi m’occupe est bien différente. Je ne crie ni ne déambule dans la maison. Mais il n’y a pas une nuit où je ne rêve que je suis mère. Et aujourd’hui encore j’ai rêvé que j’étais enceinte. La courbe de mon ventre rivalisait avec la rondeur de la Lune. Cette fois, cependant, c’est l’inverse d’un accouchement qui s’est produit : c’est mon fils qui m’expulsait moi. C’est peut-être ce que font les bébés au moment de naître : ils se protègent de leurs mères, ils se déchirent de ce corps indistinct et unique. Eh bien mon fils rêvé, cette créature sans visage et sans nom, se débarrassait de moi, en spasmes violents et douloureux. Je me suis réveillée en sueur et avec de terribles douleurs dans le dos et aux jambes.

Après j’ai compris : ce n’était pas un rêve. C’était une visite de mes ancêtres. Ils apportaient un message : ils me mettaient en garde, car moi, du haut de mes quinze ans, je tardais à être mère. À Nkokolani, toutes les jeunes filles de mon âge étaient déjà tombées enceintes. Moi seule semblais condamnée à une sèche destinée. Finalement, je n’étais pas seulement une femme sans nom. J’étais un nom sans personne. Un paquet vide. Vide comme mon ventre.

 

Dans notre famille, chaque fois qu’un enfant naît, on ne ferme pas les fenêtres. Au contraire de ce que fait le reste du village : même au plus fort de la chaleur, les autres mères emmaillotent les bébés dans des linges épais, se murant dans le noir de la chambre. Dans notre maison, non : portes et fenêtres demeurent grand ouvertes jusqu’au premier bain du nouveau-né. Cette exposition pénible est finalement une protection : la jeune créature est imprégnée de lumières, de bruits et d’ombres. Il en est ainsi depuis la naissance du Temps : seule la Vie nous défend du vivre.

En ce matin de janvier 1895, les fenêtres que j’avais laissées ouvertes laissèrent croire qu’un enfant venait de naître. Une fois de plus, j’avais rêvé que j’étais mère et une odeur de nouveau-né imprégnait toute la maison. Progressivement, j’entendis le bruit traînant et syncopé d’un balai. Je n’étais pas la seule à me réveiller. Cette douce rumeur réveillait la maison entière. C’était notre mère qui prenait soin de nettoyer la cour. J’allai à la porte et restai à la regarder, élégante et maigre, dans un balancement voûté comme si elle dansait et, ainsi, devenait poussière.

Les Portugais ne comprennent pas notre soin à balayer autour des maisons. Pour eux, seul balayer l’intérieur des édifices a un sens. Il ne leur vient pas à l’esprit de passer le balai sur le sable du terrain. Les Européens ne comprennent pas : pour nous, l’extérieur est encore l’intérieur. La maison ce n’est pas l’édifice. C’est le lieu béni par les morts, ces habitants qui ignorent portes et murs. C’est pour cela qu’on balaye le terrain. Mon père n’a jamais été d’accord avec cette explication, trop recherchée selon lui.

— On balaye le sable pour une autre raison, bien plus pratique : nous voulons savoir qui est entré et sorti pendant la nuit.

Ce matin-là, l’unique empreinte était celle d’un simba, ces félins qui, dans le silence de la nuit, flairent nos poulaillers. Ma mère alla vérifier les poules. Aucune ne manquait. L’insuccès du félin s’ajoutait à notre échec : à la vue de l’animal, il était aussitôt chassé. La peau tachetée des genettes était convoitée comme marque de prestige. Il n’y avait pas de plus beau cadeau pour plaire aux grands chefs. Surtout aux commandants de l’armée ennemie qui s’ornementaient jusqu’à perdre leur forme humaine. C’est à cela que servent les uniformes : à éloigner le soldat de son humanité.

