International

Le patient italien ou la vie au temps du Coronavirus

Historien, Avocate

En Italie, la crise sanitaire provoquée par le COVID-19 a principalement touché les zones qui correspondent aux centres de production les plus importants du pays et, en particulier, certaines provinces historiquement caractérisées par un soutien indéfectible à la Ligue du Nord, le parti de Matteo Salvini, qui fonde son succès électoral sur le sentiment de méfiance et de peur à l’égard des étrangers. De manière presque paradoxale, la population de ces régions se trouve aujourd’hui sujette aux préjugés et identifiée comme porteuse de danger.

Depuis la semaine dernière, l’Italie a connu la pire urgence sanitaire de ces dernières décennies, liée au nombre élevé de cas d’infection au nouveau coronavirus (COVID-19). Soudain, l’épidémie, qui, jusqu’à il y a une semaine à peine, apparaissait comme un danger seulement potentiel et lointain, s’est développée dans neuf régions italiennes, pour la plupart dans le Nord de la péninsule, et, en particulier, en Lombardie et en Vénétie. Le développement inquiétant de l’épidémie a sapé le sentiment de sécurité ressenti par de nombreux Européens ces dernières semaines lorsque le nouveau virus infectait des dizaines de milliers de personnes dans le monde, faisant également des victimes, pour la plupart en Chine.

L’augmentation imprévue du niveau d’alerte est intervenue le week-end dernier. Afin de contrer et de contenir l’épidémie, avec l’ordonnance du 23 février, le ministère italien de la Santé a fermé les écoles et les universités et suspendu les événements et les voyages scolaires en Lombardie, Vénétie, Piémont, Émilie-Romagne, Frioul-Vénétie Julienne et Ligurie. Les gouverneurs de ces régions ont alors imposé la fermeture des bars, des cinémas, des musées et d’autres lieux de rassemblement ainsi que l’annulation de nombreux événements sportifs et culturels (dont le carnaval de Venise) ; les employeurs publics et privés ont été invités à recourir, dans la mesure du possible, à de nouvelles formes d’organisation du travail, tels que le travail à distance et le « travail agile » (smart working). Le dimanche soir, une étape supplémentaire, hautement symbolique pour la culture italienne, était franchie avec la suspension des messes et des matchs du Championnat de football : le pays s’est vu alors définitivement obligé de prendre conscience de l’étendue et de la gravité de la situation.

Chaque individu cherche, du moins en apparence, uniquement à se sauver de la contagion, vivant son prochain non pas comme un membre à part entière d’une même collectivité, mais comme une


Guillaume Alonge

Historien, Postdoctorant à l'université de Neuchâtel

Francesca Romana Guarnieri

Avocate

Mots-clés

Covid-19