Éducation

Lycée : réflexions sur une réforme

Politiste

La réforme du lycée, dont l’essentiel de l’application débutera à la rentrée de septembre 2019, fait l’objet – jusque dans les colonnes d’AOC – de vives contestations. Pierre Mathiot, l’auteur du rapport qui a inspiré la réforme, y répond point par point, proposant de dépasser les approches binaires, tout en rappelant que personne n’est en la matière détenteur de la vérité, ni ne peut s’ériger en seul défenseur de l’école publique.

Pour avoir été en janvier 2018 le rédacteur du rapport dont s’est inspiré le ministre Jean-Michel Blanquer pour proposer la réforme du bac et du lycée général et technologique, j’ai, et cela est à la fois normal et souhaitable en démocratie, la chance d’être soumis à la question dans divers articles et prises de position, notamment dans AOC. Je voudrais partir ici ce que je pense avoir identifié comme les critiques les plus fortes ou les plus récurrentes pour essayer de proposer quelques pistes d’analyse dont j’espère qu’elles aideront à dépasser les approches souvent binaires.

Je suis en effet frappé par le caractère souvent définitif, extraordinairement affirmatif voire prophétique, fortement intentionnaliste, des textes que je lis. Tout se passe comme si la réforme, et ses « responsables », avaient eu depuis le départ un objectif caché : détruire un système par essence efficace et égalitaire dans une perspective élitiste et, bien sûr, néo-libérale c’est-à-dire, en gros, sacrifier le lycée en commençant par les élèves les plus fragiles pour faire des économies.

Je suis frappé de voir qu’à force de stigmatiser a priori la réforme, ceux qui portent la critique en arrivent à faire comme si le lycée et le bac actuels étaient parés de toutes les vertus, qu’ils assuraient même une égalité de traitement et de « chances » entre les établissements et entre les élèves. On en vient par exemple à défendre mordicus les TPE – dont la création fût en son temps largement critiquée – ou l’accumulation des épreuves au mois de juin.

Parfois, il me vient l’idée singulière que Boudon se cache derrière Bourdieu, que derrière le mantra des inégalités se dissimule une sociologie sauvage des effets pervers.

Parmi ces critiques, l’utilisation de l’argument du creusement des inégalités scolaires que porte presque mécaniquement la réforme est celui qui me chagrine le plus : comme si le lycée général actuel – au passage rien ou presque dans ce que je lis concerne le bac technologique – était


[1] Un chiffre un seul : 50% des fonctionnaires d’État appartiennent à l’éducation nationale.

Pierre Mathiot

Politiste, Professeur Sciences Po Lille

Notes

[1] Un chiffre un seul : 50% des fonctionnaires d’État appartiennent à l’éducation nationale.