Le balai corrigea fermement l’audace nocturne. Le souvenir du félin s’effaça en quelques secondes. Puis ma mère prit par les sentiers pour recueillir l’eau du fleuve. Je restai à la regarder s’évanouir dans la forêt, élégante et droite dans ses tissus bariolés. Ma mère et moi étions les seules femmes à ne pas mettre les sivanyula, les pagnes en écorce d’arbre. Nos vêtements, achetés à la cantina* du Portugais, couvraient nos corps mais nous exposaient à la jalousie et à la convoitise des hommes.

Quand elle arriva au fleuve ma mère frappa dans ses mains, demandant la permission de s’approcher. Les fleuves sont les demeures des esprits. Penchée sur la rive, elle examina son bord pour se prémunir de l’embuscade d’un crocodile. Tout le monde dans le village croit que les grands lézards ont des « maîtres » et qu’ils obéissent uniquement à leurs ordres. Chikazi Makwakwa recueillit l’eau, le bec de la cruche tourné vers l’embouchure pour ne pas contrarier le courant. Alors qu’elle s’apprêtait à rentrer à la maison, un pêcheur lui offrit un beau poisson qu’elle emballa dans un tissu qu’elle portait noué à la taille.

Tout près de la maison l’imprévu se produisit. De la brousse épaisse fit irruption un groupe de soldats vanguni. Chikazi recula de quelques pas tout en pensant : j’ai échappé aux crocodiles pour me jeter dans la gueule de monstres encore plus féroces. Depuis la guerre de 1889, les troupes de Ngungunyane ne rôdaient plus sur nos terres. Quelques années durant, nous avions goûté la Paix, pensant qu’elle durerait toujours. Mais la Paix est une ombre sur un sol de misère : il suffit que le Temps advienne pour qu’elle disparaisse.

Les soldats cernèrent notre mère et virent aussitôt qu’elle les comprenait quand ils parlaient en txizulu. Chikazi Makwakwa était née en terres du sud. Sa langue d’enfance était très proche de celle des envahisseurs. Ma mère était une Mabuingela, ceux qui marchent en tête pour nettoyer la rosée des hautes herbes. C’était le nom que les envahisseurs donnaient aux gens dont ils se servaient pour ouvrir les chemins dans la savane. Mes frères et moi étions le produit de ce mélange d’histoires et de cultures.

Des années plus tard, les intrus revenaient avec la même arrogance menaçante. Rasseyant des peurs ancestrales, ces hommes cernaient ma mère avec l’étrange ivresse que les adolescents n’éprouvent qu’à la force du nombre. Le dos tendu de Chikazi soutenait, avec vigueur et élégance, la charge d’eau sur sa tête. Elle affichait ainsi sa dignité contre la menace des étrangers. Les soldats perçurent l’affront et sentirent, encore plus vive, l’urgence de l’humilier. Sur-le-champ ils renversèrent la cruche et célébrèrent en criant la façon dont elle se brisa sur le sol. Et ils rirent, en voyant l’eau tremper le corps maigre de cette femme. Puis les militaires déchirèrent sans effort ses vêtements, depuis longtemps transparents et râpés.

— Ne me faites pas de mal, implora-t-elle. Je suis enceinte.

— Enceinte ? Avec tout cet âge ?

Ils examinèrent la petite proéminence sous les tissus, où elle gardait secrètement le poisson offert. Et, à nouveau, le doute lui fut craché au visage.

— Enceinte ? Toi ? Combien de mois ?

— Je suis enceinte de vingt ans.

Voilà ce qu’elle eut envie de dire : que ses enfants n’étaient jamais sortis d’elle. Qu’elle gardait dans son ventre ses enfants tous les cinq. Mais elle se retint. Elle glissa plutôt ses mains sous ses vêtements en quête du poisson enveloppé. Les soldats la regardèrent parcourir les endroits secrets de son corps sous son pagne, que nous appelons capulana. Sans que nul ne s’en aperçût, elle saisit de sa main gauche la proéminente épine dorsale du poisson et l’utilisa pour couper le poignet de sa main droite. Elle laissa le sang couler puis elle entrouvrit les jambes comme si elle accouchait. Elle retira le poisson de sous les tissus comme s’il émergeait de ses entrailles. Ensuite, elle brandit le poisson dans ses bras couverts de sang et proclama :

— Voici mon fils ! Mon petit garçon est né !

