La liberté académique et les vices du savoir
On peut être bête, confus, lâche, vaniteux ou bavard sans y être pour grand-chose. Mais quand on est prétentieux, arrogant, sot, malhonnête intellectuellement, snob ou esprit faux, c’est en grande partie de notre fait. Ces vices intellectuels ne sont jamais totalement indépendants des vices moraux, mais ils reposent tous sur une forme d’indifférence au savoir, et lui font obstacle.

Les institutions aussi ont leurs vices, qui sont comme les vices de forme des machines, mais dont ceux qui y participent sont souvent responsables. Le comble est atteint quand ces institutions sont supposées être dévolues à l’avancement du savoir, comme les universités. Lichtenberg disait que peut-être un jour les universités serviront à rétablir l’ancienne ignorance.
On n’en est pas encore tout à fait là, mais nous savons tous que l’université a ses propres vices, qui ne sont pas tous intellectuels, ou plutôt qui le sont quand on a oublié la raison d’être du savoir. Rabelais et les humanistes ont décrit ceux de l’université médiévale. Ceux des universités contemporaines ne sont pas moins graves, a fortiori quand ce sont des vertus dont on a perdu le sens.
L’une des vertus cardinales de l’université est le principe dit des « libertés universitaires » qu’on appelle souvent « liberté académique ». Il a une longue histoire, qui remonte aux droits et franchises des étudiants et des clercs dans les universités médiévales, et il a ses héros, comme Miguel de Unamuno, recteur de l’université de Salamanque, qui le 12 octobre 1936, face au général franquiste Millàn Astray et ses miliciens qui criaient « Muera la inteligencia ! », déclara : « Cette université est le temple de l’intelligence et je suis son grand prêtre. Vous profanez son enceinte sacrée. Malgré ce qu’affirme le proverbe, j’ai toujours été prophète dans mon pays. Vous vaincrez mais vous ne convaincrez pas. Vous vaincrez parce que vous possédez une surabondance de force brutale, vous ne convaincrez pas parce que convaincre signifie pe