Après les affaires Balkany, les limites de la scandalisation médiatique
Une question récurrente est celle de l’adéquation de la presse avec la réalité sociale. Une plus grande visibilité médiatique signifie-t-elle une plus grande prégnance d’un enjeu dans la société et dans l’action des institutions ? À l’inverse, le faible traitement d’un enjeu par les médias est-il l’indicateur de la faiblesse de cette question dans les débats sociaux et l’action politique ?

La question est ancienne et l’on a connu des périodes d’emballement médiatique sur des sujets qui n’ont retenu l’attention publique que le temps d’un événement ponctuel (un mariage princier, un possible OVNI) ou d’une crise (AZF, Cynthia). À l’inverse, les exemples de « causes » restées longtemps muettes, sans relai sociaux sont nombreux (l’hépatite C., les suicides en milieu agricole, le harcèlement sexuel). Mais dans l’un et l’autre cas, les analyses faites sont en général qualitatives et reposent plus sur des perceptions subjectives que sur des quantifications.
Aujourd’hui la base informatisée de la presse européenne Europress permet d’évaluer précisément l’importance rédactionnelle consacrée à des sujets définis par l’utilisateur[1]. Nous avons ainsi défini un champ qui recouvre les principales atteintes à la probité[2], la fraude fiscale et l’abus de bien social (fraude au détriment de l’entreprise). Il sera désigné par le sigle Profibs. Nous avons relevé les occurrences des articles à ce sujet dans les presses nationales et régionales durant cinq années entre 2010 et 2018.
Les résultats montrent une nette augmentation de la visibilité des « affaires » Profibs dans les médias écrits. La progression d’ensemble est de plus de 50% (56%). Un fait significatif est que cette évolution est beaucoup plus importante dans la presse régionale (+ 90%) que dans la presse nationale (+ 18%). Ce mouvement est d’autant plus notable que durant la même période le nombre d’articles publiés, tous domaines confondus, est resté stable, avec même une légère tendance à la diminution. Elle est de