Mais que font les psychanalystes ?
On connaît la plaisanterie : « Que font deux trotskystes quand ils se rencontrent ? Un schisme. Et deux staliniens ? Une purge ! » On peut avoir l’impression qu’elle vaudrait tout aussi bien pour la psychanalyse, qui ne manque pas de querelles. Rares sont celles cependant qui arrivent jusqu’aux rivages du débat public. Et plus rares encore celles qui le font en ayant pour enjeu une certaine idée de ce qu’est la psychanalyse, de la manière dont elle habite le monde culturel, politique et scientifique, et de ce qu’elle peut y apporter.

Il arrive que des psychanalystes s’expriment, à titre d’experts, comme si la psychanalyse disait ses vérités. Il arrive aussi que la psychanalyse soit attaquée ou défendue au titre de ses bienfaits ou méfaits sur les personnes qui s’y confient. Mais presque jamais les querelles internes à la psychanalyse, les disputes sur sa définition et son sens même, n’arrivent à remplir les colonnes des journaux. Tout se passe comme si celle-ci était devenue une sorte de boîte noire, à prendre ou à laisser.
Cela n’est que le symptôme d’une invisibilisation plus générale de la psychanalyse dans l’espace public. Après avoir été au cœur de la culture intellectuelle et populaire d’une bonne partie du xxe siècle, dans plusieurs régions du monde, la psychanalyse passe pour une vieille tante dont on n’est pas sûr de savoir si elle est toujours vivante ou déjà enterrée. Ainsi, la magnifique exposition du Quai Branly de 2016, Persona, réalisée par deux des plus brillants anthropologues français d’aujourd’hui, pouvait déployer la diversité des dispositifs utilisés par les humains pour capter de la personnalité, et ne pas réserver ne serait-ce qu’un coin de salle pour un minuscule divan…
La psychanalyse était simplement oubliée ; on n’y pense plus. C’est bien dommage. Car, contrairement à ce qu’on imagine parfois, les psychanalystes restent nombreux – et nombreuses ; nombreuses aussi les personnes qui vont les consulter, plus ou moins silencieusement, avec pl