Écologie

Dé-penser les territoires entre terre et mer

Docteur en sciences de l’environnement, Socio-anthropologue, Docteur en Écologie marine

Les littoraux sont, par essence, des lieux de mosaïques entre terre et mer. Certains font face aux changements déclenchés par nos sociétés modernes avec une certaine plasticité ; d’autres basculent dans des crises. Imaginer des idéaux types de territoires tenant compte de leurs caractères dynamiques permet d’envisager des stratégies pour libérer leur résilience et tracer des trajectoires positives de mutation.

Les littoraux font l’objet de menaces de plus en plus visibles dont les acteurs subissent les conséquences (submersion, recul du trait de côte, salinisation des nappes aquifères).

publicité

Les réponses le plus souvent apportées témoignent d’une non prise en considération de la spécificité des milieux vivants et de leur imbrication avec les humains et leurs activités. Le plus souvent, nous réagissons à ces milieux comme s’ils étaient inertes, un décor ou un support passif de nos actions.

La notion de territoire dans ses usages les plus fréquents annule les propriétés vivantes des sols et des milieux terrestres et marins ainsi que les transactions dont ils sont les sujets avec les humains. L’hétérogénéité des ajustements de ces franges maritimes face aux changements globaux nécessite de réinscrire le territoire dans sa matrice organique et environnementale afin de saisir les qualités qui conditionnent sa durabilité ainsi que les relations dynamiques dont il est l’objet.

Les littoraux sont, par essence, topographiques, des lieux de mosaïques entre terre et mer. Des liens multiples s’y tissent entre le liquide et le solide, entre l’inerte et le vivant, entre l’immobilité et le flux, entre le visible et l’invisible. Certains font face aux changements avec une certaine plasticité et porosité ; ils ont une large marge d’adaptation, de négociation et de recomposition alors que les aléas climatiques et biologiques les transforment sans cesse. D’autres ont moins de plasticité et ils basculent dans des crises passées et à venir, plus violentes, où leur forme et leurs dynamiques sont profondément remises en question par les tempêtes, les sécheresses, les invasions d’espèces, les pollutions, les constructions, etc.

Pour prendre la mesure des changements en cours tant cognitifs que pragmatiques, nous avons pris le parti pris d’imaginer et d’esquisser des idéaux types de territoires tenant compte de leurs caractères et propriétés dynamiques. La construction d’idéaux types de terr


[1] Dans le cadre du projet Termer, soutenu par la Fondation de France, nous avons mené une quarantaine d’entretiens qualitatifs auprès d’acteurs du littoral, traité un questionnaire envoyé à un panel d’élus du littoral français, co-animé des ateliers dans le parc naturel régional du Golfe du Morbihan, et mené des observations de terrain dans le golfe du Morbihan, à Sète, au Grau du Roi, dans la Narbonnaise, dans l’ouest du Cotentin, sur les marais de Brouage, sur Oléron., etc.

[2] Brelet, Claudine. Médecines du Monde, préf. du Dr. André Prost (OMS), Robert Laffont, coll. Bouquins, 2002.

[3] Voir conférence donnée par Bruno Latour sur une redéfinition de la notion de territoire.

[4] Après le changement climatique penser l’histoire, Dispesh Chakrabarty, 2023, Gallimard.

[5] UICN – Comité Français, 2018, « Les Solutions fondées sur la Nature pour lutter contre les changements climatiques et les risques naturels en France ».

[6] Bénédicte Ramade, « Nouvelles de l’outre-terre : récits depuis les profondeurs du monde », Critique d’art, 53 | 2019, 16-28.

[7] Matthieu Duperrex, Voyages en sol incertain : enquête dans les deltas du Rhône et du Mississipi, Marseille : Wildproject, 2019.

[8] Selon John Dewey (Pensée Pluriel, 2013, N°33-34), le pragmatisme s’oppose à la conception utilitariste de l’action et est fortement inspiré par l’épistémologie darwinienne de la transaction où les organismes sont en « continuité ontologique » et transactionnelle avec leur environnement, où « l’homme et le monde, l’intérieur et l’extérieur, le moi et le non moi, le sujet et l’objet, l’individuel et le social, le privé et le public, sont en réalité des participants dans des transactions biologiques et sociales ».

[9] Voir ouvrage de Barbara Stiegler Il faut s’adapter.

[10] L’improvisation est à la fois un processus et un produit, c’est une conduite de l’action en situation d’incertitude. L’objectif visé est une co-création collective, en situation d’attention au milieu. L’improvisation s’in

Charlotte Michel

Docteur en sciences de l’environnement, Consultante ; Chercheuse associée au Laboratoire de recherche en architecture

Bernard Kalaora

Socio-anthropologue, Chercheur à l'IIAC (CNRS, EHESS), ancien président de l’association LITTOCEAN

Yves Hénocque

Docteur en Écologie marine, Conseiller à l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER)

Rayonnages

Écologie

Notes

[1] Dans le cadre du projet Termer, soutenu par la Fondation de France, nous avons mené une quarantaine d’entretiens qualitatifs auprès d’acteurs du littoral, traité un questionnaire envoyé à un panel d’élus du littoral français, co-animé des ateliers dans le parc naturel régional du Golfe du Morbihan, et mené des observations de terrain dans le golfe du Morbihan, à Sète, au Grau du Roi, dans la Narbonnaise, dans l’ouest du Cotentin, sur les marais de Brouage, sur Oléron., etc.

[2] Brelet, Claudine. Médecines du Monde, préf. du Dr. André Prost (OMS), Robert Laffont, coll. Bouquins, 2002.

[3] Voir conférence donnée par Bruno Latour sur une redéfinition de la notion de territoire.

[4] Après le changement climatique penser l’histoire, Dispesh Chakrabarty, 2023, Gallimard.

[5] UICN – Comité Français, 2018, « Les Solutions fondées sur la Nature pour lutter contre les changements climatiques et les risques naturels en France ».

[6] Bénédicte Ramade, « Nouvelles de l’outre-terre : récits depuis les profondeurs du monde », Critique d’art, 53 | 2019, 16-28.

[7] Matthieu Duperrex, Voyages en sol incertain : enquête dans les deltas du Rhône et du Mississipi, Marseille : Wildproject, 2019.

[8] Selon John Dewey (Pensée Pluriel, 2013, N°33-34), le pragmatisme s’oppose à la conception utilitariste de l’action et est fortement inspiré par l’épistémologie darwinienne de la transaction où les organismes sont en « continuité ontologique » et transactionnelle avec leur environnement, où « l’homme et le monde, l’intérieur et l’extérieur, le moi et le non moi, le sujet et l’objet, l’individuel et le social, le privé et le public, sont en réalité des participants dans des transactions biologiques et sociales ».

[9] Voir ouvrage de Barbara Stiegler Il faut s’adapter.

[10] L’improvisation est à la fois un processus et un produit, c’est une conduite de l’action en situation d’incertitude. L’objectif visé est une co-création collective, en situation d’attention au milieu. L’improvisation s’in