Les soldats vanguni reculèrent, épouvantés. Ce n’était pas une simple femme. C’était une noyi, une féticheuse. Et elle n’aurait pu engendrer de descendance plus sinistre. Un poisson était, pour les occupants, un animal tabou. À l’animal interdit s’ajoutait, à cet instant, la plus grave des impuretés : du sang de femme, cette souillure qui pollue l’Univers. Cette huile épaisse et sombre coula le long de ses jambes jusqu’à obscurcir la terre tout autour.

Le récit de cet épisode perturba les troupes ennemies. On dit que beaucoup de soldats désertèrent, redoutant le pouvoir de la féticheuse qui accouchait de poissons.

 

Et ce fut les vêtements et l’âme déchirés que ma mère se présenta à la maison autour de midi. Sur le seuil elle raconta le survenu, sans pleurs ni émotion. Le sang gouttait de son poignet comme si le récit était épelé goutte à goutte. Mon père et moi l’écoutions sans savoir comment réagir. À la fin, se lavant les mains, ma mère murmura d’une voix méconnaissable :

— Il faut faire quelque chose.

Mon père, Katini Nsambe, fronça le sourcil et argumenta : rester tranquille et se taire était la meilleure façon de répondre. On était une nation occupée et il convenait de passer inaperçus. Nous, les Vatxopi, avions perdu la terre qui était la nôtre et celle de nos ancêtres. Bientôt les envahisseurs fouleraient le cimetière où nous enterrions les placentas et les étoiles.

Ma mère réagit fermement : C’est la taupe qui vit dans le noir. Mon père secoua la tête et riposta en sourdine :

— J’aime le noir. Dans le noir on ne remarque pas les défauts du monde. Une taupe, c’est ce que j’ai toujours rêvé d’être. Vu l’état du monde, on ne peut que rendre grâce à Dieu d’être aveugles.

Agacée, ma mère soupira bruyamment tandis qu’elle se penchait sur le feu pour remuer l’ushua*. Elle mouilla le bout de son doigt, faisant mine de tester la chaleur de la marmite.

— Un jour, je serai comme la taupe. Toute la terre me recouvrira, chuchota mon père avec une peine anticipée du destin annoncé.

— Ça, ce sera le cas de tout le monde, dit mame.

— Bientôt je partirai aux mines. Je vais faire comme mon père, je vais m’en aller d’ici et faire ma vie en Afrique du Sud. C’est ça que je vais faire.

Ce n’était pas une annonce. C’était une menace. Il retira de sa poche une pincée de tabac et une vieille feuille. Avec des soins méticuleux, il se mit lentement à rouler une cigarette. Aucun noir dans tout le village ne pouvait se vanter de fabriquer ainsi ses propres cigarettes. Il était le seul. Avec un air de roi, il s’approcha du feu et prit une braise pour allumer sa cigarette. Puis, très droit et le menton levé, il souffla la fumée sur le visage indifférent de son épouse.

— Toi, ma Chikazi chérie, tu insultes les taupes sachant que cela offense mon défunt père.

Ma mère fredonna une vieille chanson, un ngodo traditionnel. C’était une lamentation de femme, se plaignant d’être née déjà veuve. Froissé, mon père se retira bruyamment.

— Je m’en vais d’ici, déclara-t-il.

Il voulait montrer qu’il était blessé, sa femme n’était pas la seule qui saignait. Il se sépara de son ombre même et se retrancha auprès de la grande termitière ; il croyait, par son absence, se rendre plus visible.

Après, on le vit encore faire le tour de la maison pour, enfin, s’éloigner en direction de la vallée. La faible incandescence de sa cigarette s’éteignit peu à peu dans le noir, comme si c’était la dernière des lucioles de ce monde.

