Les arts visuels nous regardent
Il est temps de se rendre à l’évidence : les arts visuels sont aujourd’hui un enjeu majeur. Cognitif, économique et éducatif. Au plan cognitif, les avis sont unanimes : en tant que systèmes symboliques spécifiques, les œuvres d’art contribuent à l’accroissement de nos capacités de perception et de connaissance. Une qualité supplémentaire vient en outre distinguer les arts visuels : leur aptitude à développer nos capacités de visualisation et de schématisation. Celle-ci est d’autant plus précieuse que nous vivons maintenant sous un régime de connaissance largement visuel. De la prolifération des écrans à l’importance croissante du design, l’image modèle notre environnement et concurrence désormais l’écrit dans notre rapport au savoir et à la culture. C’est la raison pour laquelle, dans le même temps qu’il convient de faire émerger l’enjeu majeur que constituent les arts visuels, il faut rappeler l’importance fondamentale et complémentaire de l’écrit dans l’accès à la pensée. Sans quoi nous risquerions de séjourner durablement dans un temps où nous ne saurions déjà plus lire et pas encore regarder. C’est le sens notamment qu’il y a à publier aujourd’hui ce texte sur les arts visuels dans AOC, media généraliste et strictement textuel, mais activant les possibilités de l’Internet pour accéder à toutes les images du monde, et y articuler ainsi l’écrit.
Sur ce premier tournant, visuel, s’en greffe un autre, qui lui est concomitant : le tournant de l’art contemporain, qui se déploie au-delà du seul registre visuel. Depuis Duchamp, l’expérience de l’art n’est plus une expérience exclusivement rétinienne, c’est aussi une expérience intellectuelle, spéculative et critique. Ce changement de registre, allié au fait que la beauté a été ravalée au rang de catégorie historique, a conduit à problématiser la notion de valeur, de sorte que celle-ci ne va plus de soi. L’art contemporain, c’est n’importe quoi, disent ses contempteurs. C’est au contraire là ce qui en fait un champ rema