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Guerre en Ukraine : les échos du Mandchoukouo

Historien

L’invasion de la Mandchourie par le Japon en 1931 nous donne de précieuses clés pour interpréter le conflit russo-ukrainien. En prétextant de la nécessaire « dénazification » et du danger de l’OTAN, la guerre menée par Vladimir Poutine résonne avec l’entreprise d’expansion japonaise. Cette dernière avait au demeurant rencontré de trop faibles et tardives sanctions, et préfiguré les futures conquêtes japonaises…

Cette guerre en Ukraine fait penser à la Guerre froide, mais elle nous plonge aussi dans les années 1930. Elle nous rappelle tout d’abord la guerre en Finlande des Soviétiques en 1939. Le 14 mars dernier, l’historien finlandais Kimmo Rentola (dans le quotidien L’Opinion), montrait des « similitudes symboliques » – une démocratie attaquée par une dictature – entre les deux conflits, mais aussi et surtout des différences notables. Cette « guerre d’hiver », entre 1939 et 1940 – qui a connu une revanche avec la « guerre de continuation » aux côtés de l’Allemagne nazie de la Finlande de 1941 à 1944 –, était fondée sur la volonté de redessiner les frontières.

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De la même manière qu’en Ukraine, les Russes inventent un faux prétexte pour justifier cette invasion qui n’est jamais présentée comme une « guerre » à l’opinion publique (le ministre des Affaires étrangères soviétiques Viatcheslav Molotov affirme même que ses avions ne lâchent que de la nourriture… et pas des bombes). De fait, la désinformation a été omniprésente pendant les quelques mois de l’invasion (comme aujourd’hui en Russie), masquant le fait que l’armée rouge patine dans le grand froid finlandais avec un équipement peu adapté face à la mobilisation forte des Finlandais. Au final les Russes occuperont 1/10e du pays à l’Est. Mais la comparaison s’arrête-là…

Retour en Chine en 1931…

Au-delà de la Finlande 1939, c’est plus tôt dans la décennie qu’il faut aller chercher une autre « guerre surprise », celle du Japon en Chine en 1931 avec l’invasion de la Mandchourie.

Le scénario semble, sur bien des points, être celui que nous voyons défiler sous nos yeux. En 1931, prenant prétexte du danger de l’URSS, le Japon fabrique une suite d’incidents pour justifier auprès de son opinion publique son offensive et occuper la « province » chinoise. Dans le journal japonais Mainichi Shimbun l’historien Kazunari Hironaka faisait ce parallèle au début de l’offensive russe. Il rappelait les faits, dressait le parallèle


Pascal Blanchard

Historien, Chercheur associé au CRHIM (UNIL)