 

Nous restâmes assises, ma mère et moi, à tricoter des silences dont seules les femmes sont capables. Ses doigts maigres ratissaient le sable comme s’ils confirmaient une intimité avec le sol. Sa voix avait un accent de terre quand elle demanda :

— Tu as rapporté du vin, de chez le Portugais là-bas ?

— Il reste encore quelques bouteilles. Vous avez peur que tate vous batte ?

— Tu sais comment c’est : il boit, il tape.

Mystère sans entendement : la façon dont mon père conciliait en lui tant d’âmes opposées. Sobre, sa délicatesse était celle d’un ange. Dans le brouillard de l’alcool, il se transformait en la plus maléfique des créatures.

— C’est incroyable comment tate ne s’est jamais douté que vous mentiez.

— Et je mens ?

— Bien sûr que vous mentez. Quand il vous bat et que vous pleurez de douleur. Vous ne mentez pas ?

— Cette maladie est un secret, ton père ne doit pas soupçonner. Quand il me bat, il croit que mes larmes sont vraies.

La maladie était congénitale : Chikazi Makwakwa ne ressentait pas la douleur. Ses mains et ses bras, marqués par des séries de brûlures, déconcertaient son mari. Il croyait cependant que cette insensibilité résultait des amulettes commandées à sa belle-sœur Rosi. Moi seule savais que c’était une infirmité de naissance.

— Et l’autre douleur, mame ?

— Laquelle ?

— La douleur de l’âme.

Elle rit, haussant les épaules. Quelle âme ? Quelle âme lui restait-il après la mort de deux filles et le départ de ses deux fils ?

— Votre mère aussi était battue ?

— Grand-mère, arrière-grand-mère et arrière-arrière-grand-mère. C’est comme ça depuis que la femme est femme. Prépare-toi à être battue toi aussi.

Une fille ne conteste pas les certitudes des anciens. J’imitai son geste et dans le creux de ma main, je retins une poignée de sable que je laissai ensuite filer en ruisselet. Ce sable rouge était, dans la coutume de notre peuple, la nourriture des femmes enceintes. Le gâchis de mon existence s’écoulait entre mes doigts. Chikazi Makwakwa interrompit mes pensées :

— Tu sais comment est morte ta grand-mère ? Et elle n’attendit pas la réponse : Foudroyée par un éclair. C’est comme ça qu’elle est morte.

— Et pourquoi pensez-vous à ça maintenant ?

— Parce que c’est comme ça que je veux mourir aussi.

C’était son dénouement désiré : sans corps, sans poids, sans reste à ensevelir. Comme si une mort non soufferte éteignait la souffrance de toute une vie.

 

Toutes les fois qu’une tempête éclatait, notre mère sortait en courant dans les champs et restait là, les bras levés, imitant un arbre sec. Elle attendait la décharge finale. Cendres, poussières et suie : c’était ce qu’elle rêvait de devenir. C’était là son destin désiré : devenir une poudre indistincte, légère, tellement légère que le vent la ferait voyager par le monde. Mon précédent nom trouvait sa raison dans ce désir de ma grand-mère. Voilà ce que ma mère voulut me rappeler.

— J’aime Cendre, dis-je. Cela me rappelle les anges, je ne sais pas pourquoi.

— Je t’ai donné ce nom pour te protéger. Quand on est cendre rien ne peut nous faire de mal.

Les hommes pourraient bien me battre. Jamais personne ne me blesserait. C’était là l’intention de ce baptême.

Ses mains grattaient le sol : quatre rivières de sable filaient entre ses doigts. Je restai silencieuse, ensevelie par la poussière qui sourdait de ses mains.

— Maintenant, va chercher ton père. Il est jaloux de nous.

— Jaloux ?

— De moi, parce que je ne lui donne pas toute mon attention ; de toi parce que tu as été élevée par les prêtres. Tu appartiens à un monde où il ne pourra jamais entrer.

Les hommes sont comme ça, expliqua-t-elle : ils ont peur des femmes quand elles parlent et encore plus peur quand elles se taisent. Je devais comprendre : mon père était un homme bon. Il avait juste peur de ne pas être à la hauteur des autres hommes.

