Entre mers et forêts : la possibilité de la vie dans les marges
La mer, dans le contexte de la crise environnementale, est vue comme un nouvel eldorado, un capital maritime et littoral à conquérir en vue d’une économie bleue durable.
Moins artificialisée que les terres, elle supporte néanmoins 90 % du trafic marchand et 99 % de la circulation de l’information via les câbles sous-marins, et figure ainsi comme le support principal de la mondialisation des échanges. Elle fait l’objet de tous les fantasmes de développement d’une croissance qui soit soutenable, venant se substituer à l’érosion des ressources et des matières premières terrestres.

De longue date, l’océan a été nourricier ; il constitue aujourd’hui un véritable front pionner pour les États et les sociétés qui investissent dans la prospection des métaux rares, du pétrole et des énergies marines renouvelables. Au nom de la « croissance bleue », à présent revendiquée par tous les États, nos mers « libres » pourraient devenir très occupées tant les appétits sont considérables, et cette poussée vers le large n’est pas sans conséquence sur la dégradation de la biodiversité marine, en grande partie encore méconnue.
La découverte de nouvelles richesses et les besoins de suprématie sur le monde génèrent depuis une trentaine d’années un empressement à accaparer les droits d’usages, de maîtrise du sol et de la circulation. Le droit de la mer s’est ainsi instauré sur la délimitation d’espaces marins et des droits et devoirs des États sur ces espaces. Anciennement régie par des droits coutumiers et considérée comme espace de liberté et de non-droit (au-delà de la portée d’un coup de canon, soit trois milles nautiques – 4,80 km environ, ndlr), la mer au cours du XXe siècle se définit par de nouvelles frontières (droit commun de la mer affirmée par les conventions de Genève en 1958 et de Montego Bay en 1982).
L’espace océan ne supporte pas ces frontières pour autant. Sa nature fluide reste réfractaire aux limites, aussi les frontières marines sont extrapolées depuis des repè