Comment la délinquance a-t-elle vraiment évolué ?
La mesure de la délinquance, les débats qu’elle occasionne s’arrêtent souvent à des observations sur quelques mois, au mieux quelques courtes années. Cet enfermement dans le court terme est facilement trompeur : il donne une importance indue à des mouvements peu significatifs.

C’est particulièrement vrai à un moment où des changements des systèmes de mesure fragilisent les observations récentes. Il est donc utile de chercher à bâtir – puis à analyser – des observations de plus long terme. C’est l’objectif d’un Observatoire scientifique du crime et de la Justice développé au sein d’un laboratoire du CNRS (CESDIP – UMR 8183)[1].
Ainsi, on dit parfois : certes la délinquance patrimoniale diminue, mais la violence, elle, augmente.
Tentons de voir ce que vaut ce diagnostic.
Si l’on considère l’ensemble des vols et cambriolages, statistiques de police et enquêtes de victimation sont dans un rapport de 1 à 2, mais elles s’accordent à enregistrer une pente descendante depuis le milieu des années 1990, due à la diminution des atteintes aux véhicules plutôt qu’à l’évolution du nombre de cambriolages.
Toutefois cette évolution globale s’accompagne de deux réserves.
À partir de 1960, les comptages administratifs – seuls existants alors – suggèrent une forte poussée de la délinquance d’appropriation pendant trois décennies. On ne peut l’attribuer à un effet inflationniste de l’assurance-vol qui ne se généralisera qu’en fin de période, ni à une plus grande vigilance policière dont le taux d’élucidation s’effondre alors pour cette criminalité. Vraisemblablement, on a alors assisté à une explosion de la délinquance d’appropriation liée à l’entrée dans la société de consommation. Du coup, le mouvement ultérieur observé dans le dernier quart de siècle doit être relativisé : il n’est guère plus qu’une érosion en palier haut et le vol de tout poil demeure le risque le plus répandu.
Seconde réserve : le début du XXIe siècle voit certaines délinquances patrimoniales connaître u