— Ton père est sorti d’ici fâché. Apprends une chose, ma fille. Ce qu’une femme peut dire de pire à un homme, c’est qu’il doit faire quelque chose.

— Je vais chercher tate.

— N’oublie pas le vin.

— Ne vous inquiétez pas, mame. J’ai déjà caché les bouteilles.

— Au contraire, ma fille. Emporte une bouteille, pour qu’il boive !

— Vous n’avez pas peur qu’il vous batte ensuite ?

— Ce vieux têtu ne peut pas dormir dans la brousse. Ramène-le sobre ou soûl. Pour le reste on verra.

Puis ma mère rentra dans sa tristesse, comme un animal domestique regagne son étable. Déjà en chemin, elle dit encore :

— Demande-lui qu’on aille vivre à Makomani, demande-lui qu’on retourne près de la mer. Toi il t’écoute. Demande-lui, Imani, pour l’amour du Ciel !

 

2

Première lettre du sergent

  

Lourenço Marques[3], le 21 novembre 1894
Votre Excellence Monsieur le Conseiller José d’Almeida,

 

L’humble subordonné de Votre Excellence vous écrit, sergent Germano de Melo, détaché pour commander le poste de Nkokolani et représenter les intérêts des Portugais à cette frontière avec l’État ennemi de Gaza. C’est la première fois que j’adresse un rapport à Votre Excellence. Je veillerai à ne pas vous assommer en me restreignant aux faits dont je pense que Votre Excellence doit avoir connaissance.

Je suis arrivé à Lourenço Marques le jour précédent l’attaque de la ville par les rebelles landins*.

Cela a eu lieu à l’aube : des coups de feu ont retenti et en ville, les noirs, les Indiens et les blancs étaient en ébullition. Je me trouvais installé dans la pension d’une Italienne, en plein cœur de la localité. Les hôtes ont frappé à la porte de ma chambre exigeant de moi, à coups de hurlements et de pleurs, que je les défende à l’entrée de l’auberge. Ils m’avaient vu entrer la veille au soir en uniforme et armé. J’étais un ange tombé du ciel pour les protéger. La propriétaire de l’auberge, une Italienne répondant au nom de dona Bianca, a pris la situation en main ; elle a rassemblé les pensionnaires effrayés dans un grenier et les y a enfermés à clé. Puis, elle a fait en sorte que je l’accompagne sur une terrasse d’où l’on voyait la majeure partie de la ville. Ici et là s’élevaient des colonnes de fumée, plus près de l’estuaire retentissaient des coups de feu et des explosions. Il était perceptible que notre opposition à l’invasion des natifs était quasi inexistante.

Très rapidement, l’unique foyer de résistance fut la Forteresse. Les assaillants – qui étaient landins et non vátuas* comme on persiste à le dire dans les parages – manœuvraient librement dans les rues. Après avoir défait toutes les lignes de défense de la ville, ils ont pillé les magasins, mis à sac les marchés, et s’ils n’ont pas tué davantage de gens, c’est qu’ils ne l’entendaient pas de la sorte. Nous, à l’auberge, avons échappé à la razzia des Cafres car ceux-ci croyaient que tous les Portugais s’étaient réfugiés dans la Forteresse.

Depuis la terrasse où nous voyions venir notre fin, j’ai assisté à une scène qui m’a beaucoup impressionné : entre les épais rideaux de fumée ont surgi deux chevaux au galop. Deux Portugais les montaient, l’un en uniforme et l’autre en civil. C’est ce dernier qui a le plus attisé ma curiosité en effet, à cause d’un bras manquant, il se maintenait sur sa monture à la seule force des jambes. De la main qui lui restait, il tenait les rênes et empoignait une arme avec laquelle il tirait plus ou moins au hasard. La propriétaire de la pension l’identifia comme étant Silva le Manchot, un déserteur qui avait fui au Transvaal où il avait été victime d’un accident alors qu’il manipulait une charge de dynamite. Il était revenu au Mozambique et, grâce à des actes de bravoure avérés, on lui avait pardonné son crime de désertion.

