Les quatre dimensions économiques de la justice climatique
À la suite de la pétition « L’affaire du siècle », signée par plus de 2 millions de personnes, quatre ONG environnementales ont déposé en mars 2019 un recours devant le tribunal administratif de Paris, visant la carence de l’État en matière climatique. À la suite des Pays-Bas et de quelques autres, la France est entrée dans le club des pays où l’État est poursuivi par une partie de ses citoyens lui reprochant son inaction face au réchauffement climatique. Pour reprendre l’expression de Marta Torre-Schaub, il s’agit « d’aller au prétoire national pour résoudre un problème planétaire non réglé par le droit international » [1]. La multiplication des contentieux pourrait faire émerger une jurisprudence fournissant aux juges une définition partagée du concept de justice climatique. Nous nous attachons ici à définir une approche économique de la justice climatique permettant de guider l’action face au réchauffement global.
Dans une contribution précédente, nous avons rappelé combien la relation entre inégalités économiques et réchauffement climatique méritait d’être scrutée avec attention. S’il ne fait aucun doute que la contribution des riches aux émissions globales pèse, en proportion, beaucoup plus que celle des pauvres, c’est une erreur de raisonnement de postuler qu’une réduction des inégalités économiques induit mécaniquement une baisse des émissions. Dans le cadre des structures économiques actuelles, c’est l’inverse qui se produit : la réduction des inégalités économiques tend à accélérer les émissions de gaz à effet de serre ; symétriquement, leur accroissement tend à les freiner.
Cette liaison entre inégalités économiques et émission de gaz à effet de serre est un obstacle majeur à l’accélération de la transition vers la société bas carbone. Faute d’une attention particulière portée aux mécanismes de justice distributive, la mise en route de cette transition pèse en effet davantage sur les pauvres en accroissant les inégalités économiques. C’est un fa