Iran : la savante, les politiques et nous
Le 24 décembre, Fariba Adelkhah, anthropologue, auteure d’un article dans le premier numéro d’AOC (il y a tout juste deux ans) et prisonnière scientifique en Iran depuis le 5 juin 2019, co-signait une lettre avec sa collègue d’infortune, l’universitaire australo-britannique Kylie Moore-Gilbert, dans laquelle l’une et l’autre annonçaient se mettre en grève de la faim pour obtenir la reconnaissance de leur innocence et le respect des libertés académiques dans la République islamique et l’ensemble du Moyen-Orient.

Si nous sommes sans nouvelles précises de Kylie Moore-Gilbert, toujours détenue dans le quartier des Gardiens de la Révolution de la prison d’Evin, à Téhéran, et condamnée à dix ans de prison – hormis quelques lettres glaçantes sur les conditions inhumaines de son incarcération – nous savons que Fariba Adelkhah a été transférée dans le quartier des prisonnières de droit commun, et blanchie par un tribunal du chef d’inculpation d’espionnage, le 7 janvier, tout en continuant à faire l’objet d’accusations tout aussi fantaisistes (« atteinte à la sécurité nationale » et « propagande contre la République islamique »). Elle poursuit sa grève de la faim. Elle est placée sous surveillance médicale, et reçoit à intervalles réguliers des injections de sérum qui lui permettent de résister physiquement. Sur le plan psychologique, sa détermination reste entière.
Il ne s’agit pas, dans son esprit, d’une grève de désespoir, mais d’un combat pour obtenir sa libération et, avant tout, celle de son compagnon Roland Marchal, arrêté en même temps qu’elle, toujours détenu dans le quartier des Gardiens de la Révolution, et privé de visites consulaires depuis décembre. Nous avons même cru comprendre que Fariba Adelkhah serait prête à suspendre sa grève de la faim si Roland Marchal était libéré, car elle nourrit les plus vives inquiétudes sur son état de santé – alarmes que l’on peut partager en s’interrogeant sur ce que les Gardiens de la Révolution ont à cacher pour repousser ain