Fusion TF1 / M6 : la grande illusion
Parole aux mastodontes pour commencer, et présentation des acteurs en présence : deux groupes à la capitalisation boursière à neuf zéros : 1,8 milliard d’euros pour le groupe TF1 et 2,2 milliards pour le groupe M6. Ce dernier, contrôlé jusqu’alors par le groupe allemand Bertelsmann, a été mis en vente fin 2020, suscitant de nombreuses convoitises.

Des candidatures aussi variées que celles de Vivendi (Vincent Bolloré [1]), Czech Media Invest (Daniel Kretinsky [2]), Mediawan (Pierre-Antoine Capton, Xavier Niel et Matthieu Pigasse [3]), Mediaset (Silvio Berlusconi), NRJ Group (Jean-Paul Baudecroux), ou encore Altice (Patrick Drahi [4]) ont été évoquées, laissant au vendeur l’embarras du choix. Au final, c’est donc TF1 qui a été choisi, Bertelsmann ayant annoncé au mois de mai 2021 son souhait de céder 30 % du capital de M6 à Bouygues pour 641 millions d’euros, Bouygues devenant de ce fait l’actionnaire de contrôle [5].
Spécificité très française, la presse s’est fait l’écho de l’opération en précisant que TF1 aurait été « le choix privilégié par l’Elysée ». La ministre de la Culture elle-même a par ailleurs laissé entendre qu’elle serait favorable à l’opération, en arguant de la nécessité de créer des « acteurs forts » dans l’audiovisuel. En France, le contrôle des concentrations ne relève pourtant plus du pouvoir exécutif (ce dont on peut se réjouir), puisqu’en 2008, le Parlement a transféré cette prérogative du ministère de l’Économie à l’Autorité de la concurrence, qui est une autorité administrative indépendante du pouvoir politique [6]. Ce transfert de compétence visait précisément à mettre un terme aux ingérences politiques sur un sujet aussi technique qu’essentiel pour le bon fonctionnement de l’économie, mais certaines vieilles habitudes demeurent.
Il reviendra ainsi à l’Autorité de la concurrence, après avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), de décrypter les arguments avancés par TF1 pour déterminer si cette opération est de nature à affec