Comment analyser l’antisémitisme aujourd’hui ?
Comprendre l’antisémitisme et expliquer sa présence dans la société actuelle nécessite au préalable d’écarter un certain nombre de fausses pistes. Un premier constat s’impose : les analogies avec les années 1930 ne sont guère pertinentes pour comprendre la situation actuelle. La démarche analogique montre toujours, de manière générale, des limites. Elle entrave même souvent l’analyse, en faisant disparaître la recherche d’explications tout comme l’historicisation nécessaire de tout phénomène.

L’antisémitisme était, dans les années 1930, un sentiment largement présent dans la société française, alimenté par de solides et actifs réseaux d’extrême droite. La peur du communisme avait rallié au nationalisme une partie importante des classes moyennes. Même si le poids réel de l’antisémitisme est toujours difficile à mesurer, on dispose d’indicateurs qui montrent des différences notables : la presse de l’époque mais aussi de nombreux ouvrages étalaient dans leurs colonnes un antisémitisme nauséabond, une situation totalement impensable aujourd’hui. L’interdit est aujourd’hui d’ordre moral mais aussi juridique puisque l’arsenal législatif a été renforcé. C’est ainsi la forte présence de cet antisémitisme dans la presse d’extrême-droite des années 1930 qui a incité le gouvernement a promulguer la première loi contre le racisme, le décret-loi du 21 avril 1939, dit « loi Marchandeau ».
La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui réprimait déjà l’injure et la diffamation n’était plus suffisante. Depuis, la législation n’a cessé de se renforcer : au début des années 1970, c’est dans un contexte d’augmentation du nombre d’actes racistes à l’égard des travailleurs étrangers en provenance des anciennes colonies, notamment d’Algérie, qu’est votée la loi Pleven (1er juillet 1972). Elle crée un délit nouveau de provocation à la haine, à la discrimination ou à la violence raciales. L’arsenal législatif est complété par la loi du 13 juillet 1990, dite « loi Gayssot »,