Santé mentale : un objet pour les sciences sociales

La pandémie de Covid-19 et les confinements successifs auxquels elle a donné lieu sont venus nous rappeler une réalité qui a servi de fondement à la constitution de la sociologie comme science à la fin du 19e siècle : la qualité de notre insertion sociale influe sur notre santé mentale. Les politiques, éclairés par des médecins et des scientifiques, ont arbitré – du moins dans les pays occidentaux qui en avaient les moyens – entre différents impératifs pour prendre leurs décisions dans la gestion de la pandémie, parmi lesquels la préservation de la santé mentale figurait en bonne place, tout du moins dans les discours. C’est notamment l’un des arguments qui a été avancé, du fait des mobilisations de pédiatres et de pédopsychiatres, pour justifier de la non fermeture des établissements scolaires passé le premier confinement.
La dégradation des soins psychiatriques
Dans les faits, la psychiatrie publique reste toutefois sous-dotée, et la crise sanitaire n’a fait qu’accentuer et rendre plus visible ce qui était déjà dénoncé par les professionnel.le.s et les associations d’usagers depuis plusieurs années. Les tribunes de psychiatres dans la presse se sont multipliées ces derniers temps pour alerter quant à la dégradation des soins qui en résulte (notamment un recours jugé excessif à la contention, signalé également par la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté), jusqu’aux récentes assises de la psychiatrie.
La critique de l’asile et la fermeture progressive des lits d’hospitalisation depuis l’après-guerre avait pour corollaire un redéploiement des équipes en ambulatoire, au plus près des lieux de vie. La philosophie du « secteur » considérait que sur tout le territoire national, une équipe de soignants avait en charge la santé mentale de l’ensemble de la population résidant dans son secteur. En principe, personne ne pouvait se retrouver sans accès aux soins psychiques, et la continuité du suivi devait être assurée par l’institution, par-delà la