Médias

Pour l’indépendance réelle de l’audiovisuel public

Juriste

La récente mise à pied de Guillaume Meurice par la présidence de Radio France a relancé le débat sur la politisation de l’audiovisuel public et les ingérences du pouvoir politique. Malgré la fin de l’ORTF en 1974, et la création d’une autorité administrative indépendante dans le secteur de l’audiovisuel en 1982, un contrôle diffus subsiste car le pouvoir politique est réticent à mettre en place une gouvernance qui permettrait réellement d’assurer l’indépendance des chaînes publiques.

La récente mise à pied de Guillaume Meurice par la direction de Radio France, ainsi que la suppression annoncée de certaines chroniques de reportages, telles que certaines chroniques de la Tête au Carré ou les reportages sur l’actualité des luttes et mobilisations sociales « C’est bientôt demain », d’Antoine Chao a relancé le débat sur la gestion politique de la grille des programmes de Radio France.

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Cette énième crise de gouvernance, au moment où l’exécutif et la majorité qui le soutiennent présentent à l’Assemblée leur projet de loi, qui doit réformer, une fois de plus, l’audiovisuel public, se traduit par la contestation par les journalistes et les personnels, des choix éditoriaux faits par la direction, accusée de censurer les voix dissidentes au pouvoir politique en place.

Cette crise est le reflet de problèmes qui ne sont pas seulement conjoncturels mais surtout structurels : elle est symptomatique du fait que le pouvoir politique est incapable de couper le cordon ombilical qui le relie au service public audiovisuel depuis sa création, et ce malgré une dizaine de réformes législatives visant, officiellement, à remédier au péché originel de l’audiovisuel public.

Pour comprendre la crise que traverse Radio France, il est donc utile d’analyser l’histoire de la gouvernance de l’audiovisuel public. La création d’une autorité administrative indépendante en 1982 (la Haute autorité, remplacée en 1986 par la Commission Nationale de la Communication et des Libertés, elle-même remplacée en 1989 par le CSA) semble représenter une rupture vis-à-vis de l’ORTF, fortement liée au pouvoir gaulliste et dans lequel le contrôle de l’information se faisait presque officiellement. La nomination du Président des Sociétés par l’autorité indépendante représente incontestablement un progrès, mais un progrès très relatif du fait de la politisation de l’autorité de régulation elle-même et des pressions diffuses par le pouvoir politique.

Olivier Schramek a ainsi récemment admis


[1] Michel Bouissou, « La réforme de la radio-télévision et la notion de service public », RDP, 1972, p. 11.

[2] André De Laubadère, Traité élémentaire de droit administratif, LGDJ, 3ème édition, 1971.

[3] Ibid.

[4] Claude Courvoisier, « La radiodiffusion-television française après l’office », AJDA, 1975, p. 277.

[5]« J’ai compris grâce à vous que la poésie n’était pas l’affaire de quelques snobs mais appartenait à tout le monde » écrit un ouvrier à l’ORTF en 1956, à propos d’un récital de poésie, message retranscrit dans L’Humanité Dimanche, cité par Jacques Bourdon, p 11.

[6] Claude Courvoisier, « La radiodiffusion française après l’office », AJDA, 1975 p. 277 ; Jacques Chevallier, La radio-télévision française entre deux réformes, LGDJ, 1975.

[7] Ce mouvement de démocratisation des relations de travail a été impulsé par le Rapport Auroux (Jean Auroux, « Les droits des travailleurs : Rapport au président de la république et au premier ministre », La Documentation française, septembre 1981), qui promouvait « une démocratie économique fondée sur de nouvelles relations du travail et sur l’élargissement des droits des travailleurs ». Ce rapport est suivi de l’adoption de quatre lois, bouleversant profondément le code du travail : la loi n° 82-689 di 4 aout 1982 relative aux libertés des travailleurs dans l’entreprise, la loi n° 82-915 du 28 octobre 1982 relative au développement des institutions représentatives du personnel, de la loi n° 82-957 du 13 novembre 1982 relative à la négociation collective et au règlement des conflits du travail, et enfin de la loi n° 82-1097 du 23 décembre 1982 relative aux comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Ces lois s’appuyaient sur l’idée que l’amélioration des conditions de travail des salariés devaient non pas brider, mais stimuler les initiatives individuelles et collectives, et améliorer de ce fait l’efficience économique des entreprises. Voir Antoine Jeammaud, « Les lois Auroux : plus de droit ou un autre d

Pauline Trouillard

Juriste, Enseignante-chercheuse en droit des médias à l’IODE (Université de Rennes)

Notes

[1] Michel Bouissou, « La réforme de la radio-télévision et la notion de service public », RDP, 1972, p. 11.

[2] André De Laubadère, Traité élémentaire de droit administratif, LGDJ, 3ème édition, 1971.

[3] Ibid.

[4] Claude Courvoisier, « La radiodiffusion-television française après l’office », AJDA, 1975, p. 277.

[5]« J’ai compris grâce à vous que la poésie n’était pas l’affaire de quelques snobs mais appartenait à tout le monde » écrit un ouvrier à l’ORTF en 1956, à propos d’un récital de poésie, message retranscrit dans L’Humanité Dimanche, cité par Jacques Bourdon, p 11.

[6] Claude Courvoisier, « La radiodiffusion française après l’office », AJDA, 1975 p. 277 ; Jacques Chevallier, La radio-télévision française entre deux réformes, LGDJ, 1975.

[7] Ce mouvement de démocratisation des relations de travail a été impulsé par le Rapport Auroux (Jean Auroux, « Les droits des travailleurs : Rapport au président de la république et au premier ministre », La Documentation française, septembre 1981), qui promouvait « une démocratie économique fondée sur de nouvelles relations du travail et sur l’élargissement des droits des travailleurs ». Ce rapport est suivi de l’adoption de quatre lois, bouleversant profondément le code du travail : la loi n° 82-689 di 4 aout 1982 relative aux libertés des travailleurs dans l’entreprise, la loi n° 82-915 du 28 octobre 1982 relative au développement des institutions représentatives du personnel, de la loi n° 82-957 du 13 novembre 1982 relative à la négociation collective et au règlement des conflits du travail, et enfin de la loi n° 82-1097 du 23 décembre 1982 relative aux comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Ces lois s’appuyaient sur l’idée que l’amélioration des conditions de travail des salariés devaient non pas brider, mais stimuler les initiatives individuelles et collectives, et améliorer de ce fait l’efficience économique des entreprises. Voir Antoine Jeammaud, « Les lois Auroux : plus de droit ou un autre d