Société

La captive inconnue ou l’ancêtre retrouvée

Ecrivaine

S’il est possible de donner une sépulture au soldat inconnu qui représente tous les combattants français non identifiés, pourquoi ne s’attacherait-on pas à la figure d’une captive inconnue ? La captive inconnue est une aïeule parce que, du fond de la nécropole marine, elle dit comment plusieurs régions du monde entrèrent en relation et continue d’interpeller : Qu’avons-nous fait de sa mort ?

On l’a peu évoqué en raison du climat social agité de l’an passé, mais il est bon de rappeler que la Fondation pour la mémoire de l’esclavage a vu le jour en mai 2019, et que la mise en place au Jardin des Tuileries d’un mémorial en hommage aux victimes de l’esclavage colonial a été annoncée pour 2021. Il faut se réjouir de tous les actes susceptibles d’amener les Français à s’approprier ce pan de leur histoire. Il y a là un double défi : ne pas léguer la douleur aux générations futures et faire en sorte que les personnes ayant dû affronter l’esclavage fassent partie de la famille.

Dès que l’on évoque les déportations transocéaniques de Subsahariens et l’esclavage colonial, nombreux sont ceux qui brandissent le bouclier, parfois le glaive. La définition ethno-raciale qu’ils ont d’eux-mêmes tout en se prétendant aveugles à la couleur, interdit d’inclure dans la parentèle des personnes dont le labeur enrichit le pays et dont les descendants sont des citoyens français.

Ceux qui ne pensent qu’à se défendre lorsque ces sujets sont abordés clament que l’on ne peut chausser les lunettes du présent pour observer le passé[1], que leurs aïeux ne furent pas impliqués dans cette tragédie, que rien de tout ça ne serait arrivé si l’Afrique d’alors n’avait été peuplée uniquement de deux groupes : les trafiquants d’êtres humains et ceux qui attendaient au garde-à-vous la capture puis la déportation.

Pour se dédouaner du crime, on invente une Afrique sans nations, communautés, intérêts économiques, ambitions politiques, rivalités, trahisons, appétits connus de tous les peuples. Et, puisque ce n’était décidément pas un espace humain, un endroit d’où auraient pu venir des membres de la famille, on laisse entendre qu’il n’y eut pas d’oppositions, pas de gouvernants destitués à la suite de complots parce qu’ils refusaient de collaborer, pas de communautés insurgées, pas d’aspiration à la justice et à la liberté. Dans cet espace imaginaire, il n’y aurait pas eu de familles endeuillées par la perte d’êtres chers, pas de couples déchirés, pas de populations déplacées, pas un cri, pas une larme… On reconnaît plus d’intelligence, de sensibilité et de complexité aux bêtes sauvages.

La culpabilité, qui s’exprime dans ces hauts cris refusant la repentance, est parfois l’autre nom d’un narcissisme qui ne tolère pas de voir son image écornée, sa réputation salie.

Il est néanmoins aisé de démontrer que, dans leur immense majorité, les Subsahariens d’autrefois étaient des gens ordinaires auxquels l’histoire s’imposa. Le trafic humain mutila leurs existences. Il planta en eux des traumatismes insoupçonnés, trop souvent tus dans ces aires où s’épancher fut longtemps synonyme de perdre la face. La colonisation se chargerait de parfaire cette œuvre glorieuse. Le continent fut colonisé par les nations esclavagistes d’Europe. Dès lors, l’histoire y fut dite à leur avantage. Ce que l’on savait du passé resta confiné dans les communautés, parfois au sein de cercles restreints, mais la mémoire de la capture ne se perdit pas.

Certaines inimitiés persistent entre Subsahariens, qui se fondent sur un contentieux ancien que les nations post-coloniales tardent à prendre en charge. Les colonisateurs connaissaient l’environnement subsaharien et les rapports entre populations locales. Ils associèrent, au sein de frontières communes, des groupes s’étant affrontés à l’époque du trafic humain et qui n’auraient pas eux-mêmes fait ce choix sans avoir résolu leurs conflits. Au moment où le tourisme mémoriel explose, où l’on invite les Afro descendants à renouer avec la terre originelle, le préalable serait d’apaiser les tensions internes. Le silence subsaharien, induit par la mise en avant de la figure du fournisseur local de captifs et la honte qui en résulte, contribue à effacer les résistances. Il recouvre le vécu de ces millions de gens qui n’eurent pas voix au chapitre et ne bénéficièrent pas du trafic humain.

