« Quand on veut la guerre, on assume » : les Gilets Jaunes, le peuple et le sens de l’État

Dans une vidéo visible sur Internet, une femme qui souhaite porter secours à un homme à terre lors d’une manifestation se voit rétorquer par un CRS : « Quand on veut la guerre, on assume. » « Non, non, on ne fait pas la guerre. On manifeste de manière pacifique », lui répond-elle. En effet, c’est l’État qui traite le peuple en ennemi dès lors qu’il est assimilé, par le président, lors de ses vœux[1], à une « foule haineuse ». Qualifié de raciste, d’antisémite, d’homophobe, le peuple s’en prendrait à toutes les institutions censées le représenter ou le protéger – médias, élus, forces de l’ordre. Large spectre populiste d’une « négation de la France » ou, davantage, d’une négation de l’État tel qu’Emmanuel Macron le conçoit et où « haïr » un Juif et un CRS s’équivaut. Or, et jusqu’à preuve du contraire, ni la question des étrangers – et encore moins celle des Juifs – ne structurent ou n’organisent le mouvement dans ses principes, sa subjectivité, ses mots d’ordre.
Mais la peste antisémite est l’ultime opprobre que l’État jette depuis quelques années sur les mobilisations populaires[2], l’opération métonymique consistant à projeter le comportement de quelques-uns à l’ensemble d’un mouvement – migrants livrés à la police, femme voilée insultée, banderole antisémite, saluts hitlériens à l’endroit pour les fascistes old school, à l’envers (les quenelles) pour les new school. Il ne s’agit nullement de minorer ces faits mais de dire qu’un mouvement est politiquement raciste et antisémite ou ne l’est pas. Or, le pétainisme, la guerre d’Algérie puis trente ans de Front national et de lepénisation généralisée de la politique nous ont appris, d’une part, que le racisme et l’antisémitisme n’existent pas à l’état masqué et, d’autre part, qu’ils sont avant tout le fait des États ou des partis, quand bien même – et souvent grâce à l’audience qu’ils donnent à ces idées et représentations dans l’espace public – les gens y adhèrent. Or, jusqu’à ce jour, ce n’est pas le cas d