Crises du logement et crise de l’immobilier
À l’heure où, comme chaque 1er février, la Fondation Abbé Pierre s’apprête à dénoncer la lancinante question du mal-logement en France, le Premier ministre démontre une fois de plus l’erreur de diagnostic qui fonde la politique du logement au sommet de l’État.
En annonçant dans son discours de politique générale, le 30 janvier 2024, son intention de modifier les modalités du calcul des obligations des communes urbaines en matière de logement social, il propose « d’ajouter pour une part les logements intermédiaires accessibles aux classes moyennes dans le calcul des 25% ». Ce qui sonne d’abord comme une concession aux maires récalcitrants montre surtout l’ignorance du pouvoir, du fait que les plafonds de ressources du vrai logement social couvrent aujourd’hui plus des deux tiers des ménages vivant en France.
Le logement social est donc, par sa définition, largement « accessible aux classes moyennes ». Le problème est tout autre. C’est l’insuffisance de l’offre qui en concentre l’attribution aux demandeurs les plus prioritaires et ferme la porte aux autres. Introduire un nouveau produit immobilier, plus cher et plus sélectif, dans la définition du logement social ne peut, au contraire, qu’aggraver le problème. On est bien loin d’une réponse à ce qu’en ce début 2024 tous les acteurs du secteur désignent comme une crise du logement, ce qui justifie de tenter d’en tracer les contours et d’en expliciter les causes.
L’usage du terme de « crise du logement » semble omniprésent dans le vocabulaire politique français au moins depuis l’après-guerre. Outre qu’elle dénote un usage fautif du concept de crise qui désigne en toute rigueur la phase critique et brutale de l’évolution d’un phénomène et constitue une rupture, voire l’ouverture vers un changement majeur, cette permanence masque plusieurs dimensions importantes du problème du logement en France.
Le retour de l’inflation depuis la fin de 2021 vient toutefois renouveler l’actualité du sujet en générant, pour la première fois depuis longtemps, un consensus réunissant l’ensemble des acteurs directs et indirects du champ, du MEDEF à la Fondation Abbé Pierre, des promoteurs immobiliers aux bailleurs sociaux, des architectes aux artisans et entrepreneurs du bâtiment.
Mais de quoi parle-t-on au juste dans cette actualité anxiogène ? À lire une récente note de conjoncture publiée par le ministère en charge du logement[1], le problème est décrit comme le cumul d’une baisse du nombre de logements mis en chantier, d’un effondrement du nombre de ventes des promoteurs aux particuliers et des transactions dans l’ancien, d’un recul de la production de crédit aux acquéreurs et des fléchissements sensibles de l’emploi dans le bâtiment et dans l’activité immobilière. Bref, tous les signaux sont au rouge pour un secteur économique très large et marqué par de fortes interdépendances entre financeurs, constructeurs, maîtres d’ouvrages, intermédiaires et gestionnaires. C’est ainsi que notre pays est confronté à la crise immobilière la plus importante depuis trente ans[2].
Cela permet-il de parler également de crise du logement, au sens où cette situation serait génératrice d’un déséquilibre majeur dans la capacité des personnes à se loger correctement ? Les deux termes sont loin d’être équivalents et on voit bien en quoi les milieux économiques de l’immobilier peuvent trouver leur intérêt, dans ce contexte, à attirer l’attention des pouvoirs publics sur un problème social et sociétal d’intérêt collectif général afin d’obtenir des mesures correctrices au service de leurs intérêts économiques, légitimes, mais particuliers.
À y regarder de plus près, les choses sont loin d’être aussi simples et binaires. S’il y a bien deux registres de problèmes, ils sont liés à de nombreux égards, mais se développent avec des ampleurs et des temporalités différentes qui justifient quelques explicitations.
La crise, quelle crise ?
Jusqu’en 2021, l’idée selon laquelle la France serait confrontée à une crise du logement faisait débat[3]. Il serait en effet erroné d’employer, dans la France des années 2020, des termes identiques à ceux des années 1950 et 1960 marquées par un déficit quantitatif majeur causé par l’inertie du secteur pendant l’entre-deux-guerres et les destructions du conflit mondial. L’effort considérable de construction au cours des « vingt glorieuses » entre 1954 et 1974, puis l’accent mis sur la réhabilitation du parc existant, ont radicalement changé la donne et résorbé la pénurie. Quels sont donc les termes du problème, un demi-siècle plus tard ?