En France, s’il est vrai que les esclavagistes, les armateurs ou les capitaines de navires constituèrent une petite frange de la nation engagée dans ce qui fut vite une politique d’État, il est tout aussi avéré que les produits coloniaux furent consommés par la population, y compris la plus modeste. Les denrées issues du travail servile entrant dans le quotidien des Français, il fut inconcevable de s’en passer. L’augmentation du prix du sucre à Paris en 1792, résultant de la Révolution haïtienne qui avait commencé l’année précédente, engendra des émeutes. On ne se soucia guère de ceux dont le labeur avait produit ce sucre pour lequel on s’étripait.

L’exemple du sucre est emblématique.

Ceux du coton ou du tabac pourraient aussi illustrer le caractère post-esclavagiste de toute la société française. Que faire de cela aujourd’hui ? La culpabilité n’entre pas dans la réponse. Elle est le plus sûr chemin vers le rejet de l’autre, puisqu’il lui faut tenir à distance tout ce qui la hérisse. La culpabilité, qui s’exprime dans ces hauts cris refusant la repentance, est parfois l’autre nom d’un narcissisme qui ne tolère pas de voir son image écornée, sa réputation salie.

Or, la question de l’image est superficielle, même un peu ridicule. Souhaitons bonne chance à qui voudrait se réclamer d’ancêtres purs. Aucun groupe humain ne résisterait à un examen sommaire en la matière, la particularité résidant ici dans l’industrialisation du crime et dans sa racialisation. Donner congé à la culpabilité donc, et lui préférer un esprit de responsabilité. Cela suppose une capacité d’une part à inscrire son histoire dans la globalité de l’expérience humaine, et d’autre part, à en affronter les spécificités, dans la mesure où l’on a été directement façonné par elles.

Pour un pays tel que la France, qui compte des populations issues de ce crime contre l’humanité, la question est celle de l’identification de la nation à ces groupes. La France a-t-elle assimilé l’histoire qui l’unit à eux ? Il suffit d’une allusion à la manière dont ils devinrent français pour que les chantres de la cécité à la race se perçoivent comme blancs, essentiellement. Confrontés au passé esclavagiste du pays, ils ne se reconnaissent que dans les traits du criminel, ce qui est source d’un inconfort qu’il faut à toute force répudier. S’ils poursuivent tout de même la conversation, c’est pour s’enorgueillir de l’abolitionnisme français, s’y cramponner comme un naufragé à un radeau de fortune, car il est impossible d’évoquer les abolitions sans mentionner ce à quoi elles vinrent mettre un terme et les luttes qui les provoquèrent. Il est malhonnête d’évoquer les abolitions sans rappeler qu’elles se firent aussi dans la perspective d’une colonisation de l’Afrique[2].

L’attitude la plus conforme à la cécité raciale que l’on prône et à l’idéal républicain de la France, consisterait à s’identifier à celles et ceux qui, lors de la période esclavagiste, incarnaient le mieux les valeurs françaises. Celles et ceux dont le vécu fut une quête inlassable de liberté, d’égalité, de fraternité. Celles et ceux qui n’eurent pas besoin de théoriser ces questions parce qu’elles leur étaient vitales. Dire cela revient à interroger la centralité de la question raciale dans un pays qui prétend la récuser. Cela amène aussi à questionner les notions d’héroïsme et de grandeur telles qu’elles s’imposent encore. Les grands hommes de l’histoire de France sont blancs. Ce sont les bâtisseurs d’empires, les conquérants, les monarques solaires et leurs ministres[3]. Lorsque des artistes ou des intellectuels sont admis dans le cercle, leur œuvre est vue comme donnant une expression à cette civilisation vouée à éblouir la galaxie. La domination est aussi symbolique et épistémologique.

