Qui est prioritaire ? Vaccination et grandeurs sociales
L’épidémie de Covid-19 et la réponse que les autorités politiques et sanitaires lui ont apportée au cours de l’année 2020 et dans les premières semaines de 2021 est une épreuve de justification des grandeurs sociales et de leur inégalité. Une épreuve collective, bien entendu, mais aussi une épreuve individuelle à laquelle chacun d’entre nous a été ou sera confronté plus ou moins directement.
En Europe, en Amérique du Nord et en Amérique Latine, l’épreuve, au double sens d’examen critique et de souffrance, a commencé avec les confinements inégalement stricts qui se sont multipliés à la fin de l’hiver et au début du printemps. Partout, ou presque, l’obligation imposant aux citoyens de rester chez eux – sans que soit mis en place un système public de livraison à domicile des produits de base, à la différence de ce qui avait été fait à Wuhan – s’est accompagnée, de la part des autorités, de l’instauration de restrictions à l’ouverture des commerces, des lieux culturels, des bâtiments publics, d’une partie des transports ou des terminaux qui accueillent les passagers (aéroports, gares).
Des listes d’activités « essentielles » ont donc été établies à l’appui des décrets et des décisions de la puissance publique restreignant les libertés individuelles, afin d’endiguer la propagation du virus, de soulager les services hospitaliers et les secours. Nombre de commentaires ont d’emblée été faits sur le caractère contradictoire et parfois arbitraire de la sélection des commerces et des lieux.
L’ouverture des cavistes et la fermeture des librairies, notamment, ont suscité bien des interrogations, autour de quelques affaires exemplaires, comme celles des librairies Autour d’un livre à Cannes ou De beaux lendemains à Bagnolet. La situation des grandes surfaces a aussi été l’objet de controverses, d’une « subtile niaiserie » souvent, pour reprendre une expression qu’Érasme utilise dans l’Éloge de la Folie (1509) à propos des théologiens scolastiques, en particulier lorsqu