Dans un pays où 58% des ménages sont propriétaires-occupants, où près de 80% se déclarent satisfaits ou très satisfaits de leurs conditions de logement et où la surface moyenne par personne ne cesse de croître (41,7m² en 2020, 40,3m² en 2013…, 22m² en 1970)[4], les grands indicateurs généralistes décriraient plutôt une situation positive.
Il en va de même si l’on observe l’ensemble du parc de logements. Avec 552 logements pour 1000 habitants en 2022[5], la France n’est devancée en Europe que par le Portugal et la Bulgarie, loin devant l’Allemagne (515) ou les Pays-Bas (452). À cela s’ajoute un rythme de construction neuve élevé puisque, si on rapporte le nombre moyen annuel de permis de construire destinés au logement entre 2005 et 2022 à la population, la France se situe au cinquième rang de l’Union européenne, après Malte, Chypre, l’Irlande et le Luxembourg : 6,4 permis de construire par an et pour 1000 habitants, contre 4,0 pour l’ensemble de l’Union européenne, 3,7 pour l’Espagne et 2,8 pour l’Allemagne.
Où est donc le problème ?
Se situe-t-il dans le lancinant, mais fondamental, rappel que nous fait chaque année la Fondation Abbé Pierre de la persistance des situations qu’elle qualifie de « mal-logement » ? Près de 4,2 millions de personnes seraient concernées en 2023 par des situations de privation de domicile personnel ou des conditions de logement très difficiles[6]. Aussi scandaleuses qu’elles soient dans un pays théoriquement si riche et bien doté, ces situations concernent une part heureusement marginale de la population (6% des 68 millions d’habitants de la France en 2023). Tout en considérant l’urgence de résoudre ces problèmes, il est difficile d’en tirer le constat d’une crise globale.
Il faut chercher plus loin pour comprendre comment la situation de nombreux ménages s’est progressivement détériorée au cours des deux dernières décennies, alors que les grands indicateurs de l’activité immobilière (construction neuve, vente des promoteurs, transactions dans l’ancien) connaissaient, jusqu’à la crise sanitaire de 2020 et parfois au-delà, des évolutions positives.
Les crises du logement cher
L’explication principale de cette évolution est la hausse quasiment continue des prix immobiliers depuis la fin des années 1990. Cette évolution permet de distinguer deux périodes. La première, jusqu’à la crise financière de 2008, montre plus qu’un doublement des prix sur l’ensemble du territoire national depuis l’an 2000, alors que dans le même temps, l’indice des prix à la consommation n’avait augmenté que de 16%. La seconde période, après la légère secousse de la crise, montre une nette reprise des prix parisiens, qui auront triplé en 25 ans, et une courbe nationale plus plate masquant de très fortes disparités entre des métropoles telles que Lyon, Bordeaux ou Nantes, où la courbe ascendante a vite repris, et de nombreuses villes moins attractives où les prix se sont stabilisés.
Ces évolutions historiquement inédites trouvent une part importante de leur origine dans l’évolution des conditions du crédit au cours de la période. Baisse des taux et allongement de la durée des prêts ont solvabilisé les acquéreurs, leur permettant, à effort financier mensuel équivalent, de financer des prix plus élevés. Le marché s’est adapté à cette donne nouvelle permettant de vendre des logements toujours plus chers.
Trois registres de conséquences peuvent en être tirés.
Le premier est l’enrichissement continu des ménages propriétaires dont la valeur des patrimoines n’a cessé de croître au cours de la période, leur permettant de réaliser sans difficultés leurs projets d’achat et de revente. Un tel enrichissement a également des conséquences fiscales majeures. C’est ainsi, par exemple, que les recettes des droits de mutation sont passées de 4 milliards d’euros en 2000 à près de 17 milliards en 2022. La solvabilisation des acquéreurs a dopé parallèlement les prix du neuf, contribuant ainsi, par le mécanisme classique du compte à rebours[7], à la hausse des valeurs foncières.