Les personnes mises en esclavage apparaissent comme déchues, marquées au fer rouge de l’impuissance. Peu importe qu’elles n’aient pas érigé leur existence sur la souffrance d’autrui, elles symbolisent l’échec dans sa crudité la plus extrême. L’identification spontanée à la figure de l’esclavagiste confirme que la fabrication des races, leur hiérarchisation, furent et demeurent une tentative de s’affranchir de la vulnérabilité inhérente à la condition humaine. L’invention des races eut pour visée d’assigner à chacun une place au monde. Le malaise suscité par la culpabilité émane autant de la conscience des crimes commis que du besoin de rester associé au pouvoir. Même destructeur – et parce qu’il a prouvé sa compétence en la matière –, il apparaît comme un rempart contre toute menace.[4]

On est d’ailleurs peu désireux de renoncer aux ressources acquises grâce à cette conception du pouvoir. L’identification au phénotype plus qu’aux valeurs, quand bien même ces dernières continuent d’être professées à gorge déployée, parle d’un avilissement consenti, du fait que la diffusion de représentations et de discours négatifs a permis l’obtention de ce consentement. C’est ici que s’élèvent les protestations de ceux qui tiennent à rappeler que les puissances esclavagistes d’Europe de l’ouest furent aussi les premières sur le front des abolitions. Pour évaluer la pertinence de cet argument, il convient de ne pas se limiter à la situation des territoires où fut pratiqué l’esclavage colonial. On verrait que l’abolition de l’esclavage se fonda aussi sur l’intention de mettre les Subsahariens au travail chez eux, y compris par la contrainte.

Il revient aux responsables d’institutions culturelles et patrimoniales, aux enseignants et aux médias, de poser sur ceux qui eurent le statut d’esclaves un regard déterminé par les principes plus que par la couleur ou l’origine.

C’est en 1946 que la France mit un terme au travail forcé dans ses colonies d’Afrique occidentale. Les faits interdisent de dissocier l’abolition de la colonisation qui constitua une alternative à l’esclavage. Il n’y a donc pas à tergiverser en ce qui concerne le regard que l’on devrait porter sur celles et ceux qui, déjouant le projet de déshumanisation que l’on avait eu pour eux, ne se laissèrent pas réduire à l’esclavage. Dans la société française actuelle, où la multi-appartenance est courante, où il est manifeste que les uns sont entrés dans la chair des autres et inversement, où la culture ne se confond pas avec le phénotype et où la verticalité du pouvoir est contestée, l’expérience des esclaves doit être lue avec plus de justesse.

Le racisme sévit encore pour des raisons en partie exposées plus haut. Il revient aux responsables d’institutions culturelles et patrimoniales, aux enseignants et aux médias, de poser sur ceux qui eurent le statut d’esclaves un regard déterminé par les principes plus que par la couleur ou l’origine. Les déportations transocéaniques de Subsahariens se singularisent par divers aspects, et la racialisation en est un parmi les plus importants. Cependant, il est impératif de prendre en considération les humains pour eux-mêmes. En raison de ses valeurs affichées, la France aurait dû montrer l’exemple, de façon claire et résolue. C’est en procédant ainsi que l’on s’appropriera le vécu de celles et ceux sur qui s’exerça un pouvoir inique. Celles et ceux à travers qui l’humanité fut offensée.

La France s’honorerait à les faire siéger parmi les ancêtres de la nation, femmes et hommes dans lesquels tous reconnaissent une part de leur identité. On s’étonne que les zadistes et autres promoteurs d’une société horizontale ne se réfèrent pas aux marrons de la Guyane et de la Réunion, qui furent parmi les premiers, dans l’histoire de France, à proposer des modèles de société non oppressifs. Il est surprenant que les féministes n’aient pas un mot pour les femmes de condition servile qui effectuaient le même travail que les hommes tout en étant, plus que ces derniers, exposées aux appétits sexuels des colons. Elles durent aussi faire face aux exigences de leurs maîtresses dont elles allaitaient les enfants, aux épreuves d’une vie familiale particulière. Leur vécu devrait valablement trouver sa place dans l’étude des marges telle qu’elle s’effectue de nos jours. Les mémoires ouvrières et paysannes du pays devraient aussi mentionner le travail servile.

On objectera qu’une prévalence de l’anonymat, un déficit d’images et de parole compliquent la tâche. L’abolitionnisme français, en effet, s’est exprimé en lieu et place des victimes de l’esclavage, ne diffusant pas leurs témoignages comme ce fut le cas dans l’espace anglophone notamment. D’où l’absence en France de ces « récits d’esclaves » qui abondent ailleurs. Le choix français fut d’abolir par l’oubli, de réconcilier par le silence, de considérer 1848, année de la seconde et dernière abolition, comme l’acte de naissance d’une République assainie, voire rédimée par l’accession à la citoyenneté des affranchis. Celles et ceux qui naquirent, vécurent et moururent dans la servitude furent pourtant nombreux. C’est aussi leur histoire qu’il s’agit de connaître, leur mémoire qu’il faut perpétuer.

