Politique

« Égoïstes, imbéciles, illuminés, poujadistes, vulgaires » : les Gilets Jaunes vus depuis une certaine haute fonction publique

Haut-fonctionnaire

Plutôt que de prendre au sérieux les attaques dont elles font l’objet, les élites dirigeantes se sont trop souvent contentées de faire la sourde oreille, pointant la vulgarité et la désorganisation des Gilets Jaunes. Cette réaction, indigne de la haute fonction publique, ne fait qu’aviver l’ire populiste et met véritablement en péril la démocratie, les forces autoritaires récupérant à leur compte la ferveur militante.

Après plusieurs semaines d’une mobilisation qui a plongé notre pays dans une crise dont l’ampleur n’a d’égale que l’incertitude qui prévaut s’agissant de ses débouchés possibles, il n’est pas sans intérêt d’observer l’énergie employée par certains observateurs pour discréditer le mouvement des Gilets Jaunes. La virulence de certains discours tenus dans le monde feutré de la haute fonction publique est particulièrement notable, parce qu’elle vient de certains de ceux qui revendiquent habituellement, à l’appui de leur bonne conscience, leur souci de l’intérêt général et du service des citoyens.

Parmi eux, nombreux sont ceux qui s’empressent de partager sur les réseaux sociaux et auprès de leurs collègues leur analyse d’une aveuglante clarté. Égoïstes, imbéciles, marginaux, brutaux, voyous, violents, fascistes, anarchistes, réactionnaires, illuminés, passéistes, poujadistes, amateurs, naïfs, primaires, vulgaires, et voici les Gilets Jaunes rhabillés pour l’hiver qui vient. De la diversité de leurs parcours, de leurs situations, de leurs motivations et de leurs revendications, ces analystes improvisés n’ont cure : armés d’une vue aussi courte que leur carrière est longue, ils entendent démontrer que cette masse sauvage ne serait composée que de barbares ignorants des réalités économiques, dont il vaudrait mieux pour le bien de tout le monde et en particulier du leur qu’ils laissent les sachants raisonnables gouverner sereinement.

Alors, fermez le ban ?  Il ne suffit pas de mépriser la réalité pour la faire disparaître. Ceux qui prétendent réduire à l’insignifiance cet événement qu’ils n’étaient capables ni de prévoir, ni d’imaginer feignent d’ignorer ses causes profondes. N’en déplaise à ces demi-habiles qui prétendent régler le compte du mouvement en deux coups de mépris de classe, cette éruption de colère s’inscrit dans le temps long, celui d’évolutions économiques et sociales profondes qui se traduisent, pour une part importante des habitants de ce pays, par une pré


[1] Guillaume Duval a ainsi relevé qu’entre 2008 et 2017, avant même l’entrée en vigueur des mesures décidées par la majorité issue des élections de 2017, les principaux impôts et cotisations acquittés par les entreprises ne se sont accrus que de 6,4 % en volume, moins que le PIB, tandis que ceux payés par les ménages augmentaient de 22,3 % et ceux sur la consommation de 18,2 %. https://www.facebook.com/guillaume.duvalaltereco/photos/a.347528705371770/1105512839573349/

David Guilbaud

Haut-fonctionnaire

Mots-clés

Gilets jaunes

Notes

[1] Guillaume Duval a ainsi relevé qu’entre 2008 et 2017, avant même l’entrée en vigueur des mesures décidées par la majorité issue des élections de 2017, les principaux impôts et cotisations acquittés par les entreprises ne se sont accrus que de 6,4 % en volume, moins que le PIB, tandis que ceux payés par les ménages augmentaient de 22,3 % et ceux sur la consommation de 18,2 %. https://www.facebook.com/guillaume.duvalaltereco/photos/a.347528705371770/1105512839573349/