Économie

La dette publique n’est pas notre punition mais le sang du néocapitalisme

Haut fonctionnaire

« La dette, c’est chacun d’entre nous », a déclaré le Premier ministre François Bayrou lors de son discours du 25 août. Une affirmation qu’il convient de remettre en question : à contre-courant des récits sur une France « accro à la dépense publique », la dette provient en effet d’une baisse de recettes dont ont bénéficié avant tout les créanciers et les entreprises, dans la lignée de choix politiques favorables au capitalisme financiarisé.

François Bayrou, dans son discours du 15 juillet dernier, a présenté ses orientations budgétaires pour 2026 : plus de 40 milliards d’euros de réduction de dépenses essentiellement sociales, justifiées par l’importance de l’endettement public de notre pays.

Il a longuement agité l’épouvantail de la dette, d’abord dans un registre religieux : « Être obligé d’emprunter tous les mois pour payer les retraites ou payer les salaires des fonctionnaires, c’est une malédiction qui n’a pas d’issue ». Puis d’addictologue : « Nous avons considéré comme normal dans notre pays depuis des années, des décennies, que l’État, puissance publique et sécurité sociale, que l’État paie tout. Nous sommes devenus accros à la dépense publique. Il n’y a pas de difficulté du pays, il n’y a pas de changement nécessaire, il n’y a pas d’obstacle à surmonter, ni d’ordre sanitaire, ni d’ordre climatique, ni d’ordre énergétique ou familial devant lesquels les élus, les citoyens, les médias n’aient eu chaque fois qu’une seule réponse à la bouche, se tourner vers l’État ».

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Pêcheurs, nous serions aussi drogués à la dette publique ; les Français se plaignent du coût de la vie, de l’inflation, de la difficulté de se loger, de l’impossibilité de partir en vacances, de la baisse du niveau de vie de la majorité d’entre eux, par aveuglement. Comment ne se sont-ils pas aperçus que l’État payait tout ? Enfin, il a traité les Français de fainéants : « … nous avons peu à peu perdu de vue que pour distribuer, il fallait produire … J’ai la conviction qu’il faut réconcilier notre pays avec le travail, avec l’emploi, avec l’épanouissement au travail. Il faut que toute la nation travaille plus pour produire … Je propose donc que deux jours fériés soient supprimés pour tout le pays ».

François Bayrou va engager la responsabilité de son gouvernement le 8 septembre 2025, pour faire confirmer, ou rejeter, par lui, ce qu’il dit de la dette publique.

Mais la vérité n’a rien à voir avec ce récit. La dette publique


[1] Extrait de Le Capital – Livre premier, Le développement de la production capitaliste, VIII° section : L’accumulation primitive, Chapitre XXXI : Genèse du capitaliste industriel, in Karl MARX, 1867, Le Capital, livre I, Œuvres I, Gallimard, La Pléiade, 1963, p. 1216 à 1219.

Jean-François Collin

Haut fonctionnaire

Notes

[1] Extrait de Le Capital – Livre premier, Le développement de la production capitaliste, VIII° section : L’accumulation primitive, Chapitre XXXI : Genèse du capitaliste industriel, in Karl MARX, 1867, Le Capital, livre I, Œuvres I, Gallimard, La Pléiade, 1963, p. 1216 à 1219.