Ces mécanismes, vertueux en première lecture (tout le monde s’enrichit, même les pouvoirs publics), ont aussi des conséquences néfastes pour une part de plus en plus importante des ménages. C’est le deuxième registre de conséquences de la hausse des prix. Le dynamisme du marché masque sa sélectivité croissante.
Alors que les ménages les plus aisés, souvent déjà propriétaires, profitent de leur enrichissement, et parfois des aides publiques, pour adapter leurs conditions de logements, faire des investissements locatifs ou acquérir des résidences secondaires ; les plus modestes, puis une partie des classes moyennes, locataires, se trouvent évincés du marché. Dès le milieu des années 2000, puis de plus en plus sévèrement ensuite, se sont ainsi développés des mécanismes inégalitaires liés aux situations en matière de logement que l’on peut résumer par un clivage croissant entre des propriétaires enrichis et un nombre croissant de locataires bloqués.
L’une des illustrations les plus frappantes de ces situations, très visible à partir du début des années 2010, est la forte baisse du nombre de ménages en capacité de sortir du parc locatif social pour accéder à la propriété[8]. Outre la frustration qu’ont pu connaître ces ménages qui, quelques années plus tôt, auraient pu mettre en œuvre leurs projets, ce déficit de sorties du parc social réduit le volume de l’offre disponible contribuant ainsi à l’allongement des listes d’attente et à l’accroissement du mal-logement.
Cette montée des inégalités liées au logement se décline de façon de plus en plus contrastée dans le territoire national. C’est le troisième registre des conséquences de la hausse des prix et de sa périodisation. Au cours de la première phase, le doublement généralisé a considérablement accru les écarts entre les villes les plus chères et celles qui étaient les plus abordables. Lorsque les prix parisiens passaient de 4 000 à 8 000 €/m², ceux de Saint-Étienne ou de Nevers passaient de 500 à 1 000 €/m², soit un accroissement considérable des inégalités territoriales en matière d’accès au marché. La période suivante accentue encore cette dynamique en différenciant encore plus les villes et métropoles attractives des autres territoires.
En résumé, bien au-delà du constat récurrent de la persistance du mal-logement, les deux premières décennies du siècle peuvent être décrites comme une période pendant laquelle le dynamisme du marché masque la montée de mécanismes inégalitaires. Leurs conséquences principales se lisent dans la capacité plus ou moins grande des ménages à adapter leurs conditions d’habitat à leurs besoins et à leurs aspirations. La littérature académique montre que ces conséquences se déclinent en termes territoriaux, écologiques, socio-économiques, de genre, de générations, etc.
La progressivité de ces mécanismes, leur inscription dans la longue durée et la pluralité de leurs conséquences en font une tendance plus structurelle que conjoncturelle. Cela autorise-t-il à parler de crise ? Sans doute pas dans l’acception la plus rigoureuse du terme. Peut-être toutefois est-il nécessaire de contribuer à alerter politiquement la société et les acteurs politiques nationaux et locaux sur la réalité du contexte qui a précédé la crise immobilière actuelle. C’est le sens de ce que nous proposons de longue date en adoptant le pluriel des crises du logement.
La crise immobilière : des prix inadaptés à l’évolution des conditions du crédit
La crise immobilière est désormais bien installée dans l’économie nationale. La note de conjoncture du ministère en charge du logement pour le 3ème trimestre de 2023 dresse un tableau très sombre de la situation du secteur : « dans un contexte de resserrement des crédits à l’habitat, la conjoncture de l’immobilier en France continue de se détériorer » et « les perspectives d’activité continuent de se dégrader dans le neuf, notamment dans la promotion immobilière. » Tous les indicateurs mobilisés vont effectivement dans ce sens : un nombre de mises en chantier au plus bas depuis 1998, des réservations de logements neufs par les particuliers en baisse de près de 40% sur un an, un volume de transactions dans l’ancien à son plus bas niveau depuis six ans, 10 500 emplois perdus dans le bâtiment depuis fin 2022…
L’explication de cette situation est bien documentée. Elle trouve son origine dans le retour de l’inflation à partir de la fin de 2021 et dans la politique de la banque centrale européenne qui, pour lutter contre cette inflation, augmente les taux d’intérêt[9]. S’y ajoutent les consignes du Haut conseil de stabilité financière (HCSF) qui limitent les capacités d’endettement des ménages. Cette situation génère ce que beaucoup de professionnels analysent comme une « crise de la demande ». Les acquéreurs se trouvent empêchés d’acheter par leur incapacité à accéder au crédit ou, pour d’autres, par le fait qu’ils anticipent une baisse des prix et, lorsqu’ils le peuvent, préfèrent attendre.
