En Argentine, un pouvoir d’extrême droite
Quarante ans après la fin de la dernière dictature civico-militaire, les Argentins ont élu un candidat d’extrême droite, Javier Milei. En France, l’attention – parfois amusée, souvent paternaliste – s’est surtout portée sur les outrances médiatiques du candidat à la tronçonneuse, sur sa coupe de cheveux et ses phrases à l’emporte-pièce. Le président Macron a même posé, tout sourire, brandissant un maillot de l’équipe de foot de Boca Juniors reprenant le slogan de Milei, « Vive la liberté bordel ! » (¡Viva la libertad, carajo!). Les plus libéraux n’hésitent pas à saluer l’audace supposée d’un programme appuyé par le FMI, la BID et Elon Musk. Le ministre des Affaires Etrangères, Stéphane Séjourné, s’est précipité à Buenos Aires pour être le premier ministre européen à rencontrer le nouveau président et son équipe.

Un projet clairement autoritaire
Plusieurs éléments ne laissent cependant aucun doute sur la nature du régime qui s’installe : l’entourage du président, où pullulent les partisans de la dernière dictature, sa pratique du pouvoir, ouvertement autoritaire, et la mise en place de mécanismes visant à criminaliser et à écraser toute opposition. Féministes, syndicats et mouvements sociaux sont clairement dans le viseur d’un pouvoir qui entend déréguler tous les secteurs de l’économie, démanteler tous les services publics, de l’enseignement à la santé en passant par l’éducation, privatiser tout ce qui peut encore l’être et faire taire toute voix critique.
Se focaliser, comme le font majoritairement la presse française et certains politologues avides de pseudo-nouveauté, sur « l’ultra-libéralisme » de Milei relève d’une myopie dangereuse. On rappellera tout d’abord qu’il n’y a aucune incompatibilité entre l’extrême-droite et l’ultralibéralisme – ou le néolibéralisme, dont il n’est qu’une variante. La dictature du général Augusto Pinochet au Chili (1973-1990) a été le laboratoire privilégié des Chicago Boys tout en étant un régime particulièrement sanglant.