Nous aimons la guerre
Nous aimons la guerre, que ce soit chez nous ou chez les autres
Nous aimons les films de guerre
Nous aimons encore plus les actualités de guerre
Nous parlons avec respect des correspondants de guerre
Nous aimons voir les explosions au ralenti
Nous aimons voir les flammes et les malheureux qui essaient de les éteindre
Nous aimons les annonces faisant état du nombre des morts
Nous aimons plaindre au loin les blessés et les veuves
Nous aimons frissonner au spectacle du malheur
Nous aimons les images qui montrent des flaques noires de sang
Nous admirons la vaillance des chefs de guerre
Nous admirons leurs discours enflammés
Nous scrutons volontiers les cartes montrant les rapports de force
Nous aimons prendre parti pour un des camps
Nous aimons haïr l’ennemi des autres qui devient aussitôt notre ennemi
Nous nous régalons de commentaires éclairés sur la guerre chez les autres
Nous répétons volontiers des phrases définitives sur l’ignominie de l’ennemi
Nous aimons la diversité des paysages de guerre comme nous aimons les images du Tour de France
Nous aimons les séquences qui nous présentent en parallèle l’avant tranquille et l’après incendié
Nous voyons d’un œil non critique les crétins qui nous gouvernent coiffer un casque de fantassin et un gilet pare-balles
Nous aimons leur cirque télévisuel soi-disant imposé par les circonstances
Nous aimons la voix essoufflée des correspondants de guerre parfois accroupis derrière un mur pendant que plus loin on étripe
Nous aimons compatir et nous sommes fiers de ne pas être les seuls à le faire
Nous aimons nous étonner quand dans un pays en guerre les récoltes continuent avec la fumée des bombes à l’horizon
Nous aimons nous interroger à ce sujet et donner notre avis sur les paradoxes du temps de guerre
Nous apprenons les noms de canons, d’obusiers, de lance-missiles, et nous aimons étaler là-dessus nos connaissances
Nous aimons grimacer d’indignation devant les images sinistres qui exposent les crimes de l’ennemi
Nous aimons vérifie