À la suite de ce Silva suivait le militaire montant un cheval blanc qui évoluait au trot, beaucoup plus posément. Sitôt la distance installée entre les deux cavaliers, le fringant militaire fut cerné par une horde de noirs brandissant lances et boucliers. Désespéré, l’homme tira plusieurs coups de feu jusqu’à épuisement des balles. Constatant que le cercle se resserrait et pressentant la fin qui l’attendait, le cavalier se tira une balle dans la tête. Effrayé par le coup de feu, le cheval accéléra le trot, en ruades. Plus loin, il ralentit la marche, permettant au cavalier, quasi dépourvu de tête, de se maintenir en selle, le sang coulant à flots comme une source abondante. Et le cheval progressa ainsi lentement jusqu’à disparaître au milieu des brumes. Il me vint à l’esprit que cette marche funèbre se poursuivrait en dehors de la ville et se perdrait dans le sertão* africain jusqu’à ce que le corps du suicidé ne soit guère plus qu’un squelette se balançant sur la selle de l’animal solitaire.

Les tirs de canon me réveillèrent de ces délires funestes. C’étaient nos navires qui, de la baie d’Espírito Santo, bombardaient la localité. C’était là notre dernière défense. Et cela a porté ses fruits, grâce à Dieu. Les Cafres ont fini par reculer, laissant derrière eux une traînée de destruction et de chaos.

Notons, toutefois, le non-sens : pour nous libérer d’un ennemi nous avons dû bombarder notre propre ville, l’une des plus grandes bourgades sur la côte orientale portugaise. La pension où je me trouvais a été victime de l’un de ces boulets de canon. Près du mur détruit, la propriétaire de l’établissement a pleuré de désespoir, sachant qu’elle ne pourrait demander réparation à quiconque pour ces dégâts. Bianca a pleuré si abondamment qu’elle ne s’est pas rendu compte qu’auprès de ce mur détruit gisait le corps d’un soldat portugais. Je me suis agenouillé à ses côtés pour le couvrir d’un linge. Et j’ai vu qu’il avait, tatoué sur l’avant-bras, un cœur traversé des mots : « Amour de mère ! » Ce tatouage m’a davantage ému que la vision du mort.

Votre Excellence disposera de rapports plus concis sur cette disgrâce qui s’est abattue sur Lourenço Marques. Je vous suggère de chercher à connaître les véritables causes qui ont provoqué la révolte des regulados* autour de la ville. Cependant, ne vous en tenez pas aux sources habituelles. J’ai su par des voies détournées que le Commissaire Royal en personne a demandé un rapport au missionnaire suisse du nom de Henri Junod. Ce rapport a été élaboré à partir des témoignages de noirs chrétiens qui invoquent, à l’origine de la révolte, des raisons qui ne nous sont pas très favorables. Je suggère à Votre Excellence de consulter ce rapport.

Quelle que soit la véritable explication, le fait est que j’ai inauguré de la pire manière ma présence en Afrique. Sur la terrasse de l’auberge, l’Italienne m’a fait voir en un rien de temps ce que je soupçonnais déjà : nos possessions que, si pompeusement, nous appelons « Terres de la Couronne », se trouvent vouées à l’incurie et à l’immoralité. Dans la plupart de ces territoires, nous n’avons jamais réellement assis notre présence au cours de ces siècles. Et sur les terres où nous avons marqué notre présence, c’est encore plus grave, nous avons en effet presque toujours été représentés par des proscrits et des criminels. Il n’existe, chez nos officiers, aucune conviction que nous soyons capables de vaincre Gungunhane et son État de Gaza.

