La démocratie à l’épreuve de l’IA
Le jeudi 15 février 2024, l’entreprise OpenAI annonçait l’arrivée imminente de Sora, un nouveau logiciel capable de générer automatiquement des vidéos ultraréalistes sur la base de commandes écrites. Cette annonce faisait suite à la diffusion massive, un an auparavant et par la même entreprise, du dispositif nommé ChatGPT, logiciel de génération automatique de texte qui agence de gros modèles de langage (large langage models) comme GPT-3 ou GPT-4 avec une interface interactive permettant aux usagers de produire automatiquement des textes très standardisés ressemblant à s’y méprendre à des textes écrits par des humains. Depuis presque deux ans, le développement fulgurant desdites « intelligences artificielles génératives » promet de transformer en profondeur l’espace médiatique numérique, dans lequel circulent aujourd’hui les contenus informationnels et culturels.

En effet, contrairement à ce que leur nom indique, les « intelligences artificielles génératives » constituent des automates computationnels et statistiques visant à prédire et à produire les suites les plus probables de signes ou de pixels en fonction des requêtes effectuées. Tous les contenus improbables, originaux ou singuliers sont donc éliminés car les calculs probabilistes des algorithmes ne prennent pas en compte les expressions idiomatiques, originales et inattendues, peu représentées dans les masses de données, et qui disparaissent dans les moyennes une fois les calculs achevés. Les expressions majoritaires se voient donc renforcées au dépend de la diversité – d’où l’amplification de certains préjugés et de certains biais (racistes, homophobes, sexistes etc.) dans les textes et les images automatiquement générés, qui semblent la plupart du temps très stéréotypés.
Tout se passe comme si le mythe de la « singularité technologique » masquait l’élimination systémique des singularités par les calculs statistiques sur des quantités massives de données, alors même que ce sont de telles singulari