L’anonymat dont on fait un écueil n’est pas absolu. Les travaux des historiens mettent en lumière une variété de personnalités, de situations. Et s’il est possible de donner une sépulture au soldat inconnu qui représente tous les combattants français non identifiés, pourquoi ne s’attacherait-on pas à la figure d’une captive inconnue ? J’évoque cette femme qui m’importe. Parce qu’elle n’a pas de nom, elle en a des milliers. Je lui connais plusieurs histoires. Toutes disent des choses simples. La captive inconnue vit le jour en Afrique subsaharienne, une terre comme tout autre, avec sa flore, sa faune, et l’œuvre des humains. On connut le son de sa voix, l’éclat de son rire, sa tête des mauvais jours, la cadence de ses pas, le chant qu’elle fredonnait en faisant ce que faisaient les femmes, toutes, partout.

Elle aima et fut aimée. Elle déplut et détesta. Puis, elle fut arrachée aux siens. Ceux qui la perdirent ne l’oublièrent pas. D’autres la côtoyèrent sur les routes du malheur, dans le navire de déportation où elle s’éteignit. Sa dépouille fut jetée à l’eau. Ses compagnes de traversée se souvinrent toujours d’elle.

Il n’y a là rien qu’une intelligence moyenne ne soit en mesure de saisir. Nul besoin d’être écrivain pour concevoir cela. Nul besoin de nommer cette femme, de savoir comment s’appelait le village subsaharien où elle vécut. Nul besoin de preuves scientifiques. Non seulement le récit est-il plausible, mais il est certain que de tels faits se produisirent un nombre incalculable de fois. La captive inconnue représente les morts sans sépulture des déportations transocéaniques. Suicidés, morts d’épuisement ou de maladie, tués pour s’être révoltés, tous ces anonymes – pour nous – dont le sort funeste lie plusieurs grandes régions du monde : l’Afrique d’où ils venaient, l’Europe qui les emporta, les territoires[5] où vécurent leurs compagnons de traversée.

Se familiariser avec l’histoire permet de se les représenter sans effort, puisque rien d’humain ne nous est étranger.

La France s’est élu des ancêtres qui n’étaient pas biologiquement ceux de tous. Elle ne s’est pas privée de les exporter à l’époque coloniale, convaincue de pouvoir fabriquer du Gaulois en Afrique et ailleurs. L’adoption de la captive inconnue, comme la réhabilitation de ceux qui furent esclaves, serait beaucoup moins artificielle. Elle serait un nécessaire salut aux morts dans le cas des déportés décédés lors de la traversée, et la reconnaissance d’un lien puissant avec des personnes dont les descendants sont aujourd’hui des citoyens français. La captive inconnue n’est pas une référence identitaire au sens strict, elle appartient aux différents territoires unis par le trafic triangulaire. Ce qui s’exprime à travers l’hommage rendu à cette figure, c’est la reconnaissance du caractère meurtrier d’une entreprise dont on tira profit, la valeur accordée aux millions de vies perdues qu’évoque Toni Morrison dans l’épigraphe de Beloved.

La captive inconnue est une aïeule parce que, du fond de la nécropole marine, elle dit comment plusieurs régions du monde entrèrent en relation et continue d’interpeller : Qu’avons-nous fait de sa mort ?

La réhabilitation des esclaves dans la mémoire commune revêt une autre signification. Ici, la question identitaire se pose bel et bien, dans la mesure où les victimes de l’esclavage colonial créèrent des cultures et des arts de vivre qui devraient, comme d’autres, faire partie du patrimoine national.

De façon plus générale, l’histoire des esclavagisés informe sur la résistance, la résilience, l’invention de soi en milieu hostile. Sans nier la souffrance, la blessure et les séquelles de tout cela à différents niveaux, il importe, dans l’appréhension contemporaine et future du sujet, que les témoignages de force, de courage, de créativité et d’élévation de l’esprit apparaissent toujours en contrepoint des aspects douloureux. Parce qu’ils décrivent aussi le réel et, surtout, parce qu’ils restituent aux concernés la capacité d’agir qu’ils surent se donner. Il n’est pas question de gommer la vulnérabilité, mais de montrer qu’elle induisit d’autres modalités de la puissance. Une vision non verticale de l’héroïsme, une conception moins virile de la chose, mettrait en lumière la noblesse de ces existences que l’on voulut dévaluer.

