Pour un droit universel à l’hospitalité
L’œuvre d’Ernst Bloch, foisonnante et d’une fragile beauté, est comparable à une toile, ou à un entrelacs de concepts, d’idées et de traces qui sont autant de cordes nouées de façon plus ou moins réticulaire – en réalité une longue exhortation adressée au monde et à l’humanité. Mais quelle sorte de toile s’efforça donc de tisser Bloch sinon la toile de l’espérance, et, au bout du compte, celle de la foi – la foi à l’épreuve de l’espérance et l’espérance à l’épreuve de la foi ?

On ne le sait que trop bien, affirmait-il d’emblée, « les hommes veulent être leurrés » (Le Principe Espérance, p. 522).
C’était le cas en ces années-là – des années de stupidité fonctionnelle et systémique et leur cohorte de corps anonymes, les yeux désormais clos, figés, vaincus ou en mal de respiration, une humanité défaite (Héritage de ce temps, 1978). C’est encore le cas aujourd’hui, alors que les unes après les autres, toutes sortes de bornes sont en passe d’être franchies, et que la voie s’ouvre non sur un quelconque miracle, mais sur ce qui présente tous les traits de l’impossible.
Qui ne le voit point ? Les utopies de la fin ne cessent de fleurir. L’accumulation de doutes et peurs sans soupapes autres que la pulsion du sol et du sang ? Tant de signes avant-coureurs et de présages funestes, à la vérité. Pour certains, l’histoire n’aurait été qu’un immense piège et le compte à rebours aurait commencé. En témoigneraient les territoires abandonnés a la carbonisation et à la dessiccation, les immensités océaniques rendues toxiques et vidées en l’espace d’une génération de leurs « habitants », maints désordres atmosphériques, des villes tentaculaires et à l’air irrespirable où viennent s’entasser des millions de gens.
La Terre serait rentrée dans un cycle radioactif, et au point où en sont les choses, c’est la survie de l’ensemble des espèces (humaines et non humaines) qui serait en jeu. Il est vrai, autour de nous ne cessent de roder divers astres du malheur. Nul n’est désormais à l’abri