Le panser artificiel des robots et la tendresse
Les animaux de compagnie robotiques pourraient-ils offrir une solution au manque de soignants comme on le laisse aisément croire ? Est-ce que la disponibilité 24 h/24 h des dispositifs numériques, tout à la fois automates, personnages et « personnes » et, dans le même temps, ne connaissant ni saute d’humeur, ni fatigue, ni état d’âme incitant à la grève, ne serait pas la solution idéale pour assurer la continuité du soin ? Et s’il n’y avait personne – au sens que donna Homère à ce mot : « Mon nom est personne » – en lieu et place du personnel soignant ?

Il faut avoir une conception bien naïve et mièvre du soin pour penser que le soin se passerait des corps, des affects, de l’imagination, de l’interprétation et de la mémoire des soignants. Et si l’on n’est pas dupe de ce que la disposition vivante et individuante du soin ne saurait se convertir dans les dispositifs algorithmiques répétitifs, morts, au mieux individualisés, comment les métiers du soin se trouvent-ils refigurés par la présence des IA ?
C’est à cette dernière question que nous voudrions nous intéresser. Elle interroge comment un panser artificiel n’est finalement pas un soin vivant, voire risque de prolétariser les soignants, médecins compris, les privant de ces compétences de soin, de leur savoir penser en situation et de leurs savoirs pratiques, puisque le soin est avant tout une pratique qui engage le corps vécu des soignants. Un exemple, emprunté moins à l’intelligence exégétique de la lecture d’images en radiographie – où les IA ont montré une efficacité – qu’à la relation de soin, nous servira ici de guide : le robot social capable de simuler l’empathie.
Bien que la technologie de la robotique dite « sociale » soit encore en développement dans les milieux de soin, certaines tendances intéressantes commencent à émerger. Elles questionnent abstraitement ce qui, dans le soin, ne saurait être délégué à de la robotique – la « spécificité humaine » –, dans l’inquiétude d’un grand remplacement.