Les Français d’aujourd’hui et de demain n’ont pas à se jucher sur les seules épaules des bâtisseurs d’empires, des colonisateurs, pour pénétrer dans le monde. Ils devraient assumer une identité complexe, revendiquer tous leurs ancêtres, s’intéresser aux relations des uns avec les autres, s’appuyer sur les valeurs qu’ils souhaitent défendre afin de déterminer ceux qui les représentent le mieux. L’histoire d’une nation est un peu celle d’une famille. On n’en a pas choisi les membres mais on est lié à tous, et les raisons pour lesquelles un Jean-Baptiste Colbert est plus révéré qu’un Louis Delgrès se rapportent à une vision néfaste du pouvoir, à un attachement perturbant à l’identité raciale autant qu’à une méconnaissance qu’il importe de corriger.

Le savoir documenté sur les victimes des déportations transocéaniques et de l’esclavage colonial gagne à s’appuyer sur la création artistique pour faire revivre ce dont l’empreinte matérielle a été effacée, redonner chair à des figures parfois anonymes qui méritent une place dans notre souvenir. Se familiariser avec l’histoire permet de se les représenter sans effort, puisque rien d’humain ne nous est étranger. La Fondation pour la mémoire de l’esclavage et toutes les institutions chargées de favoriser une meilleure connaissance de ce chapitre de l’histoire de France ont à privilégier sa transmission aux jeunes générations. Pour elles, et quelle que soit leur origine, l’histoire des déportations transocéaniques et de l’esclavage colonial ne doit pas être un fardeau. Pour qu’il n’en soit pas ainsi, il faudra leur présenter des trajectoires humaines qui méritent le respect, parler de la captive inconnue, notre aïeule à tous, dire que sa disparition exige la fraternité.

 


[1] C’est oublier que l’esclavage fut contesté dans le passé, même en France. Autrement, il n’aurait pas été aboli…

[2] Jean-François Zorn, « L’étrange destin de l’abolition », Autres temps (22), 1989, 54-63.

[3] Il n’y a pas de « grande femme ». Jeanne d’Arc, la seule héroïne nationale, était une adolescente qui entendait des voix et se battait pour son roi. Elle mourut vierge sur le bûcher, et il n’est pas rare qu’on la présente aujourd’hui comme le jouet d’une machination, un pion ayant permis à Charles VII de récupérer le trône.

[4] La légitimation de cette vision du pouvoir est partagée par un grand nombre. Si l’ascendance servile est encore source honte, si tant d’Afrodescendants se sont inventé des ancêtres royaux (donc possesseurs d’esclaves la plupart du temps), si tant de Subsahariens ne rêvent que d’empires ou de pyramides, c’est bien parce que l’on préfère descendre de puissants, même s’ils furent peu vertueux.

[5] Pour la France, ce furent les Amériques (Caraïbe, Guyane) et les îles de l’océan Indien.

Léonora Miano

Ecrivaine

Rayonnages

Société

Mots-clés

Mémoire

Notes

[1] C’est oublier que l’esclavage fut contesté dans le passé, même en France. Autrement, il n’aurait pas été aboli…

[2] Jean-François Zorn, « L’étrange destin de l’abolition », Autres temps (22), 1989, 54-63.

[3] Il n’y a pas de « grande femme ». Jeanne d’Arc, la seule héroïne nationale, était une adolescente qui entendait des voix et se battait pour son roi. Elle mourut vierge sur le bûcher, et il n’est pas rare qu’on la présente aujourd’hui comme le jouet d’une machination, un pion ayant permis à Charles VII de récupérer le trône.

[4] La légitimation de cette vision du pouvoir est partagée par un grand nombre. Si l’ascendance servile est encore source honte, si tant d’Afrodescendants se sont inventé des ancêtres royaux (donc possesseurs d’esclaves la plupart du temps), si tant de Subsahariens ne rêvent que d’empires ou de pyramides, c’est bien parce que l’on préfère descendre de puissants, même s’ils furent peu vertueux.

[5] Pour la France, ce furent les Amériques (Caraïbe, Guyane) et les îles de l’océan Indien.