Si l’accroissement du coût du crédit apparaît comme le facteur déclencheur de la crise, il faut toutefois préciser que, malgré leur très forte croissance, les taux d’intérêt pratiqués en 2023 restent en réalité faibles et inférieurs à l’inflation, ce qui constitue une situation inédite. Le problème de fond n’est donc pas celui des taux d’intérêt, mais celui des prix dont l’ajustement est beaucoup plus lent que celui des taux. Les prix d’aujourd’hui étaient adaptés à des taux bas, ils ne le sont plus dès lors que les taux ont quasiment quadruplé.
Les conséquences et les perspectives ouvertes pour cette crise varient selon que l’on évoque le marché de l’ancien ou celui du neuf.
Dans le premier cas, ce marché, principalement animé par des particuliers et leurs intermédiaires (agents immobiliers et notaires), s’oriente progressivement vers la baisse des prix. Les délais de vente s’allongent, apportant aux vendeurs des arguments de plus en plus convaincants pour qu’ils ajustent leurs ambitions. Les baisses sont d’ailleurs amorcées dès 2023 ; elles restent faibles, mais pourraient accélérer en 2024. Les questions de l’intensité finale de cette baisse et du temps nécessaire pour l’atteindre restent ouvertes. Permettra-t-elle de retrouver une solvabilité de la demande équivalente à celle d’avant la crise ? Ira-t-elle-même plus loin ? Sera-t-elle freinée en 2024 par une stabilisation des taux, voire leur baisse ?
La situation du neuf est différente. La baisse des prix y est freinée par des coûts de construction toujours élevés, tirés vers le haut par l’inflation ayant touché les matériaux et l’énergie. Mais c’est surtout la variable foncière qui reste déterminante. Si la logique du compte à rebours devrait générer à terme une baisse des prix des terrains, celle-ci n’aura un impact réel que dans plusieurs années dans la mesure où les négociations sur le foncier peuvent précéder de plusieurs années la réalisation effective des opérations. On peut craindre de ce fait le maintien d’une activité bridée plus longtemps que dans l’ancien.
Quand la crise de la demande devient une crise de l’offre
Les facteurs de blocage liés aux prix élevés se trouvent donc démultipliés par la situation conjoncturelle de crise de l’immobilier. Une partie des ménages qui pouvaient encore accéder au marché en 2021 ne le peut plus aujourd’hui, mettant un terme à la période euphorique des années qui avaient précédé la crise sanitaire de 2020.
En aggravant ses conséquences pour les ménages et en les étendant aux acteurs de la production et de la transaction, la crise immobilière agit comme un révélateur de la crise du logement structurelle et sous-jacente.
L’impact en est encore renforcé par les effets en chaîne que la crise de la demande génère sur l’offre. Lorsque les locataires peinent à devenir propriétaires, ils restent locataires et ne libèrent pas leurs logements pour d’autres ménages. Ce que l’on constatait de longue date à propos du logement social se diffuse désormais au secteur locatif privé dont l’offre se rétracte dangereusement. Une enquête menée par la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) auprès de ses adhérents à l’été 2023 montrait une baisse de 34% du nombre de biens mis en location par rapport à l’été 2022. Le recul de l’accession à la propriété n’en est pas la seule explication ; il faut y ajouter la perspective de l’interdiction des passoires énergétiques et la tentation du basculement vers la location touristique, mais ce faisceau de facteurs défavorables débouche sur une crise de l’offre locative privée particulièrement dommageable pour les ménages les plus mobiles, notamment jeunes, étudiants ou actifs.
