France-Algérie : à propos de l’architecture narrative du rapport Stora
Le 20 janvier 2021, Benjamin Stora, historien pionnier des études sur l’histoire de l’Algérie et sur la guerre d’Algérie en particulier [1], qu’il examine dans toute sa complexité depuis quarante ans et qui a formé et inspiré plusieurs générations d’étudiants, remettait son rapport sur « les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie » au président de la République française, Emmanuel Macron – un rapport publié ultérieurement sous le titre un tantinet redondant France-Algérie, les passions douloureuses *.

Depuis cette date, les commentaires [2] se sont multipliés de part et d’autre de la Méditerranée sur le contenu du rapport, le bien-fondé du choix de Benjamin Stora pour le rédiger, sur ses orientations politiques et sur les fameuses préconisations de l’historien, qui sont plus que des propositions, pour aller de l’avant vers « un nouveau Traité de réconciliation, d’amitié entre les deux peuples [qui] reste plus que jamais d’actualité [3] ».
Ces réactions viennent de tous bords politiques et d’horizons divers, autant des tenants de ce qu’il nomme « la rente mémorielle », que de ses pairs historiens, certains pour saluer son apport, tels les historiens Pascal Blanchard dans les colonnes d’El Watan et Tramor Quemeneur dans celles de Liberté, d’aucun·e·s pour exprimer leur distance avec son parti-pris de lecture mémorielle comme les historiennes Karima Dirèche et Sylvie Thénault dans les pages d’El Watan et du Monde du 5 février 2021.
Notre angle d’analyse ne privilégiera pas une réflexion sur les mesures de réconciliation proposées mais prendra la forme d’une analyse de l’architecture narrative du rapport suivie d’une incursion dans la trajectoire biographique de l’auteur du rapport lui-même. Benjamin Stora a choisi de construire son propos en inaugurant chaque partie avec deux épigraphes. L’appareillage narratif que le lecteur rencontre avant même de lire les mots de Stora, est formé de ce paratexte du rapport qui oriente d’em