Le nouveau commissaire royal, António Enes, a une mission ô combien difficile, cerné par les adversaires et les adversités. Le Commissaire est mal vu par la plupart des militaires, qui lui trouvent la simple compétence d’un civil, de surcroît écrivain et journaliste. De l’autre côté, du Terreiro do Paço à Lisbonne, notre Commissaire n’obtiendra ni appui ni réponse. Les monarchistes sont beaucoup trop occupés à survivre. Et les conseillers militaires que le ministère de la Marine et des Colonies lui ont attribués ne connaissent rien à l’Afrique. Heureusement que nous avons des personnes comme Votre Excellence, avec des années d’expérience au Mozambique, en Angola et en Guinée. Je vous demande, en toute humilité, de ne pas me laisser sans votre conseil permanent et précieux.

À cause de toutes ces inquiétudes, je pars à Nkokolani avec le cœur serré, à plus de cinq cents milles d’ici, dans ce vaste sertão d’Inhambane. J’espère que les promesses de transformer ce poste inachevé en véritable caserne seront tenues. Et j’ai foi qu’on m’envoie un contingent d’angolas* afin que je puisse exercer mes fonctions rapidement et parfaitement.

L’Italienne – qui connaît intimement bon nombre de nos officiers – m’a dit que je devais oublier les promesses qui m’ont été faites. Car, d’après elle, je ne suis un militaire qu’en apparence. Pour en arriver à cette certitude, la sérénité de mon regard lui a suffi, selon ses dires. Son inconstance mise à part, la vérité est que dona Bianca a formulé d’autres raisons à son jugement hâtif. Elle m’a demandé de qui je relevais et j’ai pris la liberté de lui dire que le Conseiller José d’Almeida était le supérieur à qui je rendais des comptes. Elle a ri. Et a ensuite commenté avec un certain cynisme : Vous ne tirerez jamais un coup de feu. Et vous aurez de la chance si on ne vous tire pas dessus !

Et elle a ajouté qu’elle connaissait d’autres cas où le poste militaire promis s’était fait éternellement attendre. Au moment de partir, l’Italienne a promis de me rendre visite à Nkokolani. Elle ferait ce voyage car elle savait que Mouzinho avait été détaché dans le régiment d’Inhambane. Elle désirait revoir ce cavalier, comme si sa vie n’avait pas d’autre destin.

J’ai pensé à la prophétie de Bianca et je crains qu’elle n’ait un certain fondement. Tout le monde ici connaît mon passé républicain, tout le monde connaît la raison de ma présence en terres africaines. Ma participation à la révolte du 31 janvier, dans la ville de Porto[4], n’est pas non plus un secret pour dona Bianca. Je ne peux pas me plaindre de la peine qu’on m’a infligée, devant le verdict réservé à la majorité des insurgés, incarcérés à perpétuité. Dans mon cas, ils ont opté pour la déportation dans le sertão reculé d’Inhambane. Ils ont misé sur l’espoir que j’y trouverais une prison sans barreaux et donc plus asphyxiante que n’importe quelle autre geôle. Ils ont eu, néanmoins, la prudence de me confier une fausse mission militaire. L’Italienne a entièrement raison : à l’intérieur de cet uniforme il n’y a pas de soldat. Il y a un proscrit qui, malgré tout, accepte la charge de ses devoirs. Je n’ai pourtant aucune raison de donner ma vie pour ce Portugal mesquin et vieilli. Pour ce Portugal qui m’a fait quitter le Portugal. Ma patrie est autre et elle est encore à naître. Je sais combien ces effusions outrepassent le ton qui devrait guider ce rapport. Mais j’espère que Votre Excellence comprendra la solitude absolue dans laquelle je me trouve et comment cet isolement commence à m’ôter la capacité de discernement.

Uniquement en guise de remarque finale : ce matin, le commissaire royal m’a reçu au cours d’un bref entretien de courtoisie. Bien qu’avare de ses mots, le commissaire António Enes a confié qu’il s’appuyait sur deux cadres de confiance qu’il a choisis pour travailler au Mozambique : le capitaine Freire de Andrade et le lieutenant Paiva Couceiro. Il en est même venu à annoncer qu’immédiatement après notre rencontre, ses deux fidèles conseillers et lui allaient tracer ledit Plan d’Action pour les Districts du sud de la colonie. Ni Ayres de Ornelas ni Eduardo Costa n’ont été conviés. J’ai trouvé dans ce détail matière à porter à la connaissance de Votre Excellence.

