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Immigration : le gouvernement britannique entretient la guerre culturelle

Angliciste

Le 26 avril, le projet de loi du gouvernement conservateur britannique contre l’immigration illégale était adopté en troisième lecture à la Chambre des communes. Ce cinquième projet de loi sur l’immigration en dix ans vient compléter un maillage législatif déjà très sévère. Le Parti conservateur, comme le Parti travailliste du reste, jouent désormais la carte du patriotisme, de l’attachement à la monarchie et aux pouvoirs de la police.

Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, la nouvelle loi britannique contre l’immigration illégale risque d’enfreindre la loi internationale, en interdisant de facto l’asile. Le texte propose en effet d’empêcher les personnes qui voyagent via des pays sûrs et qui entrent illégalement au Royaume-Uni de voir leur demande d’asile examinée. La ministre de l’Intérieur aura désormais l’obligation d’expulser les immigré·es clandestin·es, au lieu de laisser cette possibilité à l’appréciation des tribunaux. Iels seront renvoyé·es vers leur pays d’origine ou vers un pays tiers « sûr » comme le Rwanda au titre d’un protocole d’accord déjà signé avec les autorités rwandaises.

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Ce projet de loi a attiré de vives critiques, notamment de la part de l’ancienne Première ministre, Theresa May, et de l’archevêque d’York. Ce dernier a exhorté le gouvernement à « envisager des solutions alternatives qui ne pénalisent pas injustement les personnes les plus vulnérables au monde, et qui reflètent mieux l’histoire du Royaume-Uni en matière de compassion et de leadership moral[1] ». D’aucuns diront que ce durcissement des lois en matière de migration est une aberration qui entache l’image du pays, lequel serait un modèle de tolérance et de multiculturalisme. D’autres affirmeront qu’il s’explique par les choix de quelques individus – la nouvelle ministre de l’Intérieur, Suella Braverman en l’occurrence – ou bien par la pression politique, dans le contexte post-Brexit, pour répondre aux demandes du peuple de « reprendre le contrôle » sur les frontières.

Certes, Suella Braverman, en dépit de ses propres origines en tant que fille d’immigrés du Kenya et de l’Île Maurice, est particulièrement virulente dans son opposition à l’immigration, ayant déclaré au dernier congrès annuel du Parti conservateur qu’elle « rêvait » de voir le premier vol quitter le territoire britannique en direction du Rwanda avec des migrants clandestins à bord. Elle a notamment employé un lan


[1] Harriet Sherwood, Michael Savage, « Illegal migration bill is ‘cruelty without purpose’, says Archbishop of York », The Guardian, 12 mars 2023.

[2] Griffiths avait suggéré que les politiques d’immigration laxistes du gouvernement travailliste étaient à l’origine de la pénurie de logements au niveau local.

[3] Stuart Hall, The Hard Road to Renewal : Thatcherism and the Crisis of the Left, Londres, Verso, 1988.

[4] Ce terme, inventé par le sondeur britannique James Kanagasooriam en 2019, est couramment utilisé pour désigner les circonscriptions situées principalement dans le nord de l’Angleterre et au Pays de Galles qui avaient l’habitude de voter pour le parti travailliste.

Emma Bell

Angliciste, Professeure de civilisation britannique

Notes

[1] Harriet Sherwood, Michael Savage, « Illegal migration bill is ‘cruelty without purpose’, says Archbishop of York », The Guardian, 12 mars 2023.

[2] Griffiths avait suggéré que les politiques d’immigration laxistes du gouvernement travailliste étaient à l’origine de la pénurie de logements au niveau local.

[3] Stuart Hall, The Hard Road to Renewal : Thatcherism and the Crisis of the Left, Londres, Verso, 1988.

[4] Ce terme, inventé par le sondeur britannique James Kanagasooriam en 2019, est couramment utilisé pour désigner les circonscriptions situées principalement dans le nord de l’Angleterre et au Pays de Galles qui avaient l’habitude de voter pour le parti travailliste.