Parallèlement, la construction neuve marque le pas, ralentissant de ce fait l’accroissement de l’offre de logements. C’est vrai dans le cas de la maison individuelle, mais aussi de la production en immeubles collectifs, principalement menée par les promoteurs immobiliers. Les perspectives de vente étant réduite, les opérations programmées sont abandonnées, générant à leur tour un fort ralentissement de la construction de logements locatifs sociaux.
En effet, les vingt dernières années ont été marquées par le développement de la pratique d’opérations mixtes menées par les promoteurs et comportant, à côté des logements proposés à la vente aux particuliers, une part de logements vendus en bloc à des bailleurs sociaux. En 2012, cette modalité représentait déjà 29% de la production nouvelle des bailleurs sociaux ; en 2022, ce sont 49% des logements sociaux neufs qui avaient été construits par des promoteurs[10]. Ce sont autant de logements sociaux qui ne seront pas construits lorsque les opérations sont abandonnées. C’est ainsi que moins de 85 000 agréments de logements sociaux auront été attribués en 2023 contre plus de 100 000 entre 2008 et 2019.
Politique publique : le pari du marché
L’histoire des politiques du logement depuis les années 1970 est marquée par la récurrence de l’utilisation du secteur à des fins contracycliques dans une logique de soutien à l’économie, à base d’injection d’argent public. Le logement social a ainsi souvent été sollicité au secours du secteur du bâtiment, tout comme les politiques de soutien à l’accession à la propriété ou à l’investissement locatif. L’exemple de la crise financière de 2008 est édifiant à cet égard, entre l’ouverture du prêt à taux zéro sans condition à tous les ménages et à toutes les acquisitions et la création du dispositif Scellier très favorable à l’investissement locatif des particuliers dans le neuf. L’injection massive d’argent public a évité à la France la grave crise immobilière qui touchait les États-Unis, le Royaume-Uni ou l’Espagne.
En 2022, rien de ce genre, ou presque. Seule mesure véritablement tournée vers la résolution de la crise, le sauvetage de 47 000 logements de promoteurs rachetés par les bailleurs sociaux CDC Habitat et Action Logement Immobilier, principalement tournés vers le logement intermédiaire visant les locataires de la classe moyenne dans les villes les plus chères. Pour le reste, on observe plutôt un ensemble de mesures d’économies budgétaires doublement argumentées par la nécessité de sortir de la période du « quoi qu’il en coûte » et par la conviction idéologique énoncée en mai 2023 par le président de la République selon laquelle, à propos du logement, « on a créé un système de surdépenses publiques pour de l’inefficacité collective »[11].
Il en résulte, à la tête de l’État, une conviction réaffirmée de confiance dans des processus marchands libérés de trop de freins normatifs et de mécanismes d’aides inflationnistes, voire pervers. Le discours de politique générale du Premier ministre en fournit un exemple supplémentaire avec son intention proclamée de « simplifier massivement les normes » qui rappelle l’idée de « construire plus, mieux et moins cher », slogan placé en exergue de la loi Élan de 2018[12], dont le bilan sur ce plan reste plus que modeste.
Il n’y aura donc pas grand-chose à attendre des pouvoirs publics pour sortir de la crise. Le pari est clair : c’est le marché qui s’ajustera et ce sera l’occasion d’un assainissement du secteur, libéré de sa dépendance aux aides. Cette approche libérale du sujet ne convainc pas les acteurs du secteur et encore moins ceux qui représentent les volets sociaux de l’offre de logement qui voient leurs perspectives de développement compromises par des finances fragilisées.
Mais au-delà de ces points de vue d’opérateurs, légitimement prompts à défendre leur activité, se pose une question plus fondamentale à l’heure où une part importante des politiques du logement bascule à juste titre dans la réponse prioritaire aux enjeux écologiques. S’il s’agit seulement de sortir du marasme conjoncturel et de retrouver les rythmes d’activité de la fin des années 2010, la sortie de crise n’en résoudra que les conséquences économiques, sans traiter véritablement ses effets mortifères, tant sociaux que territoriaux.