Société

Sur la répression policière des mouvements sociaux à Marseille

Politiste

En France, les méthodes de maintien de l’ordre sont devenues de plus en plus violentes. À Marseille, où d’importantes organisations militantes sont nées ces dernières années, les forces de l’ordre déploient tout leur arsenal répressif, venant ainsi renforcer les effets des différents états d’urgence et des dynamiques postcoloniales. Dans ce contexte, la banalisation de l’étiquette « terroriste » sert à stigmatiser et disqualifier des formes pacifiques de contestation sociale.

L’année 2025 marque les dix ans des attentats de Paris et des politiques anti-terroristes adoptées en conséquence et qui ont eu un effet sur la répression des mouvements sociaux. Quand on interroge les acteur·trice·s des mouvements sociaux, ielles dessinent l’image d’un « enchaînement et d’un empilement » de dispositifs répressifs, notamment depuis les attentats de Paris en 2015 et les deux ans d’état d’urgence « sécuritaire » qui ont suivi. Retour sur 10 années de répression policière des mouvement sociaux, à travers les regards et expériences militantes à Marseille.

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« À Marseille, [en manif], on se balade » – ce regard d’un militant anti-gentrification témoigne qu’en comparaison avec d’autres villes en France, le maintien de l’ordre lors de manifestations est plutôt perçu comme « calme ». Pourtant, la création de l’Observatoire méditerranéen des pratiques policières, par la Ligue des droits de l’homme et le Syndicat des avocats de France (SAF), en 2023, avait été la conséquence d’une augmentation estimée des violences policières dans la ville, dans le contexte d’une contestation politique accrue. Par ailleurs, les multiples occurrences de violences policières, lors des manifestations de 2016 contre la loi travail, des manifestations des « gilets jaunes » en 2018-2019, des manifestations contre la gentrification et le mal-logement en 2018, et lors des révoltes de 2023 après la mort de Nahel Merzouk, tué par balle dans le thorax par un policier de Nanterre, viennent contredire le discours du militant cité ci-dessus.

Rappelons également que Zineb Redouane, une octogénaire algérienne, est décédée le 2 décembre 2018, après avoir été blessée par une grenade lacrymogène au visage alors qu’elle fermait ses volets au quatrième étage pendant une manifestation contre le mal-logement en relation avec le mouvement des Gilets Jaunes, qui passait devant son immeuble. Mohammed Bendriss a également été tué par des tirs de lanceur de balles de défense (LBD) à Marseille da


[1] Cette recherche a été financée en tout ou en partie par le Fonds autrichien pour la science (FWF).

[2] Voir Nicolas Klausser (AOC, 22 janvier 2025) sur les continuités sous forme des MICAS.

[3] Voir Sylvie Thénault, “L’état d’urgence (1955-2005): De l’Algérie coloniale à la France contemporaine: Destin d’une Loi’”, in: Le Mouvement Social 218, 2007, 63–78.

[4] Voir Flora Hergon, “The state of emergency at home: house arrests, house searches, and intimacies in France”, in: Conflict and Society, 2021, 42-59.

[5] Voir Emmanuel Blanchard, “The Colonial legacy of French Policing”, in: Jacques de Maillard et Westley G. Skogan (eds.): Policing in France, Routledge, 2020, 39-53.

[6] Voir Julian Talpin (AOC, 7 juillet 2023) sur les dimensions politiques des révoltes.

[7] Voir Stéphanie Hennette-Vauchez, La démocratie en état d’urgence, Seuil, 2022.

[8] Katharina Fritsch et Andrea Kretschmann, « Politics of Exception », in: Veis, Valeria (ed.): Criminalization of Activism. Historical, present, and future perspectives, Routledge, 2022, 19–29.

[9] Les effets de la VSA à Marseille ont été documentés par le collectif Technopolice.

[10] L’action du mouvement écologiste radical des Soulèvements de la Terre ciblait les actions de « désarmement » de l’usine Lafarge Bouc-Bel-Air, en décembre 2022, près de Marseille.

[11] Voir Raphaël Kempf, Ennemis d’État. Les lois scélérates, des anarchistes aux terroristes, la fabrique, 2019.

[12] Le procès autour des effondrements s’est déroulé du 7 novembre au 16 décembre 2024.

[13] Voir Victor Collet, Du Taudis au Airbnb. Petite Histoire des luttes urbaines à Marseille, Agone, 2024.

[14] Dans le contexte marseillais et parmi les groupes que j’ai interviewés, il y a par exemple le Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP) Sud et la Coordination contre le Racisme et l’Islamophobie (CRI), dont la dissolution a été confirmée par le Conseil d’État en novembre 2023.

[15] Voir Gayatri Chakravorty Spivak, A Critique of Postcoloni

Katharina Fritsch

Politiste, Chercheuse associée au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP)

Notes

[1] Cette recherche a été financée en tout ou en partie par le Fonds autrichien pour la science (FWF).

[2] Voir Nicolas Klausser (AOC, 22 janvier 2025) sur les continuités sous forme des MICAS.

[3] Voir Sylvie Thénault, “L’état d’urgence (1955-2005): De l’Algérie coloniale à la France contemporaine: Destin d’une Loi’”, in: Le Mouvement Social 218, 2007, 63–78.

[4] Voir Flora Hergon, “The state of emergency at home: house arrests, house searches, and intimacies in France”, in: Conflict and Society, 2021, 42-59.

[5] Voir Emmanuel Blanchard, “The Colonial legacy of French Policing”, in: Jacques de Maillard et Westley G. Skogan (eds.): Policing in France, Routledge, 2020, 39-53.

[6] Voir Julian Talpin (AOC, 7 juillet 2023) sur les dimensions politiques des révoltes.

[7] Voir Stéphanie Hennette-Vauchez, La démocratie en état d’urgence, Seuil, 2022.

[8] Katharina Fritsch et Andrea Kretschmann, « Politics of Exception », in: Veis, Valeria (ed.): Criminalization of Activism. Historical, present, and future perspectives, Routledge, 2022, 19–29.

[9] Les effets de la VSA à Marseille ont été documentés par le collectif Technopolice.

[10] L’action du mouvement écologiste radical des Soulèvements de la Terre ciblait les actions de « désarmement » de l’usine Lafarge Bouc-Bel-Air, en décembre 2022, près de Marseille.

[11] Voir Raphaël Kempf, Ennemis d’État. Les lois scélérates, des anarchistes aux terroristes, la fabrique, 2019.

[12] Le procès autour des effondrements s’est déroulé du 7 novembre au 16 décembre 2024.

[13] Voir Victor Collet, Du Taudis au Airbnb. Petite Histoire des luttes urbaines à Marseille, Agone, 2024.

[14] Dans le contexte marseillais et parmi les groupes que j’ai interviewés, il y a par exemple le Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP) Sud et la Coordination contre le Racisme et l’Islamophobie (CRI), dont la dissolution a été confirmée par le Conseil d’État en novembre 2023.

[15] Voir Gayatri Chakravorty Spivak, A Critique of Postcoloni