Bien que soucieux, la joie a brillé un instant sur le visage d’António Enes, en un scintillement très bref derrière ses lunettes qui ne dissimulent pas le léger strabisme dont il souffre. Cette joie est devenue patente quand il a exhibé un télégramme de Paiva Couceiro révélant que la localité de Marracuene avait été rebaptisée Vila Luiza, en hommage à la chère fille du Commissaire. Le même éclat s’est allumé dans son âme quand il a rappelé que, plus au nord, nous avions fondé un hameau du nom de la reine Dona Amélia. À ce qu’il semblerait, parmi toutes les personnalités de Lisbonne, seule la reine se soucie d’encourager le commissaire livré à lui-même. De notre roi et d’autres éminences lisboètes ne parvient pas un mot de réconfort. Pauvre royaume que le nôtre qui ne règne ni ici ni au Portugal. Pauvre Portugal.

Pardonnez, Excellence, ce long et triste cortège de confessions d’ordre personnel. Je pense que vous comprendrez que je vois en Votre Excellence la figure tutélaire d’un père qui, je l’avoue, m’a toujours manqué.

 

Mia Couto, Les Sables de l’empereur, traduction du portugais (Mozambique) par Elisabeth Monteiro Rodrigues, © Éditions Métailié, 2020.

En librairie le 9 janvier.

 

* Glossaire (extrait)

Angolas ou mangolês : soldats recrutés de force an Angola pour incorporer les troupes portugaises.

Cantina : petit établissement colonial servant à la fois de boutique et de débit de boissons installé dans la brousse ou dans les faubourgs des villes, tenu par les Portugais ou les Indiens.

Landim (pluriel Landins) : nom donné par les Portugais aux habitants de Lourenço Marques (aujourd’hui Maputo) quel que soit le groupe ethnique. Littéralement « ceux qui parlent un dialecte ».

Mafurreira : Trichilia emetica. Arbre très répandu dans toute l’Afrique tropicale. Du beurre et de l’huile sont fabriqués à partir de ses graines.

Regulado : territoire d’une chefferie traditionnelle sous l’autorité d’un régulo dans une circonscription.

Sertão : ce mot est utilisé ici par les Portugais, qui désignaient ainsi les terres de l’intérieur du Brésil, pour nommer la brousse ou la savane.

Ushua : bouillie de farine de maïs, de sorgho, de mil ou de manioc.

Vanguni : il s’agit ici des peuples zoulous ; à l’époque de l’empe- reur Ngungunyane. Les Portugais les appellent les Ngunis ou VaNguni.

Vátua : nom donné par les Portugais aux Vanguni, Ngunis ou VaNguni.


[1]. Tous les mots suivis d’un astérisque figurent dans le glossaire en fin d’ouvrage. Sauf indication contraire, toutes les notes sont de la traductrice.

[2]. Les noms de Ngungunyane, ou Gungunhane dans sa forme portugaise, seront utilisés tout au long des trois volumes en fonction de l’origine des locuteurs, Africains ou Portugais, pour mentionner toujours le roi de Gaza. (NdA)

[3]. Aujourd’hui Maputo.

[4]. 31 janvier 1891 : révolte des républicains contre la monarchie.

Mia Couto

Écrivain

Notes

[1]. Tous les mots suivis d’un astérisque figurent dans le glossaire en fin d’ouvrage. Sauf indication contraire, toutes les notes sont de la traductrice.

[2]. Les noms de Ngungunyane, ou Gungunhane dans sa forme portugaise, seront utilisés tout au long des trois volumes en fonction de l’origine des locuteurs, Africains ou Portugais, pour mentionner toujours le roi de Gaza. (NdA)

[3]. Aujourd’hui Maputo.

[4]. 31 janvier 1891 : révolte des républicains contre la monarchie.