Une approche écologique des interactions humaines
Écologie. Un mot, deux choses : un mouvement militant et politique, mais aussi et d’abord, une avancée scientifique. L’écologie scientifique, selon la définition qu’en donna Ernst Haeckel en 1866, est « la science des relations des organismes avec leur environnement, autrement dit l’étude de leurs conditions d’existence ». Les conditions d’existence d’une espèce donnée constituent son monde propre, son milieu de vie ou biotope, son umwelt tel que l’a décrit Jakob von Uexküll en 1934 dans son ouvrage pionnier, Milieu animal et milieu humain[1].

Cette définition ne s’applique pas à l’écologie en tant que mouvement militant et politique puisque celle-ci ne se propose pas de produire des connaissances, de décrire une réalité et d’en rendre compte : elle prescrit, elle invite à agir. Cessons, nous dit en effet l’écologie politique et militante, de considérer la planète comme un réservoir de ressources à exploiter et à dominer ; reconnaissons le caractère vital du « système Terre » et des « non humains » qui le composent. Renouons avec ce qui nous fait vivre, écrivent Bruno Latour et Nikolaj Schultz dans leur Mémo sur la nouvelle classe écologique[2] : nous ne devons plus nous considérer comme des humains face à la nature mais comme des vivants au milieu des non humains[3].
Pour définir et prescrire ce qui est souhaitable, il faut d’abord avoir une bonne connaissance de ce qui est. L’écologie normative présuppose donc l’écologie scientifique, écologie des milieux physiques, des plantes, des animaux. Mais où est l’écologie des humains ? On a beau dire, aujourd’hui, que nous, humains, faisons partie de la nature, nous ne figurons toujours pas parmi les objets sur lesquels porte le discours de l’écologie : nous en sommes les destinataires, et ce discours ne nous propose pas une description de ce que nous sommes, il nous invite à agir[4]. Certes, il y a urgence, mais ce n’est pas une raison pour continuer à nous excepter de l’ensemble des vivants[5].
Une première ob