Macron : s’adapter ou ne pas s’adapter ?
Et si la « révolution » portant l’étendard d’un « nouveau monde » s’était pour longtemps enlisée, faute de trouver le bon chemin qui permet de mobiliser tout un peuple, ou au moins une majorité, pour conduire les transformations qu’exige une époque confrontée à des pressions sans précédents ?

De la longue plaidoirie d’Emmanuel Macron le 25 avril 2019, les commentaires extraient une citation pour saisir l’essence de la nouvelle étape que subirait l’actuel quinquennat. Seul le début a beaucoup été commenté, la seconde partie interroge tout autant :
« L’art d’être Français, c’est à la fois être enraciné et universel, être attaché à notre histoire, nos racines mais embrasser l’avenir, c’est cette capacité à débattre de tout en permanence et c’est, très profondément, décider de ne pas nous adapter au monde qui nous échappe, de ne pas céder à la loi du plus fort mais bien de porter un projet de résistance, d’ambition pour aujourd’hui et pour demain. »
Or, cet instant du refus de s’adapter au monde surprend davantage encore que l’imposition d’une fierté nationale. À cet instant très précis, le président semble hésiter entre deux directions : son cap avec sa trajectoire de réformes libérales très convenues, et un conservatisme rebelle aux accents gaulliens.
Nul n’oublie que jusqu’à ces dernières semaines, l’injonction à s’adapter aux mutations du monde était l’évangile du macronisme. Elle va le rester, en dépit de cette entorse dans une phrase d’Emmanuel Macron, incongrue et probablement éphémère. Cette concession de façade n’est pas dans la ligne de sa « révolution » de 2017, ni dans le reste de sa conférence de presse. Éclatant paradoxe, né du chaos de la période ! Changeons donc pour que rien ne change.
Dans son livre « Il faut s’adapter » – Sur un nouvel impératif politique, la philosophe Barbara Stiegler recense les injonctions « à l’adaptation, à rattraper nos retards, à accélérer nos rythmes, à sortir de l’immobilisme, et à nous prémunir de tout ralentissement ». Ce